La pénurie d’effectifs, un autre fardeau post-Covid pour l’Horeca bruxellois

Restaurant Masque Horeca Coronavirus - Belga Thierry Roge

L’Horeca bruxellois fait face à une pénurie d’effectifs.

Après des mois de fermeture, de difficultés financières et d’incertitude, les établissements Horeca de la capitale font désormais face à un nouveau fardeau : une pénurie d’effectifs.On estime ce manque d’effectifs à 30%, selon les fédérations“, indique la députée bruxelloise Clémentine Barzin (MR), qui a interrogé le ministre bruxellois de l’Emploi à ce sujet. Néanmoins, au cabinet de ce dernier, on ne peut nous confirmer ce chiffre avec précision.

Reste que la pénurie est bien visible dans le milieu Horeca. Albert Michiels est le propriétaire de onze restaurants à travers le pays, sous la bannière Restauration Nouvelle, dont plusieurs à Bruxelles (comme la Brasserie du Prince d’Orange, la Brasserie des Étangs Mellaerts, Brasserie du Heysel ou encore le Chalet du Laerbeek). Des établissements qui ont pu rouvrir ces dernières semaines, dans le cadre du déconfinement, mais pour lesquels le propriétaire peine désormais à trouver du personnel.

C’est très compliqué, aujourd’hui. On poste des annonces, mais nous n’obtenons aucune réponse“, nous explique Albert Michiels, propriétaire de Restauration Nouvelle, “Heureusement que nous avons, cet été, les étudiants qui veulent travailler puisqu’ils n’ont pas eu de revenus durant des mois. Ce sont eux qui nous sauvent, pour l’instant. Mais que fera-t-on en septembre ?“.

► Reportage | Les restaurateurs dénoncent le manque de main d’oeuvre dans le secteur Horeca (06/07/2021)

 

Des travailleurs partis dans d’autres secteurs

Pour expliquer cette pénurie, certains évoquent les réorientations professionnelles, nombreuses durant la crise. Selon une étude menée par view.brussels, le bras statistique d’Actiris, et dont les calculs se basent sur 1.384 chercheurs d’emploi inscrits auprès d’Actiris après avoir perdu leur emploi dans l’Horeca entre mars et décembre 2020, “487 ont pu, par la suite, retrouver un emploi, entre le moment de leur inscription et avril 2021, ce qui est un taux de réinsertion de 35%“, indique Bernard Clerfayt (DéFI), ministre bruxellois de l’Emploi, en commission ce mercredi matin, “On peut déterminer que 46% de ces travailleurs ont retrouvé un emploi dans l’Horeca, et 54% dans un autre domaine d’activité“.

C’est ça aussi qui complique la reprise de l’Horeca aujourd’hui : les travailleurs qualifiés sont partis vers d’autres secteurs, ce qui ne fait qu’accroître le sentiment de pénurie pour l’instant“, ajoute le ministre. Une situation qui est confirmée par le patron de Restauration Nouvelle, Albert Michiels : “on a été confronté à deux travailleurs de chez nous, qui ont quitté l’Horeca pour d’autres domaines, comme la poste par exemple. Là, ils ont un travail de jour, congé le week-end : c’est de plus en plus compliqué de faire travailler les gens le soir“.

Une question de confort de vie : une autre raison évoquée par Albert Michiels. “Mon analyse, c’est aussi que tant qu’ils ont accordé du chômage Covid, il y a certaines personnes qui ont trouvé un confort à rester au chômage, ils ne sont pas prêts à revenir“, indique-t-il.

 

Une remontée des offres d’emploi

En commission Emploi du Parlement bruxellois, Bernard Clerfayt a notamment fait part d’une diminution de 60% du volume des offres d’emploi reçues par Actiris dans le domaine de l’Horeca, depuis le tout début de la crise sanitaire (-7% de manière générale, -46% pour le commerce).

Mais plus récemment, les choses vont un peu mieux, heureusement : pour les chiffres pour le mois de mai 2021, on a reçu 4.444 offres d’emploi, des chiffres qui indiquent une hausse mensuelle de 11% et annuelle de 83%, de 48,5% par rapport à 2019. Si on exclut les offres d’emploi pour de l’intérim, le niveau d’offres d’emploi reste supérieur à l’année dernière (+53%), et 17% de plus qu’il y a deux ans. C’est encourageant. Au cours de ces trois derniers mois, on constate que le volume des offres d’emploi reçues directement par Actiris a fortement augmenté, mais ce volume des offres s’explique par une amélioration de la capture des offres par Actiris. Cette hausse ne reflète donc que partiellement, sans doute, la reprise réelle d’activité“, a indiqué le ministre amarante.

► Interview | En mai dernier, 8.000 personnes étaient inscrites comme demandeuses d’emploi dans l’Horeca (05/05/2021)

 

Comment régler le problème ?

Sur Twitter, la députée bruxelloise Clémentine Barzin (MR) a notamment fait écho de ces chiffres, indiquant qu’il y a un “même impact pour les secteurs du transport, de la logistique, de la construction, de l’information et communication, des activités immobilières, de la vente au détail alimentaire et l’industrie : 2/3 des entreprises rencontrent plus de difficultés que d’habitude à trouver du personnel“, écrit-elle sur le réseau sociaux.

Ce mercredi, la députée a adressé une question orale à ce sujet à Bernard Clerfayt (DéFI), le ministre bruxellois de l’Emploi. “Le ministre nous indique que le plan de relance prévoit 100 places supplémentaires en formation professionnelle pour le secteur de la logistique, 50 places pour les métiers techniques de la santé, 200 places pour le digital. Il rappelle la problématique profonde de la pénurie dans le secteur de la construction. Mais, concernant les pénuries plus directement liées à la reconversion des travailleurs pendant la crise covid (vu le chômage temporaire), on n’a pas de détail“, nous indique la députée régionale, “Qu’est-ce qui est fait aujourd’hui, avec l’enveloppe de 600.000 euros, au centre de référence Horeca Be Pro comme analyse des besoins de l’Horeca et quelles sont les formations supplémentaires qui sont dès lors mises en place vu la pénurie? Qu’est-ce qui est fait pour analyser les besoins et intensifier les formations pour les métiers de contact : je pense aux coiffeurs, pour les agences de voyage, pour le commerce de détail? Mes contacts directs avec ces secteurs insistent sur le problème de la pénurie actuelle“.

Face à cette situation, Clémentine Barzin indique qu’elle plaidera en commission de l’Emploi du Parlement bruxellois, où elle siège, pour de nouvelles formations.

Aujourd’hui, il faut un renforcement qualitatif, en fonction de l’analyse des besoins spécifiques, et quantitatif, des formations, avec le cas échéant des formations supplémentaires. Le ministre nous donne des chiffres de View.Brussels qui attestent de ces “nouvelles” pénuries… C’est maintenant qu’il faut y donner une réponse“, conclut Clémentine Barzin.

 

Arnaud Bruckner – Photo : Belga (illustration)

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14 juillet 2021 - 18h25
Modifié le 15 juillet 2021 - 07h43