Procès des attentats de Bruxelles : les avocats des accusés demandent que les fouilles soient motivées au cas par cas

Les avocats des accusés détenus au procès des attentats à Bruxelles ont demandé, vendredi matin, devant le tribunal civil en référé, que les fouilles à nu de leurs clients soient motivées et notifiées au préalable, au cas par cas. De même pour les autres mesures de sécurité, à savoir les génuflexions et les privations sensorielles.

Me Stanislas Eskenazi, avocat de Mohamed Abrini, et Me Jonathan De Taye, avocat d’Ali El Haddad Asufi, ont évoqué la situation générale de leurs clients, vendredi matin, devant le tribunal civil de Bruxelles en référé.

Lunettes occultantes, heavy metal…

Selon eux, les mesures de sécurité prises par la police sont disproportionnées et celles-ci ont un impact sur l’exercice des droits de la défense dans le procès des attentats à Bruxelles. Six des sept accusés détenus de ce procès ont introduit une action en référé contre l’État belge au sujet de leurs conditions de transfert de la prison au palais de justice, qu’ils qualifient d’inhumaines et dégradantes, à savoir des fouilles intimes, des génuflexions et une obstruction sonore et visuelle pour les désorienter.

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“Monsieur El Haddad Asufi a toujours comparu et a toujours répondu aux questions lors du procès des attentats à Paris. Depuis qu’il a été transféré en Belgique après le procès en France, c’est problème sur problème“, a exposé à la juge Me De Taye. “Il a la volonté de participer à son procès, mais quand on lit la presse, on a parfois l’impression qu’on fait des accusés des divas. Monsieur El Haddad Asufi est bien conscient que la situation dans laquelle il est actuellement impose des restrictions, mais trop is te veel et too much is too much“.

Le pénaliste a cité comme exemple le fait qu’on bande les yeux de son client lorsqu’il est déplacé de la cellule où il est fouillé vers le fourgon qui l’emmène au palais de justice, un trajet d’une vingtaine de mètres. “C’est pour vous dire à quel point il y a une disproportion des mesures“, a-t-il commenté. “La mise à nu est disproportionnée en soi, mais mon client l’accepte. Par contre, les génuflexions, à quoi servent-elles? Lors du procès à Paris, il n’était pas soumis cela“, a encore déclaré Me De Taye.

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L’avocat de Mohamed Abrini, Stanislas Eskenazi, a cité, parmi les mesures qui sont dénoncées, les mises à nu avec inspection de tous les orifices, l’imposition de faire plusieurs génuflexions, de porter des lunettes “occultantes” et la diffusion de musique “heavy metal” dans les fourgons. Il a également mentionné le fait que les accusés sont entourés, dans le box, de policiers encagoulés. “On ne sait donc pas à qui on a affaire”, a-t-il dit.

Pour l’Etat belge, ces mesures sont nécessaires

L’avocat de l’État belge, Me Bernard Renson, a quant à lui plaidé que les mesures de sécurité ne sont pas disproportionnées. Il a estimé que ces mesures sont “démunies de tout caractère dénigrant” et sont “uniquement dictées par l’intérêt sécuritaire” du procès.

Quoi qu’on en dise, ce procès est hors normes à différents points de vue. Il faut donc des conditions de sécurité maximales“, a déclaré Me Renson. “Depuis la guerre 40-45, la Belgique n’avait plus connu de faits aussi graves que ces attentats du 22 mars 2016. Un pays tout entier était en état de choc, victime lui aussi du terrorisme, du fanatisme. Les accusés ont-ils à ce moment-là invoqué l’État droit comme ils l’invoquent aujourd’hui?“, a avancé Me Renson.

L’avocat a poursuivi sa plaidoirie en examinant chaque mesure de sécurité dénoncée par les demandeurs. Il a conclu que, selon lui, ces dispositifs, “appliqués dans de nombreux autres pays européens” sont “nécessaires pour limiter les risques“, notamment d’évasion. “Il ne peut être raisonnablement soutenu que les mesures sont disproportionnées“, a-t-il dit.

avec Belga

• Reportage de Thomas Dufrane, Frédéric De Henau et Laurence Pacciarelli

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