L’e-commerce à Bruxelles prôné à l’échelon local

Les propos du président du Parti Socialiste Paul Magnette sur l’e-commerce font polémique en Belgique. Ce lundi soir, il a notamment déclaré à l’hebdomadaire flamand Humo qu’“après la sortie du nucléaire, il serait souhaitable de sortir de l’e-commerce”. Mais qu’en est-il à Bruxelles ? Quelle est la stratégie menée par les autorités régionales dans le domaine ?

Alors que le gouvernement fédéral s’apprête à rediscuter de l’assouplissement du travail de nuit dans le secteur de l’e-commerce, le président du PS Paul Magnette a préconisé de limiter ce type de travail à certaines professions comme la police ou les hôpitaux. Il va plus loin en affirmant : “faisons de la Belgique un pays sans commerce électronique, avec de vrais magasins et des villes animées”. Ces propos ont fait littéralement l’effet d’une bombe, générant de nombreuses réactions de la part de politiques, syndicats et fédérations de commerces belges.

Pour le gouvernement de la Région bruxelloise, il n’est pas question de se passer de l’e-commerce. Il est favorisé et même encouragé à condition qu’il se déroule à l’échelon local. “La vente en ligne à la sauce Amazon ou Alibaba, non seulement ce sont des conditions de travail inacceptables, mais l’impact environnemental qu’elle génère est déplorable. De plus, ça ne rapporte rien à l’économie de la Région, ni au bien-être des Bruxellois. Il n’y a aucun intérêt à soutenir ça”, déclare Barbara Trachte (Ecolo), secrétaire d’État bruxelloise chargée de la Transition économique. En revanche, selon l’écologiste, le shopping numérique a permis à plusieurs commerces de diversifier leurs sources de revenus, notamment pendant la crise sanitaire, lorsque certaines enseignes étaient totalement ou partiellement fermées. “Elles ont quand mêmes pu générer des revenus auprès de leur clientèle habituelle”.

Qui sont les e-commerçants bruxellois et leurs clients ?

Le profil type des entreprises qui ont créé ces commerces en partie ou complètement en ligne sont majoritairement des PME. “96% de l’économie bruxelloise est constituée de PME, voire d’indépendants. C’est similaire pour le commerce en ligne”, détaille la secrétaire d’État. Certaines existaient déjà avant de se lancer sur Internet et possèdent un magasin physique. Pour d’autres, ce n’est tout simplement pas le cas. Elles sont désignées par le terme “pure-player” : par exemple, dans le domaine alimentaire, on retrouve Kazidomi et eFarmz, des magasins bio entièrement en ligne. “Ces projets sont très intéressants. Ils soutiennent l’économie bruxelloise et les filières locales, mais servent aussi d’intermédiaire entre les petits producteurs et les consommateurs. Ils sont à l’opposé du fonctionnement des grosses plateformes du secteur”. Barbara Trachte relève également que les habitudes des clients évoluent en la matière. “Évidemment, Amazon et consorts sont populaires, mais les Bruxellois se dirigent de plus en plus vers de l’e-commerce local”.

La Flandre numéro 1 de la vente en ligne

Selon BeCommerce, une ASBL qui rassemble et représente les entreprises actives sur le marché numérique, le territoire national compte 45 116 boutiques en ligne liées à une entreprise belge. Un tiers de celles-ci ont été créées durant les cinq dernières années. La majorité opère dans le domaine du commerce de détail et de gros et se situe en Flandre. Avec ses 71%, le nord du pays est leader en la matière. À elle seule, la province d’Anvers totalise un cinquième de ces webshops flamands.  “Le commerce électronique est davantage ancré en Flandre qu’en Wallonie ou à Bruxelles”, avance Sofie Geeroms, directrice de BeCommerce. “Que ce soient les clients et les entrepreneurs, ils ont davantage le réflexe d’acheter et vendre en ligne qu’en Wallonie ou à Bruxelles”.

En 2020, selon l’analyse du cabinet-conseil Retis, expert dans le domaine, notre pays recensait près de 7 831 e-commerçants tout-en-ligne, ne disposant pas de magasin physique. En moyenne, sur l’ensemble de la Belgique, le nombre de ces entités a augmenté d’environ 45% entre 2019 et 2020. Durant cette période, à Bruxelles, ce nombre passe de 490 en 2019 à 664 en 2020, soit 174 en plus et une hausse de 36%. En Wallonie, en revanche, la hausse n’a été que de 30%, passant de 1 445 e-commerçants en 2019 à 1 876 en 2020. La Flandre reste par contre le réel leader en la matière, avec une hausse avoisinant les 52%.

À noter que se procurer des données purement bruxelloises s’avère compliqué. Elles sont généralement assimilées à celles de la Belgique, et en moindre mesure de la Wallonie. Ni hub.brussels, le gouvernement bruxellois, ni des cabinets d’analyse contactés n’ont été en mesure d’en fournir à BX1.

mymarket.brussels pour “aider à la digitalisation des commerces”

La plateforme d’e-commerce régionale mymarket.brussels propose les produits de plusieurs dizaines de magasins locaux. “Au départ, l’idée, c’était de proposer aux commerces des 19 communes de s’y inscrire facilement pour soit utiliser l’annuaire et y être référencé, soit pour y proposer directement des produits à la vente”. La plateforme fonctionne aujourd’hui toujours de cette manière, mais la Région songe à la remanier. “Elle deviendra une véritable boite à outil pour la digitalisation des commerces, sans pour autant qu’ils aient à débourser beaucoup d’argent”.
À noter aussi que hub.brussels, l’Agence bruxelloise pour l’Accompagnement de l’Entreprise, par l’intermédiaire du 1819.Brussels, soutient aussi les commerçants dans la digitalisation, via des primes notamment.
Ma. Ar. – Photo : Belga/Jonas D’hollander