Rue de la Loi : Armand De Decker, la courtoisie du sénateur

Bourgmestre d’Uccle et Président du Sénat :  ce sont les deux fonctions que l’on retiendra d’Armand De Decker, décédé à 70 ans d’un cancer.  Pourtant sa carrière ne se limite pas à ces deux temps forts.

Armand De Decker, c’est d’abord un libéral et un bruxellois convaincu. Avocat de formation (formé à l’ULB), il  s’engage au PRL (l’ancêtre du MR) du temps de Jean Gol. En 1981, première élection à la chambre, il a 33 ans. Atlantiste, monarchiste, intéressé par les questions de défense (il a débuté dans ce cabinet ministériel comme conseiller), il monte régulièrement au créneau pour défendre la famille royale et s’opposer aux tentations séparatistes.

Si son nom est aujourd’hui associé à la présidence du sénat, c’est au niveau régional  que sa carrière politique décolle réellement. Député Bruxellois en 1989, il sera président du parlement régional de 1995 à 1999. Celui qu’on appelle “le bel Armand” est  même tête de liste pour les libéraux en 1999. On s’attend à ce qu’il devienne ministre-président, mais la direction du parti lui préfère Jacques Simonet. Armand De Decker ira se consoler à la présidence du Sénat. Ce sera finalement bien mieux qu’un lot de consolation. Diplomate, élégant,  distingué, bilingue, le plus souvent discret, Armand De Decker se révèle tellement  à l’aise qu’il finit par incarner la fonction sénatoriale à la perfection. Au total il aura passé plus de 20 ans à siéger dans la haute assemblée dont 7 années à la présidence (1999-2004 et 2007-2010). A l’aise avec les médias, il refuse rarement une interview, et permet aux journalistes de travailler librement… C’est l’époque dorée du Sénat, celle où les débats sont encore fortement suivis par la presse, et où les premiers ministres traitent les sénateurs avec autant d’égards que les députés. Quelques années plus tard, les président(e)s suivant(e)s ne permettront plus à la presse d’aller et venir comme bon lui semble dans les bâtiments et les premiers ministres finiront par ne plus y mettre les pieds non plus.

Sur le plan local Armand De Decker attend patiemment son heure à Uccle. La commune a beau être un fief libéral, elle est depuis toujours divisée entre plusieurs tendances. Elu conseiller communal en 1989 il devra attendre 2006 pour en devenir le bourgmestre. Un mandat qu’il occupera pendant 9 ans, alors que Didier Reynders vient de débarquer dans la commune et que Boris Dillies est déjà en embuscade.

La fin de carrière d’Armand De Decker est entâchée par des accusations. Celle d’avoir mis son poids politique au service d’un homme d’affaire kazakh (Patok Chodiev) dont il était l’avocat, en échange d’une rémunération conséquente. Des accusations qui vont le contraindre à faire un pas de côté. Le sénat, la commune, Armand De Decker avait finalement tout perdu. Il en éprouvait de l’amertume et un grand sentiment d’injustice. Faute de procès, il ne se sera jamais expliqué. A l’exception de ce dossier, il laisse l’image  d’un grand serviteur de la fonction politique,  un vrai défenseur de la région bruxelloise, un débatteur qui pouvait être ferme sur ses convictions, mais rester courtois.