TVA provisoire, chèque, tarif social… : voici les mesures prévues contre la hausse des prix de l’énergie

Le gouvernement fédéral réuni en comité restreint a trouvé un accord durant la nuit de lundi à mardi sur le prix de l’énergie et le mini-tax shift.

Concrètement, cet accord implique le passage dès le 1er mars de la TVA sur l’électricité de 21% à 6% et ce, jusqu’au 1er juillet. Un système d’accises, permettant de moduler la fiscalité sur l’énergie en fonction des ménages, sera ensuite mis en place.

Un chèque énergie de 100 euros va également être octroyé, sous forme de réduction de la facture d’électricité de tous les bénéficiaires d’un contrat résidentiel. Le choix de passer par le contrat d’électricité permet, selon le gouvernement, d’accorder la prime quelle que soit la manière de se chauffer, que ce soit le mazout, le gaz ou l’électricité (les explications d’Alexander De Croo dans la vidéo ci-dessus).

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Prolongation du tarif social

Un consensus existait déjà sur la prolongation du tarif social élargi, dont bénéficient environ un million de ménages aux bas revenus en Belgique. Selon la DH, cette aide pourrait concerner 30% des ménages bruxellois, mais tous les bénéficiaires n’en font pas la demande.

La mesure expirait normalement le 31 mars prochain. Elle vaudra encore durant le 2e trimestre 2022.

Les différentes mesures concernant les prix de l’énergie représentent un montant de quelque 1,1 milliard d’euros. Celles-ci seront financées via les recettes TVA supplémentaires perçues précédemment, un prélèvement sur les sur-revenus du nucléaire et via la diminution des subsides à l’éolien en mer consécutive à l’augmentation des prix. Le surplus budgétaire tiré de la hausse actuelle des prix de l’énergie est ainsi estimé à 800 millions d’euros.

Des mesures “difficiles” à appliquer d’ici mars

Les fournisseurs d’énergie craignent de ne pas parvenir à appliquer la baisse de la TVA sur l’électricité d’ici mars, indique par voie de communiqué la fédération des entreprises électriques et gazières (Febeg).

“Les fournisseurs vont tout faire pour agir le plus rapidement possible au sein de leurs organisations pour modifier, tester et mettre en place les multitudes de processus et documents impactés”, précise la Febeg. “Mais le délai de mise en place des mesures reste cependant trop rapide ajoute-t-elle, précisant ne pas pouvoir “actuellement s’engager à ce que tout soit en place pour le 1er mars”. Deux mois sont nécessaires pour garantir une facturation de qualité et éviter des problèmes juridiques ultérieurs, poursuit la fédération.

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Test-Achats : “Des mesures pas suffisantes”

Pour l’association de défense des consommateurs Test-Achats, ces mesures restent sur leur faim : “Nous demandons des solutions plus structurelles, et non limitées dans le temps. (…) Ces mesures, aujourd’hui, ne sont pas suffisantes, dit Jean-Philippe Ducart, porte-parole de Test-Achats à BX1. “On parle de factures de gaz autour de 3 500 euros par an, de factures d’électricité autour de 1 800/1 900 euros par an. Quand vous mettez ces chiffres en balance avec les mesures proposées par le gouvernement, ce n’est pas grand-chose pour certains ménages…”

Opposition : “Trop peu, trop tard”

Au sein de l’opposition politique, ces annonces apparaissent comme trop tardives. “Beaucoup trop peu, beaucoup trop tard”, résume DéFI. “La montagne a accouché d’une souris. Pire, c’est devenu une blague”, estime pour le PTB son président Raoul Hedebouw. Cheffe de groupe cdH à la Chambre, Catherine Fonck a aussi exprimé sa déception via Twitter.

Les trois formations d’opposition pointent toutes un élément qui pose question : il n’y a “rien” de spécifiquement prévu pour le gaz pour le moment (au-delà du tarif social élargi prolongé jusqu’à fin juin). La baisse temporaire de la TVA, de 21% à 6%, ne concerne en effet que l’électricité. Et c’est une mesure qui coïncidera avec le printemps, période où la consommation devrait progressivement diminuer, note DéFI.

“Aucune mesure concernant le gaz, qui constitue la plus grosse dépense de la facture énergétique. Rien pour le mazout”, tance le parti. Le PTB souligne le même problème : “Le gouvernement est-il conscient que c’est justement la facture de gaz qui a été multipliée par trois ?”, s’interroge Raoul Hedebouw, dont le parti a milité ces derniers mois pour une baisse pérenne de TVA aussi bien sur l’électricité que sur le gaz.

Même avec le chèque énergie de 100 euros par ménage, une prime unique que la majorité a appelé “prime de chauffage”, le soutien moyen apparait bien limité en comparaison de la multiplication des montants des factures. “Une aide moyenne de 165 €. (…) Alors que l’État va continuer à accumuler les recettes suite à l’explosion des prix”, remarque l’élue cdH Catherine Fonck via son compte Twitter.

Les mêmes critiques ont animé l’opposition flamande au niveau fédéral, N-VA en tête. Dans la solution présentée mardi par la majorité, “il y a de quoi faire plaisir à chaque parti du gouvernement, mais pour le citoyen cela ne résulte pas en une baisse fondamentale de la facture d’énergie”, résume le chef de groupe Peter De Roover. Le gouvernement “ne fait absolument rien pour les factures exorbitantes subies par les citoyens cet hiver, à cause des prix élevés, mais aussi à cause du télétravail imposé ou des quarantaines”, interprète-t-il.

N-VA et Vlaams Belang ne se privent pas de pointer ce qu’ils voient comme une marque d’hypocrisie du gouvernement : la TVA est maintenue à 21% sur le gaz, source d’énergie polluante, alors que parallèlement la sortie du nucléaire devrait s’accompagner de la construction de centrales fonctionnant au gaz, soutenue par le mécanisme de rémunération de capacités.

Avec Belga – Photo : Belga/Pool Frédéric Sierakowski

■ Reportage de Thomas Dufrane avec Frédéric De Henau, Belga Vidéo et Pierre Delmée.