Fermeture des cafés: les bourgmestres flamands de la périphérie bruxelloise ne s’alignent pas sur Bruxelles
Une réunion est prévue, la semaine prochaine, pour évaluer la situation et se mettre d’accord sur une approche commune face à la hausse des chiffres de contamination du Covid-19.
Le ministre-président bruxellois Rudi Vervoort (PS) a appelé jeudi les bourgmestres des communes de la périphérie à fermer totalement les bars et cafés situés sur leur territoire. Selon le socialiste, il s’agit de suivre l’exemple des communes de la capitale. “J’enjoins les bourgmestres de la communauté métropolitaine de faire de même, car je pense que l’on n’y échappera pas ailleurs sur le territoire”, a-t-il expliqué, lors de son audition par la commission spéciale Covid du Parlement bruxellois, en faisant référence aux indications d’une aggravation des contaminations.
Cet appel reste actuellement lettre morte. À l’exception de Hans Bonte (s.pa), à Vilvorde, l’ensemble des bourgmestres contactés par BX1 s’opposent, dans l’état actuel des choses, à une mesure aussi drastique. “Il n’y a pas de raison de renforcer les mesures actuelles”, tranche le bourgmestre de Grimbergen Chris Selleslagh (Open Vld). “On aimerait bien laisser ouvert l’horeca. C’est notre but pour l’instant”, résume le maïeur de Dilbeek Willy Segers (N-VA). “On n’est pas demandeur et il n’y a également pas de raison de le faire pour l’instant”, conclut Marc Grootjans (CD&V) à Machelen.
Bientôt une affluence de clients bruxellois?
Peu de bourgmestres flamands craignent une arrivée soudaine et massive de Bruxellois dans les bars de leur commune. Certains d’entre eux ont toutefois pris des dispositions pour surveiller de près la situation. “Sur la grosse centaine de bars que compte la commune, seule une dizaine ont un public mélangé, c’est-à-dire avec des Bruxellois. On leur a demandé de nous prévenir s’il y en avait beaucoup plus que d’habitude. Si c’est le cas, il faudra une solution. Peut-être que des Bruxellois se diront ‘Je veux boire des verres et je vais donc à Dilbeek’. S’il y en a 20, ce n’est pas un problème. Si c’est 300,400 ou 500 personnes, on aura un problème”, explique Willy Segers.
Peu inquiet à l’heure actuelle, le nationaliste flamand a toutefois demandé à ses services de police d’ouvrir l’oeil. Du côté de Wemmel, les gardiens de la paix ont reçu des consignes similaires. “Je leur ai demandé d’aller voir dans les cafés pour voir comment ça se passe. On n’a toutefois actuellement aucun effet négatif engendré par la fermeture de l’horeca bruxellois”, indique Walter Vansteenkiste (LB), bourgmestre de Wemmel.
Parmi les communes sondées, seule celle de Crainhem s’avère moins sereine. “On est évidemment très préoccupé par la situation, puisqu’on a une grande frontière commune avec la Région bruxelloise. Cela peut être une situation où les gens se disent ‘On va faire quelques kilomètres et aller prendre un verre à Crainhem’. En temps normal, je n’aurais aucun problème avec ça, mais, actuellement, si tout le monde débarque, ce serait autre chose”, indique Bertrand Waucquez (Kraainem-Unie).
“Les contaminations ont surtout lieu ailleurs”
Wemmel, Crainhem , Dilbeek, Grimbergen ou encore Machelen: aucune de ces communes ne trouve donc nécessaire de suivre l’exemple bruxellois. La principale raison mise en avant, c’est que les bars ne constitueraient pas un lieu important de contamination. “On a aussi des chiffres élevés concernant le Coronavirus, mais on a pu remarquer, avec notre propre tracing, que les contaminations ont surtout lieu dans la sphère intrafamiliale, non dans l’horeca. Il faut aussi ajouter qu’il y a déjà les nouvelles mesures fédérales qui sont entrées en application”, explique Marc Grootjans .
Même son de cloche du côté de Dilbeek: “Avec ce qu’on sait grâce au contact tracing et nos propres enquêtes, il n’y a aucun signe que les bars ou l’horeca sont actuellement la cause des chiffres de contamination dans la commune”. Du côté de Crainhem, on rappelle que d’autres endroits s’avèrent des possibles lieux de contamination importants. “Pour moi, on pourrait peut-être plus s’intéresser aux salles de sport et aux vestiaires. Il y a aussi là un risque probablement. Il ne faut pas regarder que du côté de l’horeca”, insiste Bertrand Waucquez.
L’exception vilvordoise
Au sein des communes flamandes de la périphérie, se trouve quand même une voix discordante. Il s’agit de celle du bourgmestre de Vilvorde Hans Bonte (s.pa): “Je suis demandeur d’une fermeture des bars et des cafés en périphérie comme l’a fait Bruxelles. À condition toutefois que les autorités flamandes fassent comme les autorités bruxelloises et donnent des compensations. Je l’ai déjà demandé jeudi et j’attends une réponse du gouvernement flamand”.
Pour le socialiste flamand, une fermeture serait une décision logique. “La situation sanitaire est aussi inquiétante dans le Rand qu’à Bruxelles. Je trouverais donc logique d’avoir comme conséquence de fermer l’horeca dans le Rand. Et je trouverais aussi conséquent que le gouvernement flamand fasse la même chose que Bruxelles, à savoir aider les personnes qui travaillent dans l’horeca”.
Le socialiste flamand fait référence à la récente prime régionale de 3.000 euros débloquée pour les bars et cafés bruxellois obligés de fermer. Selon les estimations, entre 2.500 et 3.500 établissements de la capitale pourraient bénéficier de cette aide.
Une réunion de coordination prévue semaine prochaine
Les communes de la périphérie souhaitent en tout cas une réponse coordonnée et commune dans la lutte contre le Coronavirus. “L’idée, c’est de ne pas avoir une commune qui dise ‘Oui’, une seconde ‘Non’, une troisième ‘Oui mais jusque telle heure’ et encore une autre qui dise ‘Ok, mais pas d’alcool’. Je pense que les gens ont le droit à une information claire”, explique Bertrand Waucquez. “Il est très important que les communes voisines, je pense notamment à Merchtem, Grimbergen ou Meise, appliquent les mêmes décisions que nous. Sinon, les gens iront juste 2 km plus loin”, souligne-t-on à Wemmel.
Cette décision concertée et coordonnée des communes de la périphérie est attendue pour le début de la semaine prochaine. Une réunion est en effet prévue en présence du gouverneur de la Province du Brabant flamand Jan Spooren (N-VA). La Région bruxelloise y verra donc plus claire d’ici quelques jours sur les intentions des communes voisines. Les mandataires locaux ont déjà prévenu: sans hausse importante des chiffres de contamination d’ici là, ils ne seront pas favorables à une fermeture totale comme à Bruxelles.
Julien Thomas – Photo: Thierry Roge/ Belga