Procès des attentats de Bruxelles : la défense de Bilal El Makhoukhi plaide la complicité pour crime de guerre
Me Nicolas Cohen a la parole jeudi pour défendre son client Bilal El Makhoukhi devant la cour d’assises chargée du procès des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles. Cette journée sera la première d’une série de deux consacrées à cet accusé. Son autre avocate, Me Virginie Taelman, poursuivra la plaidoirie lundi.
Le ministère public avait requis, fin mai, la culpabilité de Bilal El Makhoukhi pour participation aux activités d’un groupe terroriste ainsi que pour assassinat et tentative d’assassinat dans un contexte terroriste.
L’accusé est poursuivi dans ce dossier pour avoir fourni une aide logistique à la cellule terroriste bruxelloise. Il est notamment à l’origine du recrutement de son ami de longue date Hervé Bayingana Muhirwa et sa présence dans plusieurs planques, notamment celle de la rue Max Roos à Schaerbeek, où ont été préparées les bombes, est avérée.
Bilal El Makhoukhi est aussi l’un des rares accusés à être parti combattre en Syrie, d’où il a finalement été rapatrié pour être amputé de la jambe après avoir été grièvement blessé par balle.
Mais le rôle le plus important de l’accusé réside dans la récupération des armes à feu qui se trouvaient dans l’appartement schaerbeekois. L’homme a refusé de s’exprimer à ce sujet et les armes sont donc toujours dans la nature. Me Cohen a annoncé au début du procès qu’il demanderait une requalification des faits en crimes de guerre concernant son client.
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15h00 : “On vous a construit un procès terroriste”
Me Nicolas Cohen a plaidé le crime de guerre dans le chef de son client, Bilal El Makhoukhi. Plus précisément, le pénaliste demande au jury de requalifier les préventions d’attentats et de tentatives d’attentat dans un contexte terroriste en complicité à des crimes de guerre. Pour lui, même si une telle requalification n’engendre pas une peine inférieure, il est important que la cour établisse qu’El Makhoukhi a agi dans le cadre d’un conflit armé, au sein duquel il s’était engagé depuis plusieurs années, et non par pur désir de violence gratuite ou par haine absurde.
“Ce qui s’est passé, c’est un crime de guerre. Or, on vous a construit un procès terroriste”, a-t-il soutenu, appuyant son propos en affirmant que tout le décorum de cette session d’assises résonne “terrorisme”: le lieu où elle se déroule (“un fort” et non une salle d’audience), les policiers encagoulés derrière les accusés, etc. “Ce n’est pas l’image du procès que vous allez juger, mais sa qualification juridique”, a-t-il averti.
L’avocat du suspect a cherché à changer la perception des faits, en reliant l’origine des événements au conflit armé en Syrie, qui remonte à la révolution syrienne de 2011. Il a expliqué que son client s’était engagé plusieurs années avant les attentats, motivé initialement par le désir d’action et en suivant des personnes en qui il avait confiance plutôt que par une conscience politique. L’avocat a soutenu que les attentats du 22 mars 2016 étaient liés aux attaques se déroulant en Syrie, et qu’ils ne représentaient pas une haine envers le peuple belge. Le suspect, Bilal El Makhoukhi, avait combattu en Syrie sous le groupe Maglis Shura al-Mujahidin et avait des liens avec des individus impliqués dans les attentats. Il a été condamné pour participation aux activités d’un groupe terroriste lors du procès de Sharia4Belgium en 2015. Après les attentats, il aurait exfiltré les armes de la cellule terroriste responsable, mais n’a jamais révélé leur emplacement.
10h00 – Me Cohen plaide la complicité pour crime de guerre
Me Nicolas Cohen a entamé sa plaidoirie et d’emblée, le pénaliste a annoncé qu’il demandait au jury de déclarer son client, Bilal El Makhoukhi, coupable de complicité pour crime de guerre. Il a tenu à préciser que cette volonté de requalifier les faits n’est en aucun cas une tentative de légitimation des attentats terroriste du 22 mars.
L’avocat a entamé sa plaidoirie par une question qu’il estime essentielle: pourquoi? “La justice pénale ne s’intéresse qu’au ‘comment’. Nous sommes avant tout des êtres humains, comprendre le ‘comment’ ça aiguise notre curiosité, mais le ‘pourquoi’ finit toujours par arriver. Le ‘pourquoi’ donne leur dimension aux choses“, a estimé Me Cohen.
Il a en outre insisté sur l’importance de ne pas s’arrêter à des “réponses simples“. Il a ajouté plus tard: “Je veux pouvoir revenir à l’origine de cette violence inouïe mais pas incompréhensible“. “Dire que ces attentats ont eu lieu parce que l’islam salafiste déteste la démocratie n’a pas de sens. Cette phrase-là, elle est vide. Si c’était le cas, il y aurait des attentats tous les jours“, a développé l’avocat.
“On n’est pas dans une lutte des civilisations permanentes. Il y a quelque chose de plus fort derrière“. Me Cohen a ensuite expliqué que sa plaidoirie s’attacherait à expliquer pourquoi son client est, selon lui, coupable de complicité de crime de guerre. “Il s’agit de plaider coupable, mais dans un autre champ juridique“, a-t-il précisé.
avec Belga