Rue de la Loi : les universités poussent un “modèle bruxellois”

L’heure est au mémorandum. Ce mercredi c’est au tour des universités, ULB et VUB de sortir le leur. Un mémorandum commun aux deux universités bruxelloises, qui s’ajoute à un texte national déjà rédigé avec les autres établissements universitaires du pays.

Les deux recteurs, Caroline Pauwels (VUB) et Yvon Englert (ULB), n’ignorent pas la force du symbole. Les deux universités libres plaidant ensemble, dans un même document de 26 pages présenté dans les deux langues et dans un lieu symbolique (l’Usquare, un laboratoire flambant neuf installé dans les anciennes casernes de gendarmerie à Ixelles où chercheurs francophones et néerlandophones travaillent côte à côte), cela doit forcément avoir un caisse de résonnance à quelques semaines des élections régionales, surtout quand les deux recteurs rappellent d’emblée que leurs deux établissements regroupent 45 000 étudiants (la moitié de la population étudiante de Bruxelles, hautes écoles comprises) et emploient 15 000 personnes.

« Ce positionnement représente un atout considérable pour aider à relever les grands défis sociétaux, économiques et environnementaux de Bruxelles » expliquent les deux recteurs qui demandent donc au mode de politique de soutenir leurs projets communs.

Dans ce mémorandum, on trouve donc un plaidoyer pour l’ouverture d’un centre d’expertise sur l’intelligence artificielle et d’un pôle européen de recherche sur le cancer qui s’appuierait sur les hôpitaux universitaires, la création d’un « district universitaire » pour penser les problèmes de mobilité et d’urbanisme en dehors des grands campus et le souhait d’être exemplaires en matière de développement durable.

Mais les deux recteurs sont aussi revenus sur leur souhait de porter ensemble un projet-pilote d’école secondaire multilingue. Une école qui enseignerait français-néerlandais-anglais mais ne serait pas réservée à une élite comme le sont les écoles européennes. L’idée semble évidente dans une agglomération cosmopolite et multilingue comme la Région bruxellois, mais elle se heurte aujourd’hui à la réalité de l’organisation de l’enseignement en deux communautés.  Peut-on dépasser ce blocage institutionnel ? L’accueil favorable du monde politique bruxellois (à l’exception de la NVA) permet d’être optimiste.

Le moment est favorable : le désintérêt manifeste de la NVA pour Bruxelles, l’émergence d’une nouvelle génération d’hommes et de femmes politiques qui ne font plus du clivage communautaire leur argument de campagne et la prise de conscience que la Région bruxelloise n’est pas la simple addition des deux communautés sont autant d’arguments pour essayer d’avancer rapidement.

Petit à petit émerge ainsi l’idée qu’en matière d’enseignement, comme pour d’autres dossiers, nous pourrions bâtir un « modèle bruxellois » qui ne nierait pas l’existence des deux communautés, mais pourrait organiser leur collaboration à l’intérieur de l’espace régional bruxellois. Que les recteurs ou la société civile (on pense à Aula Magna) réussissent à imposer cette nouvelle manière de penser la politique bruxelloise, en partant des réalités bruxelloises et non plus des conceptions élaborées à Anvers ou Namur,  serait une avancée considérable.