L’édito de Fabrice Grosfilley : attendre la ligne d’arrivée

Un ascenseur émotionnel, une douche écossaise, un chaud et froid des sentiments, un passage rapide de l’euphorie au désespoir... vous retiendrez l’expression de votre choix, mais les supporters de l’Union Saint-Gilloise sont passés par toutes les couleurs de l’enthousiasme dimanche soir au parc Duden. Après une premier mi-temps assez terne, leur équipe de football a ouvert le score et s’est retrouvée provisoirement en position de champion de Belgique.

Derrière l’Union c’est une bonne partie de Bruxelles qui s’est mise à rêver d’un titre de champion national. Mais le rêve a été de courte durée. Bruges a égalisé. Pire, en fin de période les unionistes ont voulu lancer leurs dernières forces dans la bataille, tout le monde à l’avant, il n’y avait d’ailleurs pas d’autres stratégies possibles. Mais Bruges en a profité, avec deux buts marqués en contre-attaque, score final 1-3. L’addition est salée et la désillusion sévère.

Dans le même temps l’Antwerp, d’abord mené au score, égalisait face à Genk. Anvers champion, Genk deuxième, l’Union Saint-Gilloise va devoir se contenter de la troisième place et voit la Ligue des Champions lui filer sous le nez.

Ce n’est que du foot

Cela ne change pas la face du monde, ça n’empêchera pas la planète de tourner avec son lot de misères, de catastrophes, de bonnes et moins bonnes nouvelles. La croissance économique qui repart, le réchauffement climatique qui se poursuit, la guerre en Ukraine , etc.

La particularité du football en général et de l’Union en particulier est qu’ils suscitent de la passion, de enthousiasme à n’en plus finir. En regardant un match, on se sent vivre. Une poussée d’adrénaline, une communion collective, un cœur qui fait des bonds, à l’unisson des cœurs voisins, c’est ce que les supporters recherchent  et trouvent dans les gradins. Tant que c’est bon enfant et respectueux de l’équipe adversaire on a rien à y redire.

“La glorieuse incertitude du sport”

La leçon de cette soirée à suspens où 3 clubs ont tour à tour été virtuellement champions et où il a donc fallu attendre la toute fin des deux matchs en cours pour savoir qui serait réellement le gagnant c’est finalement que la glorieuse incertitude du sport, celle qui fait que tout est possible et que David n’est jamais condamné à perdre contre Goliath a forcément un revers : c’est le risque de devoir déchanter. Qu’à trop vouloir y croire on se donne des ailes, mais que le rappel à la réalité risque d’être violent.

Retour sur la terre ferme façon atterrissage en piqué. On ne doit donc jamais vendre la peau d’un match avant qu’il ne soit  terminé. On ne doit jamais se croire champion tant que les mathématiques ne l’ont pas confirmé.

En y réfléchissant bien cette maxime sportive nous pouvons l’appliquer à de nombreux pans de notre existence. Cette émission matinale, qu’on vous présente du lundi au vendredi démarre bien à 7h25, on ne saura qu’à 9 heures si elle se termine aussi bien. Si votre café a un gout un peu amer, parce que c’est lundi et que vous êtes levé du mauvais pied, rien n’exclut que la fin de votre journée soit plus douce. Les étudiants se rappelleront que réussir un premier examen n’est pas décrocher son diplôme.

Et pour tous nos gouvernements que ce qui parait acquis aujourd’hui ne le sera peut-être pas au lendemain des élections. A nos dirigeants on rappellera que 2024 est encore loin et qu’on attend d’eux qu’ils donnent le meilleur d’eux-même au service de l’intérêt général.  L’analogie est encore plus flagrante avec le cyclisme. La condition humaine ressemble à une course par étape. On peut rester à l’abri au ceux du peloton. On peut aussi avoir envie de faire la course en tête, parce qu’on s’y sent vivre davantage. Mais quand on voit la ligne d’arrivée arriver , il faut éviter de se relever trop tôt.

Fabrice Grosfilley