L’édito de Fabrice Grosfilley : proposition libérale
Un texte d’inspiration libérale, revendiqué et présenté comme tel, qui entend remettre la Région bruxelloise dans la bonne direction sur le plan budgétaire, tout en introduisant quelques réformes qui risquent d’être jugées imbuvables par les partis de gauche et la famille écologiste. Voilà comment on pourrait résumer la déclaration de politique générale présentée hier par Georges-Louis Bouchez et David Leisterh.
Ce texte était très attendu. Son principe avait été annoncé dès le 1er mai par les deux libéraux. Ils l’avaient présenté comme un changement de méthode. Puisqu’on n’arrive pas à créer une majorité capable de rédiger une déclaration de politique régionale, ils proposaient d’inverser le processus : commencer par la déclaration de politique générale, et voir qui accepterait de la soutenir. Hier, c’est donc un document d’un peu plus de 80 pages que les libéraux ont présenté. « Pour que Bruxelles prenne son destin en main », c’est le titre du document. Avec une vision qui se veut résolument réformatrice, mais qui risque fort d’accentuer les clivages. Les partis les plus à droite de l’échiquier pourront s’y reconnaître ; ceux situés plus à gauche en feront très probablement le rejet.
Douze chapitres au total. Les premières pages sont évidemment consacrées à la situation budgétaire de la Région. Les libéraux souhaitent un retour à l’équilibre dans un délai maximum de sept ans. Ils proposent donc une réduction budgétaire de 200 millions dès l’an prochain, puis de 400 millions d’euros à partir de 2029. Pour y parvenir : maintien du moratoire actuel sur les recrutements de fonctionnaires (qui perdraient progressivement leur statut particulier), hausse des tarifs de la STIB et de l’eau, ou encore non-indexation du budget dévolu au secteur des titres-services.
Dans les autres chapitres : le retour de la taxe kilométrique, avec un paiement de la fiscalité automobile à l’usage — le fameux projet SmartMove que le MR avait pourtant combattu lors de la précédente législature. La fin de Good Move, remplacé par un nouveau plan régional de mobilité visant à assurer la fluidité du trafic et la sécurité routière. Une réforme de la fiscalité. La neutralité stricte dans l’administration. Les sacs blancs remplacés par des conteneurs intelligents… Et même un « référendum » pour consulter les Bruxellois sur certains sujets. Un catalogue ambitieux, parfois provocateur, qui assume une volonté de rupture avec une bonne partie des politiques menées depuis la création de la Région.
Au-delà du fond, c’est toujours la méthode qui interroge. En présentant un texte qui assume son caractère droitier, on doit bien constater que le MR ne semble pas réellement chercher le compromis. Pire : les deux libéraux ont indiqué qu’on pouvait amender leur texte, mais à la marge. « Ce document est une base qui peut évidemment faire l’objet d’évolutions, mais pas d’une réécriture complète », a ainsi averti Georges-Louis Bouchez.
Alors, que va-t-il se passer maintenant ? Certains partenaires potentiels devraient jouer le jeu. Les Engagés, l’Open VLD, bien sûr. Mais cela ne suffira pas à former une majorité. Chez DéFI, la présidente Sophie Rohonyi a indiqué que la proposition serait débattue lundi en Bureau de parti. « C’est une bonne chose que l’on parle du fond. C’est bien de proposer des mesures, mais pourquoi ne pas proposer des convergences ? », s’est-elle interrogée.
Pour l’instant, Écolo ne fait pas de commentaire, mais la porte-parole du parti a indiqué à l’agence Belga que les écologistes allaient notamment vérifier « si les balises transmises au MR ont bien été intégrées ». Le PS s’abstient, seule réaction officielle à gauche : celle du PTB, particulièrement critique. Les propositions de mesures annoncées par le MR « vont aggraver les conditions sociales des Bruxellois et des Bruxelloises : l’urgence à Bruxelles, ce sont les loyers trop chers, et le MR veut les faire exploser en refusant tout encadrement des loyers ou toute construction de logements sociaux » indiquait la cheffe de groupe Françoise De Smet dans un communiqué.
La proposition libérale, qui était donc destinée à marquer les esprits, risque de faire flop faute de partenaires. Ce sera une feuille de route qui restera comme un témoignage de ce que les libéraux auraient pu faire… s’ils avaient eu une majorité. Mais cette majorité, pour l’instant, ils ne l’ont pas. Et ils ne posent pas les gestes d’ouverture nécessaires s’ils voulaient essayer de l’obtenir.
Fabrice Grosfilley





