Obliger le testing aux aéroports ? Le juge se déclare sans juridiction

Le tribunal civil de Bruxelles, siégeant en référé, s’est déclaré sans juridiction pour connaître de la demande d’un médecin montois d’obliger les autorités à effectuer des tests de dépistage du coronavirus dans les aéroports belges, selon une information de L’Echo jeudi, confirmée à Belga.

La requête avait été introduite contre l’Etat belge et la Région wallonne par le docteur David Bouillon qui, avec une unité médicale mobile, effectue chaque jour des tests dans différentes villes belges, sur des citoyens désireux de savoir s’ils sont ou non porteurs du virus.

Le juge a estimé que, compte tenu de la séparation des pouvoirs, il ne pouvait pas examiner la demande. “Même si la situation actuelle est préoccupante […] rien ne peut justifier d’ignorer les règles fondamentales de l’Etat de droit, et spécialement celle de la séparation des pouvoirs“, déclare-t-il. Le respect de ces principes est “encore plus important en période de crise, car c’est dans ces moments-là qu’on peut trouver le plus facilement des justifications à ce qui, pourtant, ne serait qu’une dangereuse dérive“, glisse-t-il dans son ordonnance.

“les atteintes à l’Etat de droit se sont multipliées

Dans une réflexion plus large sur l’Etat de droit au travers de sa décision, le juge relève qu’actuellement, “depuis que la progression de la Covid-19 a pris les allures d’une pandémie, les atteintes à l’Etat de droit se sont multipliées dans nombre de pays, et certainement en Belgique“. Certaines observations mériteraient, selon lui, d’être débattues, notamment l’existence d’une insécurité juridique en raison du changement incessant des règles, mais aussi la multiplication d’atteintes à la vie privée non justifiées en droit, ou encore l’émergence d’inégalités des citoyens devant la loi.

Sur ce dernier point, le juge cite comme exemple “les magasins de produits non alimentaires qui ont dû fermer tandis que la grande distribution était autorisée à vendre ces mêmes produits” et “la foire du Midi interdite quand les parcs d’attraction sont ouverts“. Le magistrat avance qu’un “débat devrait aussi avoir lieu sur une conséquence possible du basculement de l’Etat de droit, soit le risque d’une émergence d’un état totalitaire, […] alors que des signes inquiétants se multiplient, révélant la mise en place, discrète et doucereuse, d’un système étouffant, avec son vocabulaire trompeur (confinement pour “assignation à résidence”, distanciation sociale pour “rupture des relations humaines, […]“.

Pas de test systématique au retour de voyage

La procédure avait été introduite par le docteur David Bouillon et son association médico-sociale Lagardère pour tenter d’obtenir du tribunal qu’il contraigne l’Etat belge et la Région wallonne à tester, aux aéroports, tous les passagers qui rentrent des zones dites rouges, des régions du monde où les cas de Covid-19 sont nombreux.

Actuellement, les Belges revenant de ces zones, par avion ou par d’autres moyens de transport, doivent passer un test à leur retour et se mettre en quarantaine s’ils sont positifs au coronavirus. Mais tous ces vacanciers ne seront pas systématiquement contrôlés.

Le docteur Bouillon a indiqué jeudi à Belga qu’il ne fera pas appel de l’ordonnance. “Je vais continuer le combat sur le terrain. Nous, on veut sauver des vies, c’est tout“, a-t-il réagi. Le médecin a néanmoins précisé qu’il a envoyé un courrier aux autorités politiques pour attirer leur attention sur sa demande et que, sans réponse de leur part dans les prochains jours, il envisage de déposer plainte contre l’Etat pour non-assistance à personne en danger.

Belga 

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06 août 2020 - 15h36
Modifié le 06 août 2020 - 18h49