Le conseil d’Etat examine le dossier de la prison de Haren

Les représentants des opposants et du consortium Cafasso ont plaidé ce mardi matin. Le permis d’urbanisme pourrait être annulé si le conseil d’Etat suit l’avis de l’auditrice du conseil d’Etat, rendu en janvier dernier.

Les opposants à la construction de la prison de 1.200 détenus sur le site de Haren retiennent à présent leur souffle. Leur représentants comme ceux de Cafasso, le consortium qui doit construire le bâtiment pour le compte de l’Etat, ont dévoilé leurs arguments devant le conseil d’Etat. Même si les travaux ont commencé sur le site, le permis d’urbanisme pourrait être annulé.

Le projet remonte en réalité à 2008. Le masterplan prison demandé par le fédéral met en avant le problème de détention des prisonniers dans les établissements de Saint-Gilles et de Forest ainsi que la surpopulation. Il est alors décidé de rénover les deux bâtiments et de construire des petites unités de 400 personnes maximum. Seulement, en cours de route, le gouvernement change son fusil d’épaule et décide de construire une grande prison de 1.200 personnes sur les 17 hectares en friche de Haren. Quant à Saint-Gilles et Forest, la Régie des bâtiments les fermerait et les vendrait.

Des blocages urbanistiques

Dès l’annonce du projet, les opposants s’activent. Ils viennent de tous les horizons. Les riverains craignent pour leur tranquillité et la mobilité, les défenseurs de l’environnement voient la destruction d’une biodiversité et la suppression de terres arables. Les magistrats ne comprennent pas que la prison se situe de l’autre côté de la ville par rapport au palais de justice de la place Poelaert et refuse de rendre leur verdict au sein même de l’établissement pénitentiaire. Enfin, les opposants à l’incarcération agite le drapeau des droits humains.

Pendant longtemps, le dossier fut bloqué pour des raisons urbanistiques mais après un certain temps, les élus de la Ville de Bruxelles ont dû lâcher et ont rendu un avis favorable. Le permis d’environnement et d’urbanisme en poche, Cafasso, le consortium de construction puis de gestion de la prison, a pu démarrer le chantier.

Une prison très onéreuse

En parallèle, au fédéral, les députés de l’opposition demandent à voir le contrat qui lie Cafasso à l’Etat. Pendant des mois, on refuse de leur répondre et de donner les montants dus à Cafasso. Les rumeurs parlent d’un montant d’un milliard d’euros que l’Etat devrait payer sur 25 ans. Trop cher pour l’opposition. Effectivement, un partenariat public privé comme celui contracté, coûte en moyenne 14% de plus à l’Etat que s’il réalisait le chantier lui-même. Cependant, le fait de payer un loyer à un privé qui gère le dossier lui permet de ne pas alourdir sa dette.

Par contre, avec le retard que prend le projet, l’Etat risque à un moment donné de devoir payer une compensation à Cafasso.

Un verdict très attendu

Evidemment, les opposants ont introduit un recours contre le permis d’urbanisme délivré. En janvier, l’auditrice du conseil d’Etat préconisait son annulation par des raisons de mobilité et de protection de l’environnement. D’ici quelques jours ou semaines, le conseil d’Etat devrait rendre son avis. En général, il suit celui de l’auditrice mais une exception n’est pas à exclure. En résumé, le conseil d’Etat peut soit annuler le permis tout en sachant que le chantier a déjà démarré et que la friche n’est donc plus le terrain agricole qu’elle était; soit il donne raison à Cafasso qui peut reprendre les travaux; soit, petite subtilité, il annule le permis mais donne un délai de 2 ans pour que Cafasso en obtienne un autre tout en pouvant continuer son chantier. Cela serait un compromis acceptable pour le promoteur mais pas pour les opposants du Comité de Haren.

L’Etat avait prévu une ouverture pour 2022. Reste à savoir ce qui peut se passer en cas d’annulation du projet.

Vanessa Lhuillier – Photo: Cafasso