Procès des attentats de Bruxelles : tensions autour du transfert des détenus, le procès au point mort

Après près d’une semaine de pause, la première journée d’audience de 2023 du procès des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016 a déjà été suspendue après une matinée de débats autour des conditions de transfert de certains accusés.

Après un peu plus d’une semaine de pause pour les fêtes, les juges d’instruction, enquêteurs, militaires et services de secours étaient attendus ce mardi pour témoigner devant la cour d’assises du rôle qu’ils ont joué après les explosions survenues à l’aéroport de Zaventem et à la station de métro Maelbeek, faisant 32 morts et de nombreux blessés.

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L’exposé de l’enquête devait se poursuivre les jours suivants et pour se prolonger jusqu’au 30 janvier, selon le calendrier provisoire proposé par la présidente de la cour d’assises Laurence Massart.. Avant cinq jours consacrés aux éventuelles questions des parties concernant ces témoignages.

Devoir d’enquête complémentaire

Cette première journée d’audience a toutefois été suspendue ce mardi après-midi après une nouvelle matinée de discussions autour des conditions de transfert des accusés détenus qui avait fait l’objet d’une procédure en référé contre le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne.

Trois des sept accusés ont décidé de ne pas comparaître pour dénoncer de nouvelles fouilles au corps avec génuflexion, ce qui était normalement interdit de manière systématique selon une ordonnance du juge des référés. La présidente de la cour d’assises a finalement demandé au chef d’enquête dans le dossier des attentats du 22 mars 2016, de prendre divers renseignements au sujet du transfert des accusés détenus. Ce devoir d’enquête complémentaire, demandé en vertu du pouvoir discrétionnaire de la présidente, sera rendu pour 15h00 mardi.

Portraits des accusés, portraits des victimes, rappel des faits… : notre dossier complet sur les attentats du 22 mars 2016

■ Reportage de Camille Tang Quynh, Charles Carpreau et Laurence Paciarelli.

► Retour sur les principaux faits de la journée ⤵️


10h45 – Trois accusés ne comparaissent pas, dénonçant à nouveau leurs conditions de transfert

À l’entame de l’audience de ce mardi, trois accusés étaient à nouveau absents dans le box : Salah Abdeslam, Ali El Haddad Asufi et Bilal El Makhoukhi. Les avocats de ces accusés sont intervenus pour expliquer que leurs clients avaient été fouillés au corps avec génuflexion, sans motivation explicite, ce mardi matin. Ils affirment ainsi que la décision du juge des référés, ordonnée le 29 décembre dernier, d’interdire les systématiques fouilles à nu avec génuflexion n’est pas respectée, et ce malgré la menace d’une astreinte de 1.000 euros par contravention et par demandeur.


11h30 – Plusieurs avocats annoncent qu’ils ne pourront peut-être plus représenter leurs clients

L’avocate de Mohamed Abrini, Me Laura Pinilla, a annoncé qu’il est probable qu’elle n’ait plus de mandat pour représenter son client au procès. Ce dernier est présent à l’audience ce mardi matin mais ne souhaite pas y rester, a déclaré son avocate. Également, Me Jonathan De Taye, conseil d’Ali El Haddad Asufi, a affirmé qu’il n’acceptera pas de représenter son client, qui n’est pas présent à l’audience mardi matin, si la décision du juge des référés n’est pas respectée.

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11h46 – Sofien Ayari s’exprime : “Ce n’est pas un caprice”

Il y a beaucoup de choses que je n’aime pas en prison, mais je suis en prison, c’est comme ça“, a commencé Sofien Ayari. “Mais ce genre de traitement pendant neuf mois, c’est pas possible. Moi, je suis venu car je pensais que j’avais mal compris la nouvelle procédure, mais maintenant, j’entends qu’on parle de justification pour les fouilles. Moi, tous les policiers m’ont dit, quand ils m’ont fouillé, ‘c’est la nouvelle procédure’ et ils m’ont dit ‘c’est tous les jours la fouille à nu.'”

Ce n’est pas un caprice, on ne peut pas subir ça pendant 9 mois. Si cela continue, il sera impossible de se présenter au procès et de répondre aux questions“, a-t-il martelé. “Je comprends les parties civiles qui ont perdu des proches et qui veulent que ça se poursuive, et nous, on passe pour des capricieux.

