Écoles, mariages, services au guichet… : voici les différences de décisions entre communes face au coronavirus
BX1 a sondé 16 des 19 localités de la capitale sur différentes modalités pratiques. Les mesures concernent le système de garderie, les visites dans les maisons de repos, le nombre d’invités aux mariages civils, mais aussi parfois le risque de certificats médicaux au sein du personnel.
Écoles: une solution de dernier recours
Les 19 communes bruxelloises mettent en place lundi un service de garderie pour les enfants dont les parents n’ont pas trouvé d’autres solutions. Ceci sachant que faire garder les enfants par leurs grands-parents ne fait pas partie des solutions acceptables. La consigne est que l’école s’avère une solution de dernier recours. Le bourgmestre éverois faisant-fonction Ridouane Chahid (PS) résume: “Les services de garderie visent deux types de public: les parents avec une profession dans les secteurs de la santé et la sécurité, et ceux qui ne savent pas faire autrement et n’auraient que les grands parents comme recours”.
Parmi les 16 communes contactées, Evere est la seule qui prévoit de centraliser les garderies. “On centralise lundi les garderies dans deux écoles: une francophone qui est Marie Popelin et une néerlandophone qui est Everheide. On verra lundi en fonction du nombre d’élèves présents si c’est nécessaire d’ouvrir d’autres classes”, explique Ridouane Chahid. À Molenbeek, Catherine Moureaux (PS) tient absolument au contraire à ce que les élèves soient gardés dans leur école “pour ne pas mélanger les publics”. A Schaerbeek, l’échevin de l’Enseignement Michel De Herde a aussi demandé de faire garder les enfants dans “les endroits les moins confinés possibles”.
Que feront les élèves qui se présenteront lundi? Une certitude: ils n’auront pas cours. À Anderlecht, il est question d’activités pédagogiques. “On a demandé à chaque école d’en développer dans leurs locaux”, explique l’échevin de l’Enseignement et futur bourgmestre Fabrice Cumps (PS). À Saint-Gilles, on laisse chaque direction juge de la meilleure manière d’occuper les élèves. “Mais les professeurs ne sont pas des animateurs”, précise tout de même son bourgmestre Charles Picqué (PS).
Les enseignants attendus lundi
Sauf certificat médical, les professeurs doivent en tout cas se rendre sur leur lieu de travail. Le bourgmestre ixellois Christos Doulkeridis explique: “On demande aux enseignants d’être présents. Lundi sera une sorte journée-tampon. Il y aura sans doute de nouvelles injonctions après. De manière générale, on est dans une période où il faut de la souplesse”. Partout, une des incertitudes s’avère le nombre d’enfants qu’il faudra gérer accueillir et à gérer. Le maïeur berchemois Joël Riguelle (CDH) résume: “On a déjà une cellule de crise prévue à 11h avec les directions d’école pour faire le point”.
Le taux d’absentéisme des professeurs s’avère l’autre grande inconnue. Certains seront sans doute tentés de remettre un certificat médical. “On en a déjà reçu. Ce serait mentir de dire le contraire. Je n’ai pas l’impression que le phénomène va exploser, mais, oui, une minorité d’enseignants essaient aussi de trouver des excuses pour ne pas venir. La règle est claire pour justifier une absence: il faut soit un certificat médical, soit un document comme quoi l’école de leur enfant a refusé d’accueillir celui-ci”, explique les schaerbeekois Michel De Herde.
L’édile amarante convient toutefois qu’il sera impossible de vérifier si les certificats sont de complaisance ou non. Tout repose sur la confiance. À Molenbeek, il est par ailleurs prévu que les professeurs qui s’occupent des élèves le fassent sur une base volontaire. Dans de nombreuses écoles, certains enseignants seront sur place, mais ne s’occuperont pas des enfants présents. Il s’agira de faire preuve d’imagination. “Il existe de nombreuses possibilités pour mettre ce temps à profit. Les professeurs peuvent par exemple faire du travail collaboratif, travailler au plan de pilotage de leur école (NDLR: prévus dans le cadre du Pacte d’excellence), ou encore mettre en ordre leur labo”, ajoute Michel De Herde.
Enfin, c’est important, les services de repas chaud ne fonctionneront pas dans les prochaines semaines. Les Cuisines Bruxelloises qui déservent un grand nombre de communes de la capitale arrêtent leurs activités, mais cela semble d’application pour les autres fournisseurs. “Chacun apporte ses tartines”, résume Joël Riguelle.
Continuité des services publics
Deux maîtres-mots reviennent dans l’ensemble des communes bruxelloises: l’encouragement au télétravail pour le personnel et la continuité des services publics. “Tout en gardant en tête la garantie de cette continuité, on a demandé aux chefs de service de nous faire une liste de ceux qui peuvent télétravailler”, explique le bourgmestre etterbeekois Vincent De Wolf (MR). Reste que de nombreuses fonctions au sein de l’administration ne se prêtent pas au télétravail. Charles Picqué glisse ainsi: “On l’encourage quand c’est possible, mais si les services publics s’appellent ainsi, ce n’est pas pour rien”.
Ixelles rappelle pour sa part que différents documents sont directement accessibles sur son site Internet. Une certaine souplesse de la part du personnel est requise un peu partout. “Certains personnes d’un service sont susceptibles de venir en renfort d’un autre s’il y a trop d’absents”, explique Charles Picqué. “Le personnel d’infrastructures sportives ou culturelles peut être mobilisé à d’autres tâches”, confirme le Tennoodois Emir Kir (Indépendant).
