L’édito de Fabrice Grosfilley : vieillir mieux
Et si la vraie question c’était celle de la fin de vie ? De l’attention qu’on porte aux seniors, de leur capacité à rester ou pas en relativement bonne santé ? De leur possibilité d’avoir de dernières années qui ne soient pas marquées par la tristesse, l’isolement, la précarité ? Ce lundi la Mutualité chrétienne publie une étude consacrée à l’état de santé des plus de 65 ans. On ne se faisait pas trop d’illusions, on se doutait que les plus âgés avaient une santé plus fragile, mais il est quand même utile de mettre des chiffres sur le phénomène.
Chez les plus de 65 ans, une personne sur cinq va séjourner dans un hôpital au cours de l’année. Huit personnes sur 10 suivent un traitement médical. Dans 62 % des cas c’est pour des troubles cardiovasculaires. Deux seniors sur trois doivent donc prendre des médicaments du type antihypertenseurs ou des médicaments pour une thérapie cardiaque. Pour 4 personnes sur 10 des médicaments antithrombotiques pour prévenir le risque de thrombose. Viennent ensuite : le diabète, les pathologies mentales, la broncho-pneumopathie chronique obstructive, les affections de la thyroïde, le cancer…
À ces difficultés de santé s’ajoutent la solitude et la précarité. Un senior sur 3 vit seul à l’échelle du royaume, c’est près d’un sur deux pour la région bruxelloise (47% exactement). Une personne sur quatre a le statut “BIM”, bénéficiaire d’intervention majorée. Et là le constat de la Mutualité chrétienne est assez glaçant : le taux de mortalité est deux fois plus élevé pour ces bénéficiaires que pour le reste de la population. Quand on a plus de 65 ans, on a 3,7% de probabilité de mourir dans l’année. Quand on est bénéficiaire de intervention majorée et qu”on a plus de 65 ans, la probabilité dépasse les 6% . Évidement plus vous avancez en âge, plus le risque de décéder est important.
La retraite, la vieillesse, c’est le pied. L’âge de la pension on a tous hâte d’y arriver ? Détrompez-vous, vous risquez de déchanter. Une personne âgée sur trois déclare souffrir d’une limitation sérieuse d’au moins une activité fonctionnelle et plus de la moitié sont limitées dans l’accomplissement des activités ménagères
Un mot sur l’espérance de vie ; elle devrait atteindre 87,9 ans pour les femmes et 85,4 ans pour les hommes en 2050. Le Bureau Fédéral du Plan prévoit que la proportion de + de 65 ans en Belgique passera de 19,6% en 2022 à 25,1% en 2050. Dans un quart de siècle, les seniors représenteront un quart de la population. Le vieillissement est donc un enjeu social et de santé considérable. Les projections nous enseignent qu’en moyenne une femme de 65 ans vivra 10 années en mauvaise santé, ce sera 7 ans pour les hommes.
Cette étude ne tombe pas par hasard. Le but pour la mutualité est de mettre cette question à l’ordre du jour. Que faisons nous de nos vieux jours? Jusqu’à quel âge est-il raisonnable de travailler ? Quels sont les montants que nous voulons consacrer aux pensions, aux soins de santé, comment finançons-nous les homes ou les maisons de retraite, avec quel type d’encadrement, quelle est l’attention que nous voulons porter ou pas à nos ainés ? Ce sont de vraies questions de société. Elles pèsent et pèseront de plus en plus lourd sur le budget. Celui de la sécurité sociale, des familles, des individus. S’il y a les chiffres, il y-a aussi des visages, des prénoms de ces âgés que nous connaissons et chérissons. Et aussi l’idée que (si tout se passe bien) nous serons tous un jour des seniors, et que ce débat, comme d’autres, a bien sa place dans une campagne électorale.