Leader politique kosovar tué à Saint-Gilles : la défense demande l’accès aux déclarations d’un témoin assassiné
Les conseils d’Andrija Draskovic ont déposé des conclusions jeudi soir devant la cour d’assises de Bruxelles, sollicitant que les auditions complètes du témoin Miroslaw Bizic, aujourd’hui décédé, soient communiquées au jury dès maintenant.
Pour justifier cette demande, ils ont avancé que l’acte d’accusation de l’avocate générale ne mentionne pas les passages des auditions dans lesquels ce témoin se rétracte. Andrija Draskovic et Veselin Vukotic sont accusés d’être deux des quatre auteurs de l’assassinat d’Enver Hadri, leader politique kosovar tué en 1990 à Saint-Gilles.
Miroslaw Bizic, assassiné en 1994, était un policier de Belgrade. Il a fait l’objet d’une enquête des services de sécurité de la Yougoslavie et de la Serbie après le meurtre d’Enver Hadri. Cette enquête a mis en évidence qu’il existait une collaboration entre des criminels de Belgrade et la police serbe, par l’entremise de Miroslaw Bizic, pour le compte de Bozidar Spacic, inspecteur principal des services de renseignements yougoslaves.
Miroslaw Bizic a, durant cette enquête, désigné Andrija Draskovic comme l’un des auteurs du meurtre d’Enver Hadri. Or, selon la défense de Draskovic, Bizic a par la suite déclaré avoir été mis sous pression durant son interrogatoire, et il s’est rétracté. Cette information ne figure pourtant pas dans l’acte d’accusation qui a été lu toute la journée de jeudi par l’avocate générale.
La défense Draskovic a dès lors déposé des conclusions visant à demander à la cour de donner accès au jury, dès maintenant, à l’entièreté de la déposition de Bizic, et non pas uniquement lorsqu’il entrera en délibération. “C’est important pour l’exercice des droits de défense“, a insisté Me Jean-Philippe Mayence.
La cour rendra un arrêt sur cette demande vendredi matin.
Retour sur les faits
Veselin Vukotic, âgé de 72 ans, et Andrija Draskovic, âgé de 60 ans, sont accusés d’avoir assassiné Enver Hadri. Ils avaient été condamnés pour ces faits par défaut en novembre 2016 par la cour d’assises de Bruxelles à la réclusion à perpétuité. Le jury avait établi qu’ils avaient agi sur ordre des services secrets d’ex-Yougoslavie, plus précisément sur instruction de l’inspecteur principal Bozidar Spacic. Ce dernier a, lui aussi, été condamné par défaut à la réclusion à perpétuité par la cour.
Veselin Vukotic et Andrija Draskovic ont par la suite fait opposition à l’arrêt de la cour d’assises, donnant lieu à un nouveau procès. Celui-ci a débuté ce jeudi. Veselin Vukotic fait à nouveau défaut. Quant à Andrija Draskovic, il est absent mais ses avocats le représentent.
Le 25 février 1990 vers 16h30, Enver Hadri, qui était président du Comité pour la défense des droits de l’Homme au Kosovo, se trouvait au volant de sa voiture rue Saint-Bernard à Saint-Gilles. Alors qu’il avait marqué l’arrêt au feu rouge, un autre véhicule s’est placé à sa hauteur. La vitre du passager s’est ensuite abaissée et des coups de feu ont été tirés, selon plusieurs témoins.
Enver Hadri, âgé de 49 ans, a été atteint d’une balle dans la tête. Il est décédé quelques heures plus tard à l’hôpital Saint-Pierre de Bruxelles.
Le procès se poursuivra vendredi avec la lecture d’un acte de défense et les auditions de témoins dits de contexte.
Belga – Photo : Belga