Du côté d’Uccle, un plan plus élaboré sur la question a déjà vu le jour, il y a quelques jours. “On a réparti les services communaux en trois catégories: ceux indispensables qui ne peuvent absolument pas fermer, ceux en zone 2 qui peuvent éventuellement être fermés de 2 à 4 semaines et ceux en zone 3 qui peuvent être fermés de 8 à 12 semaines. Si un service indispensable se retrouve en manque de personnel, on prendra des gens d’un service pour le mettre dans ce service plus prioritaire”, explique le cabinet du bourgmestre Boris Dilliès (MR).
Reste que si chaque commune souhaite assurer la continuité des services à la population, ce n’est pas forcément facile partout. Une des plus communes les plus impactées par une vague de certificats médicaux semble celle d’Anderlecht. “On observe déjà une explosion du phénomène et pour certains services, c’est très difficile. La moitié du service nettoyage des bureaux de l’administration est sous certificat. Je précise qu’on n’a pas le problème avec celui des écoles. Le service à la population est très perturbé”, explique Fabrice Cumps. “Il y a une continuité des services à la population, mais il y a beaucoup plus de certificats médicaux que d’habitude à la population”, indique Christos Doulkeridis.
Crèches et mesures de précaution
Pour certaines communes, une des questions concernant lundi s’avère le taux d’absentéisme des puéricultrices. Contrairement aux écoles, celles-ci sont censées fonctionner comme à leur habitude. À Anderlecht, les perturbations risquent d’être importantes:“Une partie des puéricultrices menacent de ne pas venir et de rendre un certificat médical. On a des retours du terrain en ce sens et on le voit aussi sur les réseaux sociaux”.
A Schaerbeek, Michel De Herde, également compétent pour cette matière, se dit prêt à fermer certaines crèches en cas de très faible nombre d’accueillantes: “Imaginons que je n’ai plus qu’un quart de mon personnel dans une crèche, je n’aurai pas le choix. Mais les retours sont aussi que certains parents vont retirer leurs enfants”. Certaines communes comme Woluwe-Saint-Pierre et Forest ne redoutent pas en revanche de défections massives au sein de leur personnel. D’autres à l’instar de Molenbeek demandent aux parents de garder leurs enfants dans la mesure du possible.
Dans un tout autre domaine, celui des mesures de précaution concernant l’ensemble du personnel, différentes initiatives ont vu le jour. C’est notamment le cas à Jette, Woluwe-Saint-Pierre, Auderghem et Forest. “On a pris des mesures aux cuichets pour créer de la distanciation, par exemple avec des tables”, explique le Jettois Hervé Doyen (CDH). “On a installé du plexiglas aux guichets. La distance était vraiment très réduite”, indique le Sampétrusien Benoît Cerexhe (CDH). “On a supprimé le pointage à l’administration et on permet des horaires plus souples. On a mis en place des services de covoiturage pour éviter les transports en commun”, lance l’Auderghemois Didier Gosuin (Défi). À Forest, la permanence du jeudi soir des services Population et Etat civil est suspendue.
Mariages: des restrictions très différentes
Les mariages civils à l’administration communale restent autorisés, mais en petit comité. Une notion finalement très relative selon la commune où on souhaite se marier. À Molenbeek, le nombre d’invités acceptés s’élève à quatre. “La règle est de conseiller de les reporter et sinon seulement on limite aux mariés, aux témoins et aux deux parents”, explique Catherine Moureaux. À Saint-Josse, à l’inverse, le petit comité peut en revanche monter à…50 personnes. Entre les deux, il y a par exemple Ganshoren (25) et Woluwe-Saint-Pierre (une vingtaine).
D’autres communes comme Uccle et Saint-Josse ne fixent actuellement pas de limite, mais comptent sur le sens des responsabilités des habitants. Parmi les critères qui peuvent influencer le chiffre fixé, figure l’espace disponible. “Dans la salle du conseil, les espaces sont très grand chez nous”, rappelle Charles Picqué. “La maison communale est assez petite”, lance, à l’inverse, le Ganshorenois Pierre Kompany (CDH). L’ensemble des cérémonies de type noces d’or ou d’argent s’avèrent par ailleurs reportées dans l’ensemble des communes.
Marchés, maisons de repos, stages de vacances
Tous des marchés dominicaux restent autorisés. “Mais seulement l’alimentaire”, insiste Vincent De Wolf. Pareil à Saint-Gilles. “Et cela se fera également sans débits de boisson”, précise son maïeur socialiste. Au niveau des maisons de retraite gérées par les CPAS, les règles concernant les visites fluctuent à nouveau. Elles sont “déconseillées et seulement autorisées pour des cas exceptionnels” à Evere, “déconseillées” à Berchem mais purement et simplement interdites à Jette. À Saint-Josse, un fonctionnaire est chargé de s’occuper des personnes les plus vulnérables et le système de transport social est limité aux personnes qui doivent se rendre à l’hôpital ou chez le médecin.
À Molenbeek, les stages de Pâques sont annulés. “Mais il y aura un système de garderie dans les écoles pour les parents qui le souhaitent”, indique sa bourgmestre. Au final, les communes devront sans doute prendre d’autres mesures dans les prochains jours et les prochaines semaines en fonction de la situation. A l’instar des autorités fédérale et régionale, l’échelon communal va suivre la situation au jour au jour. Avec chaque fois, en raison de l’autonomie communale, des mesures à géométrie variable.
J. Th. – Photo: Belga/Anthony Dehez