Métro 3 : une voix citoyenne pour sauver le Palais du Midi
Alors que le Parlement bruxellois vient d’approuver la création d’une commission spéciale sur le projet du métro 3, les voix citoyennes continuent de se faire entendre sur le terrain. Parmi elles, celle de Mustapha Chanuf, habitant du quartier du Midi, qui tente de sauver un symbole du patrimoine bruxellois : le Palais du Midi.
“J’ai déposé un recours en suspension d’extrême urgence et en annulation du permis délivré le 21 août 2025 contre la démolition et la reconstruction du Palais du Midi”, explique-t-il. L’ancien fonctionnaire, profondément attaché à ce bâtiment historique situé à deux pas de chez lui, a saisi le Conseil d’État. “C’est vrai que pour un citoyen lambda, je peux comprendre que parfois ça peut impressionner les gens de se retrouver devant une telle institution, devant plusieurs cabinets d’avocats, des gros cabinets d’avocats qui plus est”, confie-t-il.
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Le recours, actuellement à l’examen, pourrait retarder un projet déjà miné par les incertitudes. En effet, sans gouvernement régional, aucune garantie financière ne peut être donnée pour la reconstruction du Palais. “Si maintenant le président estime que ma requête en extrême urgence n’est pas fondée, il peut la rejeter, mais après on abordera la deuxième étape, c’est-à-dire l’annulation. À ce moment-là, ça prend peut-être entre six et douze mois”, précise Mustapha Chanuf.
Il n’est pas seul dans son combat : les associations d’habitants de l’ARAU et d’Inter-Environnement Bruxelles ont elles aussi déposé un recours conjoint. Tous redoutent de voir disparaître un bâtiment emblématique du paysage urbain. “Je suis né depuis un demi-siècle ici à Bruxelles. C’est notre patrimoine de proximité. C’est notre ancien centre administratif, avant qu’il n’emménage au boulevard Anspach, puis rue des Halles. Nous nous sommes attachés à notre histoire bruxelloise”, plaide Mustapha.
Le projet du métro 3, dont la ligne doit passer sous le Palais du Midi, est aujourd’hui au centre d’une tempête politique. Vendredi, le Parlement bruxellois réuni en séance plénière extraordinaire a voté à l’unanimité la mise sur pied d’une commission spéciale chargée de se pencher sur l’ensemble du dossier. Le PTB s’est abstenu, ayant proposé sans succès la création d’une commission d’enquête parlementaire.
Cette commission, composée de représentants de tous les partis, devra “faire toute la lumière sur la genèse, le pilotage et l’exécution du projet Métro 3”. Elle analysera également les relations entre acteurs publics et privés, et formulera des recommandations pour améliorer la gouvernance des grands chantiers régionaux.
Cette décision intervient dans un climat tendu, après la publication d’un rapport cinglant de la Cour des comptes pointant une explosion du coût global du projet (+255 % entre 2015 et 2024) et un « manque de transparence » dans sa gestion. Le rapport met aussi en cause les dysfonctionnements liés au passage du tunnel sous le Palais du Midi, une section confiée au consortium Toots (Besix–Jan De Nul–Francqui).
Pour Olivier Willocx (MR), “le rapport de la Cour des comptes a pointé tout ce qu’un projet public ne doit pas être. Le morcellement de la maîtrise d’ouvrage […] a dilué les responsabilités et produit : absence de coordination, retards, surcoûts et décisions sans cap clair”. D’autres, comme la socialiste Leila Agic, appellent à recentrer le débat : “La commission spéciale devra permettre de remettre le projet sur les bons rails et non de le remettre en cause, car les habitants du nord de Bruxelles, mais aussi toute la Région, en ont besoin”.
■ Reportage de Valentine Rolus, Yannick Vangansbeek, et Pierre Delmée





