Un collectif dénonce le manque de réaction politique aux violences à Molenbeek : “Il n’existe pas de citoyen de seconde zone”
Une marche est organisée ce dimanche dans la commune pour interpeller les autorités politiques et réinvestir l’espace public.
Près d’un mois plus tard, les habitants de Molenbeek n’ont rien oublié des violences qui ont eu lieu dans leurs quartiers en marge du match Anderlecht-Bruges. Le 4 mai dernier, des supporters brugeois ont décidé de quitter le métro qui les emmenait au stade du Heysel pour se livrer à une véritable ratonnade dans les rues molenbeekoises et jettoises. Plusieurs commerces ont été pris pour cible. Quelque 80 personnes avaient été blessées, dont quatre policiers.
Face à une réaction politique qu’ils jugent bien trop faible, des citoyens et associations ont décidé de créer le collectif “Je suis la Belgique” pour faire entendre leur indignation collective. Ils déplorent notamment l’absence de condamnation ferme de la part du Premier ministre ainsi que le fait que le ministre de l’Intérieur ne se soit jamais rendu sur place, à la rencontre des victimes. “Si cela s’était produit à Uccle, à Waterloo ou à Lasne, la réaction politique aurait été différente“, estime Younes El Montasser, l’un des membres fondateurs de ce collectif. “C’est important pour nous de rappeler que nous sommes la Belgique collectivement et qu’à aucun moment un citoyen ne doit avoir l’impression d’être un citoyen de seconde zone.“
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Une marche pour se réapproprier l’espace public
Ce directeur adjoint d’une école molenbeekoise et coordinateur au sein de l’ASBL Actions in the Mediterranean (AIM) déplore l’impact d’une telle attitude politique auprès des jeunes du quartier. “On a affaire à une jeunesse qui a le sentiment aujourd’hui que la réponse était, au mieux, limitée voire insuffisante, au pire, totalement absente et qu’il n’y a pas de volonté de protéger des citoyens des communes qui évoluent dans un contexte socio-culturel défavorisé. C’est très dangereux. C’est pour cela que ce collectif s’est créé, précisément pour rappeler qu’il n’existe pas de citoyen de seconde zone et que, quand le droit à la sécurité n’est pas garanti et que les pouvoirs publics ne jouent pas leur rôle de manière suffisante, il y a un autre contre-pouvoir : celui de la société civile.”
Une marche à travers la commune est organisée ce dimanche à partir de 14h. Elle reliera le Boulevard Simón Bolívar à l’obélisque des droits de l’homme à Tours & Taxis où des prises de parole auront lieu. “Le but est de fédérer un maximum pour incarner la diversité de notre pays et de rappeler à tous que ce qu’il s’est produit le 4 mai n’est pas un fait divers. L’objectif est aussi de rappeler à cette jeunesse que si la réponse est insuffisante, nous sommes en droit d’exiger des réponses de nos pouvoirs publics. Cette marche doit permettre de se réapproprier l’espace public pour dire que la haine, le racisme et la violence n’ont pas leur place dans nos rues.”
Le collectif appelle par ailleurs à la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur les dysfonctionnements qui ont permis les évènements du 4 mai.
Le cabinet Quintin dément tout intérêt à géométrie variable
Contacté, le cabinet de Bernard Quintin, justifie l’absence du ministre sur place par une question d’agenda, mais assure que ce dernier a été pleinement mobilisé dans les heures et les jours qui ont suivi les évènements. Quant aux accusations d’intérêt à géométrie variable du ministre selon les communes, le cabinet dément fermement. “Le ministre Quintin s’est toujours rendu sur le terrain, peu importe le lieu“, assure-t-il en prenant pour exemple les récentes fusillades à Anderlecht
En ce qui concerne les mesures prises suite aux évènements du 4 mai, un rapport a été transmis aux zones de police locales, en charge de la sécurité. En parallèle, l’enquête judiciaire suit son cours. Trois hooligans brugeois suspectés d’être impliqués dans les violences ont été appréhendés et présentés ce mardi à un juge d’instruction. Le procureur du Roi de Bruxelles nous confiait néanmoins vendredi dernier que l’enquête se révélait compliquée, notamment parce que les caméras installées dans les rues de Molenbeek ne fonctionnaient pas.
V.d.T. – Photos : BX1/Belga