Quand on parle des personnes qui ne veulent pas que le procès se tienne, il ne faut pas nous montrer du doigt“, a encore affirmé l’accusé. “Qu’est-ce que j’aurai à y gagner moi ? J’ai pris 50 ans ! Je veux pouvoir répondre aux questions des parties civiles, car je considère que c’est du respect.

Dessin : Belga/Jonathan De Cesare

12h06 – Les parties civiles demandent que le procès se poursuive malgré les plaintes des accusés

Plusieurs avocats des parties civiles ont exprimé leur désir que l’audience du procès des attentats à Bruxelles se poursuive malgré la vive protestation des avocats de la défense contre le non-respect de l’ordonnance en référé interdisant les fouilles à nu systématiques sur les accusés.

Les droits des uns et des autres doivent être respectés“, a demandé Alexandre Wilmotte. “Il faut bien évidemment respecter les droits des accusés, mais chacun comprendra que les victimes souhaitent avancer. Si certains accusés ne sont pas représentés, la cour peut prendre des mesures afin que le procès se déroule malgré tout“, a également rappelé l’avocat, qui défend trois personnes. “La demande des victimes est claire, c’est qu’on avance“, a ajouté Aline Fery, l’une des avocates de Life4Brussels. “Il y a des victimes ou des proches de victimes qui sont venus ici spécialement. Il est plus de 11 heures du matin et nous sommes toujours en train de débattre des conditions de transfert“, a-t-elle regretté.

De son côté, le parquet a indiqué estimer “qu’il est dans l’intérêt de ce procès d’aller de l’avant et d’éventuellement demander des explications à l’État belge pour voir si la justification existe et respecte l’article 3” de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).


13h20 – La présidente demande au chef d’enquête de se renseigner sur le transfert

La présidente de la cour d’assises de Bruxelles a ordonné, mardi en fin de matinée, au chef d’enquête, dans le dossier des attentats du 22 mars 2016, de prendre divers renseignements au sujet du transfert des accusés détenus. Ce devoir d’enquête complémentaire, demandé en vertu du pouvoir discrétionnaire de la présidente, sera rendu pour 15h00 mardi.

La magistrate a demandé au chef d’enquête “de contacter les responsables de la police fédérale qui sont en charge du transfert des détenus et de leur demander, sur la base de la décision rendue en référé, quel est le protocole de transfert ainsi que les modalités individuelles de transfert des accusés détenus qui ont été mises en place aujourd’hui”.


13h35 – Deux auditions et deux parties civiles supplémentaires

La présidente de la cour d’assises de Bruxelles a ordonné au chef d’enquête d’auditionner les proches de deux victimes des attentats qui ont mis fin à leurs jours en 2021 et en 2022.

Le fils d’un homme qui a été victime des attentats et qui a mis fin à ses jours en 2021 a demandé à se constituer partie civile au procès, estimant que le suicide de son papa est en lien direct avec ce qu’il a vécu lors de ces attaques. Les parents d’une jeune femme qui a été victime des explosions à l’aéroport de Zaventem, et qui s’est donnée la mort en 2022, ont formulé la même demande. Avant de se prononcer, la présidente a demandé au chef d’enquête d’entendre ces personnes. Il s’agit d’un nouveau devoir d’enquête complémentaire, ordonné par la présidente en vertu de son pouvoir discrétionnaire.

Par ailleurs, la cour a acté, mardi, deux nouvelles constitutions de partie civile, portant leur total à 1 077.


13h50 – Audience suspendue

En attendant que le devoir d’enquête complémentaire autour des conditions de transfert des accusés détenus soit rendu par le chef d’enquête, l’audience est suspendue.


14h30 – Retournement de situation : le responsable de la DAP refuse de témoigner

Avant la suspension de l’audience, la présidente de la cour d’assises Laurence Massart a finalement demandé au chef d’enquête de la police fédérale de lui revenir dans l’après-midi pour s’expliquer sur le protocole de la police concernant le transfert des accusés détenus.

Mais au retour dans la salle d’audience, le responsable de la Direction de la Protection (DAP) de la Police Fédérale a fait appel à un avocat et a fait part de son choix de ne pas comparaître à visage découvert devant la cour d’assises. Face à ce refus de s’exprimer, la présidente n’a pas eu d’autre choix que de suspendre à nouveau l’audience pour demander à chacun de revenir ce mercredi à 9h00 pour une nouvelle journée d’audience.

Avec Belga – Photo de tête : Belga/Pool Benoît Doppagne