Rapatriement : toujours aucune solution pour les binationaux

Depuis le début du confinement, la question du rapatriement des Belges se trouvant à l’étranger fut complexe. Elle l’est encore plus pour les personnes ayant deux nationalités et plus particulièrement pour les personnes marocaines et burundaises.

“Mon fils partait pour deux semaines en vacances au Maroc. Il est de 4e génération mais pour le Maroc, il est Marocain. Avec ses amis aussi d’origine marocaine, ils sont restés coincés dans le nord du pays dans une location de vacances. J’ai dû leur envoyer 500 euros pour qu’ils puissent se loger”, raconte Samira Benallal, Bruxelloise vivant à Saint-Gilles.

Si elle ne considère pas sa situation comme étant dramatique, elle en a entendu des histoires déchirantes d’autres belgo-marocains. Des enfants en bas âge bloqués au Maroc avec leurs grands-parents, des personnes parties pour un enterrement et restées bloquées… Le 23 mars, nous mettions en avant ces situations. Nous avons recontacté les personnes et toutes sont toujours bloquées au Maroc.

Rentrer du Maroc, un parcours impossible pour les binationaux

Une plateforme de soutien

Depuis, une plateforme « Belgo-marocains bloqués au Maroc/coronavirus » s’est constituée pour tenter de venir en aide aux familles. “Nous avons reçu plus de 340 mails de familles avec parfois une ou 7 personnes bloquées au Maroc, explique Mohsin Mouedden, coordinateur de la plateforme. Nous pensons que plusieurs milliers de personnes souhaitent rentrer. Elles se trouvent surtout à Tanger et dans le nord mais la Belgique ne fait rien. On nous dit que c’est le Maroc qui ne désire par laisser sortir ses ressortissants. Pourtant, des canado-marocains ont pu prendre un vol le 25 mars dernier. Le ministre des Affaires étrangères,Philippe Goffin a dit mardi à la Chambre que cela n’était pas vrai mais nous avons les preuves.”

La plateforme a décidé de contacter de manière officielle les autorités marocaines. “Nous avons contacté hier le Premier ministre marocain, Saad Dine El Otmani, ainsi que la Fondation Hassan II, nous espérons une réponse rapide. Une lettre ouverte a également été envoyé à sa Majesté le Roi Mohamed VI via différents canaux. Notre courriel d’il y a plus d’une semaine à l’adresse de l’ambassadeur du Maroc à Bruxelles, Mr Mohammed Ameur est resté sans suite. A notre plus grand regret.”

Le ramadan débute le 24 avril et certaines familles souhaiteraient pouvoir rentrer même si le principal message reste l’obligation de respecter les mesures de confinement au Maroc ou en Belgique. “Les relations diplomatiques entre la Belgique et le Maroc sont bonnes depuis des années alors pourquoi la France ou le Canada arrivent à rapatrier leurs ressortissants et pas nous?”

Des contacts bilatéraux permanents

Au niveau des Affaires étrangères, on est conscient de la complexité de la situation pour les personnes d’origine marocaine mais également burundaise. Dans les deux cas, ces pays refusent de laisser sortir leurs ressortissants même si leur résidence principale se trouve dans un autre pays ou qu’ils ont une autre nationalité. “Je suis en contact quotidien avec l’ambassadeur du Maroc en Belgique et je souhaite que le Maroc permette aux binationaux de rentrer, explique le ministre des Affaires étrangères, Philippe Goffin (MR). Cette situation n’est pas le fait de l’Etat belge. Le Maroc fait usage de son droit et est souverain. Nous avons affrété 7 vols de rapatriement et Ryanair avait encore 18 vols jusqu’au 19 mars pour le nord du Maroc. Nous n’avons pas abandonné nos ressortissants mais malheureusement, certains entretient ce sentiment qui n’est pas juste.”

Malgré les contacts, le ministre des Affaires étrangères se heurte toujours à  un refus de la part du Maroc et du Burundi. Pour le Maroc, une lettre cosignée avec les Pays-Bas a été envoyée afin de demander le rapatriement des ressortissants belges et néerlandais. Environ 500 personnes inscrites sur le site internet travellersonline.diplomatie.be  sont toujours en attente.

“Ce que nous demandons, c’est que la Belgique affrète un avion pour Tanger et puisse faire revenir ses ressortissants en respectant la distanciation sociale, ajoute Mohsin  Mouedden. A leur retour, il faut les mettre en quarantaine et les tester. Cela peut se faire.”

Vanessa Lhuillier – Photo: BX1

■ Reportage de David Courier, Nicolas Scheenaerts et Antoine Martens.