Passé colonial : le rapport de la commission parlementaire ne sera pas publié
La commission parlementaire s’est penchée durant deux ans et demi sur le passé colonial de la Belgique. Faute d’approbation par trois des quatre corapporteurs, le rapport des travaux restera un document de travail interne.
Le problème a été abordé une nouvelle fois mercredi en conférence des présidents de la Chambre par le député Marco Van Hees (PTB), l’un des quatre rapporteurs aux côtés de Benoît Piedboeuf (MR), Tomas Roggeman (N-VA) et Annick Ponthier (VB). L’impossibilité de publier le rapport tient à la fois d’un problème réglementaire pour les uns et d’un manque de volonté politique pour les autres.
Mise sur pied en juillet 2020, la commission présidée par Wouter De Vriendt (Ecolo-Groen) a clos ses travaux en décembre 2022 sans parvenir à un accord sur des conclusions et des recommandations. Sa dernière séance s’est achevée sans qu’un vote ait pu se tenir, les libéraux ayant quitté la salle pour éviter de se retrouver dans une majorité de rechange. Son mandat a expiré quelques jours plus tard.
►Revoir||La décolonisation refait débat dans Versus : la Belgique doit-elle s’excuser pour la colonisation ? (19/10/22)
►L’échange : peut-on tourner la page de la colonisation ? (09/06/22)
La question des excuses que le parlement aurait présentées aux peuples congolais, rwandais et burundais a cristallisé les divergences. Des “excuses” qui allaient plus loin que les “regrets profonds” exprimés en juin 2022 par le Roi lors de sa visite officielle en RD Congo aux côtés du Premier ministre. Dans la majorité, aux yeux des socialistes et des écologistes, ces excuses constituaient un préalable indispensable à tout travail de réconciliation, tandis qu’aux yeux des libéraux et du CD&V, il n’était pas question d’aller au-delà des regrets, pour des raisons tantôt de principe, tantôt de risque d’une demande de réparation financière.
300 auditions
Quelque trois cents auditions ont eu lieu – experts académiques, acteurs de terrain, anciens diplomates, membres des diasporas, etc. – que ce soit à la Chambre ou au cours d’une mission en République démocratique du Congo, au Rwanda et au Burundi fin août 2022.
À gauche, le PS, les écologistes ainsi que le PTB souhaitent que le projet de rapport, consignant ces auditions, soit publié malgré l’absence de vote. Il n’en sera rien: le rapport n’a pas été approuvé et la commission est dissoute, “il y a donc impossibilité“, a expliqué Benoît Piedboeuf. La seule trace officielle de ces auditions sera leur enregistrement vidéo ainsi que les deux rapports d’experts et les propositions de recommandation du président disponibles sur le site de la Chambre pour qui sait les trouver.
Lundi, interrogés sur le sujet, le président De Vriendt et le vice-président, Christophe Lacroix (PS), pointaient du doigt l’attitude des libéraux et les nationalistes flamands accusés de blocage. Le dépit était le même chez Marco Van Hees. “Je regrette que trois députés de droite bloquent la transparence sur plus de deux ans de travaux de commission. Qu’ils ne veulent pas prendre position sur le passé colonial de la Belgique, c’est leur responsabilité mais qu’ils bloquent un rapport des travaux, c’est lamentable“, a-t-il dit.
Belga – Photo : Belga/Dirk Waem