Comité de gestion à la STIB autour du port du voile : vers quoi se dirige-t-on ?

Le comité de gestion de la STIB se réunira prochainement. Quelles sont les différentes forces en présence ?

Sur les coups de 12h30, ce mercredi, un nouveau comité de gestion de la STIB devait se réunir, autour de la possibilité de contester, ou non, la condamnation en justice dont elle fait l’objet. Pour rappel, le Tribunal du Travail francophone a condamné, le 3 mai, la société bruxelloise des transports publics pour discrimination, dans une affaire qui remonte à 2015.

Décryptage | La STIB condamnée pour discrimination par le Tribunal du travail (05/05/2021)

Néanmoins, la réunion a été reportée, rapporte L’Echo. Sur la table de la prochaine réunion, néanmoins : la décision d’interjeter, ou non, appel de cette décision. Un précédent comité s’était déjà tenu ce mardi, mais ne s’était pas soldé par un accord entre ses différents membres, tant les avis en présence divergent. Il existe ainsi, globalement, une opposition entre les partisans d’un appel (Open VLD, DéFI et possiblement Groen) et ceux qui le rejettent (Ecolo et PS).

Quels sont les forces en présence ?

Pour mieux comprendre les dynamiques au sein du comité de gestion de la STIB, il est important de se pencher sur sa composition.

Ainsi, selon un document disponible sur le site Internet de la STIB, issu de son rapport d’activités 2019, on voit que le comité est composé de deux membres de Groen (Merlijn Erbuer, président du conseil d’administration, et Geert Cochez, chargé de mission du Gouvernement bruxellois et par ailleurs chef de cabinet de la ministre de la mobilité Elke Van den Brandt), deux socialistes (Lofti Mostefa, vice-président du conseil d’administration, et Abbès Guenned, commissaire du Gouvernement bruxellois et par ailleurs directeur de cabinet adjoint du ministre-président Rudi Vervoort), un membre de DéFI (Matthieu Pillois), un représentant de l’Open VLD (Vincent Riga, commissaire du Gouvernement bruxellois), ainsi que trois représentants syndicaux (Omar Boujida pour la CGSP, Christian Ecker pour la CGSLB et Robert Timmermans pour la CSC).

S’ajoutent à eux, également, le directeur général de la STIB, Brieuc de Meeûs (sans étiquette) et son adjoint, Kris Lauwers (issu du CD&V).

► Lien externe | Composition du comité de gestion de la STIB

Notre rédaction a contacté plusieurs d’entre-eux, ce mercredi matin, peu avant la réunion du comité de gestion, mais aucun n’a souhaité commenter, ou communiquer sa position.

Ceux qui sont contre l’appel…

Au cours de la réunion du comité de gestion qui s’est tenue ce mardi, le directeur général de la STIB, Brieuc de Meeûs, a tenu une position intermédiaire, et a proposé que le règlement de travail soit revu sur certains points, et que le voile soit autorisé dans les fonctions de back-office (dans les bureaux, sans contact avec les clients), et que la STIB interjette donc appel de la décision du tribunal, rapportent nos confrères de La Libre.

Cette proposition a été rejetée par le PS et Ecolo, qui estiment globalement qu’il ne faut pas interjeter appel. Le chef de groupe Ecolo au Parlement bruxellois, John Pitseys, n’a pas souhaité donner une position arrêtée sur le cas particulier de la STIB, du moins avant la réunion, mais a rappelé que la position écologiste reste que “l‘interdiction systématisée des signes convictionnels dans l’administration est une décision injuste : elle est injuste pour les individus, pour les travailleurs et travailleuses, parce qu’il s’agit d’une discrimination sur la base de convictions religieuses, une discrimination pratiquement vis-à-vis de convictions religieuses particulières dont le culte implique le port précis de signes convictionnels, et aussi une discrimination indirecte sur la base du genre“.

Quant au principe de neutralité dans l’administration, “nous sommes d’accord avec cela, ce principe de neutralité est important, mais pour nous il passe surtout par des actes. C’est la raison pour laquelle nous nous opposons aux pratiques de prosélytisme au sein des administrations. Mais nous pensons que le port de signes convictionnels n’est pas intrinsèquement un acte prosélyte, et qu’il ne pose pas intrinsèquement de problèmes de neutralité“, ajoute John Pitseys.

Interview de John Pitseys, chef de groupe Ecolo au Parlement bruxellois

… et ceux qui sont pour

À l’autre extrémité du prisme, certains souhaitent que la STIB fasse appel du jugement du Tribunal francophone du Travail. Selon La Libre, ce serait même le cas du président du conseil d’administration, Merlijn Erbuer, de Groen, qui pourrait plaider pour un appel. Nous l’avons contacté, mais celui-ci n’a pas souhaité confirmer.

Cette position est également défendue par le conseil de la STIB, l’avocat Marc Uyttendaele, dont l’avis juridique a été sollicité dans ce dossier. Si ce dernier n’a pas souhaité commenter, expliquant que son client (la STIB) ne lui a pas demandé de s’exprimer sur ce dossier, nos confrères ont cependant appris qu’il a recommandé à la STIB de faire appel.

Au sein du comité de gestion, les représentants de l’Open VLD et de DéFI seraient également favorables à un appel. Le président amarante, François De Smet, a par ailleurs déclaré au journal Le Soir qu’il “faut par principe aller en appel“.

Quant à l’opposition libérale à Bruxelles, on est également en faveur d’un appel. “La STIB a choisi de mettre dans son règlement cette règle qui implique la neutralité au travail, car c’est une entreprise publique : elle a toute une série d’usagers, de clients, à servir, et elle a souhaité garantir l’impartialité, l’égalité du traitement de tous ces clients. Et donc je pense que si elle a mis ça dans son règlement, c’est que cette entreprise qui connaît bien la diversité, et qui est le reflet de la réalité bruxelloise, avait de bonnes raisons de le faire. Et estimait, comme nous le pensons aussi que c’est la neutralité qui garantit le mieux la neutralité et l’impartialité“, nous explique Alexia Bertrand, cheffe de groupe MR au Parlement bruxellois.

D’ailleurs, le président du MR, Georges-Louis Bouchez, annonçait ce matin au micro de Fabrice Grosfilley que des propositions de décrets, d’ordonnances et de lois vont être déposées par des élus libéraux, quant au port du voile dans l’administration publique. “Ce sera le cas à Bruxelles“, confirme Alexia Bertrand.

Interview d’Alexia Bertrand, cheffe de groupe MR au Parlement bruxellois

Arnaud Bruckner – Photo : Belga (archives)

 

L’intervention en plateau a été réalisée avant l’annonce du report de la réunion