Si nous n’agissons pas, Poutine ne s’arrêtera pas. L’édito de Fabrice Grosfilley

Ce jeudi, Fabrice Grosfilley évoque dans son édito l’invasion russe en Ukraine.

Cela a commencé par des bombardements. Des raids aériens, des missiles. Cela s’est poursuivi avec des actions terrestres. Des blindés qui franchissent les frontières et arrivent aux portes de Kiev. Ce jeudi 24 février 2022, la Russie a donc envahi l’Ukraine.

À l’heure où nous réalisons ce programme, il est encore difficile d’établir un bilan de cette première journée d’offensive. L’armée russe annonce avoir détruit 74 installations ukrainiennes, dont 11 aérodromes. Côté ukrainien, on affirme avoir opposé une résistance farouche et abattu des hélicoptères russes. On parle de plusieurs dizaines de morts, peut-être plusieurs centaines. Des combats donc, alors que Vladimir Poutine a appelé les soldats ukrainiens à déposer les armes. Si on se limite au strict plan militaire, la supériorité russe ne fait aucun doute. D’un côté, 150 à 200 000 soldats russes avec des équipements modernes et l’expérience de combats récents en Syrie notamment. De l’autre, à peu près le même nombre de soldats ukrainiens, mais qui n’ont pas le même degré d’entraînement et un équipement qui n’a évidemment rien à voir.

« Nous nous efforçons d’arriver à une démilitarisation et à une dénazification de l’Ukraine » a lancé hier soir Vladimir Poutine dans son allocution télévisée. La référence au nazisme est assurément une rhétorique de propagande qui nous renvoie à la période 39-45, quand l’Union soviétique a effectivement plus que largement contribué à la défaite du 3e Reich. Cette comparaison est plus que choquante. Parce que les Ukrainiens ne sont pas les agresseurs. Et que c’est au contraire leur propre territoire qui a été grignoté sous nos yeux, avec l’annexion de la Crimée ou la sécession de républiques russophones. Il faut que les mots gardent du sens. Il n’y a pas eu de génocide dans ces deux républiques, et Vladimir Poutine va avoir du mal à nous prouver le contraire.

« Le temps des sanctions graduelles est révolu » affirmait cet après-midi à la Chambre le Premier ministre Alexander De Croo. Annonçant ce à quoi, tout le monde s’attend désormais : des mesures de rétorsion économique, l’arrêt des exportations sensibles, peut-être un embargo sur les produits russes. « Si nous n’agissons pas, Poutine ne s’arrêtera pas une fois l’Ukraine sous son joug » a complété le Premier ministre. Car même si l’Ukraine n’est, c’est vrai, pas membre de l’OTAN, ce qui vient de se passer aujourd’hui revient à dresser un nouveau mur de fer. Avec d’un côté les pays de l’OTAN qui commencent à mobiliser des troupes et se préparent à accueillir des réfugiés. De l’autre, la Russie et le Bélarus, qui tour à tour bombent le torse ou jouent les victimes niant toute responsabilité. Tous les enfants de la paix, ceux qui n’ont pas connu 39-45, ressentent ce soir une forme de gueule de bois. Quand les commentateurs évoquent un retour à la guerre froide, ils sont en dessous de la réalité. Il n’y a rien de froid dans ce qui vient de se passer. C’est brûlant, au contraire, et c’est toute l’Europe qui pourrait s’enflammer.

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Un édito de Fabrice Grosfilley