L’édito de Fabrice Grosfilley : l’autre équilibre du budget

Comment régler la question du budget ? Comment ramener ce budget à l’équilibre pour éviter de s’endetter et de devoir toujours plus d’argent aux organismes prêteurs, sans pour autant réduire les services rendus aux citoyens ni priver l’État, la Région ou les communes des moyens d’action qui font leur raison d’être, que ce soit pour défendre le pays, assurer la justice, construire des écoles, faire rouler des trams ou des métros, payer des professeurs ou des soignants, avoir des rues propres et bien entretenues, disposer de policiers pour lutter contre les trafiquants de drogue ou organiser l’accueil des sans-abris.

À tous les niveaux de pouvoir, l’équation est donc la même : comment faire mieux avec moins ? Comment ne pas trop dépenser tout en assurant, dans le même temps, la cohésion sociale, le soutien aux plus faibles, l’avenir des enfants, des infrastructures adaptées au monde qui nous entoure, des bâtiments qui ne s’écroulent pas, la transition climatique et le basculement vers le tout numérique ?

L’équation semble en réalité insoluble, tant nos pouvoirs publics sont aujourd’hui désargentés et confrontés à des défis colossaux. Le dernier rapport du comité de monitoring, publié hier, en est la parfaite illustration. Celui-ci revoit à la hausse ses prévisions en matière de déficit pour l’État fédéral. Annoncé à 4,1 % du produit intérieur brut, il serait finalement de 4,2 %, ce qui représente 26 milliards. Dans l’opposition, on s’étrangle et on pointe que la majorité Arizona, qui prétendait remettre de l’ordre dans les finances publiques, ne fait pas mieux que les majorités précédentes. Elle ferait même pire, si l’on en croit Alexia Bertrand, qui siège désormais dans l’opposition. On notera surtout que tous les niveaux de pouvoir sont concernés par la problématique. Certes, pas avec la même intensité, mais il n’y a donc pas de problème spécifiquement bruxellois. La Flandre, qui vient de boucler son budget, a dû trouver 1,5 milliard et ne reviendra à l’équilibre qu’en 2027. La Fédération Wallonie-Bruxelles affiche un déficit d’1,5 milliard et ne le réduira que de 300 millions d’ici la fin de la législature. Si les dirigeants de la Région bruxelloise parviennent effectivement à réduire le déficit d’un milliard dans les trois années à venir, on pourra dire qu’ils n’ont pas démérité.

Reste la question centrale : l’État, peut-il continuer à faire sans cesse des économies ? D’un point de vue comptable, ou du point de vue de la Commission européenne, la réponse est oui. Nous ne devrions pas avoir un déficit qui dépasse 3 % de notre produit intérieur brut. C’est la règle. Une règle qui ne vient pas de nulle part : l’idée est de limiter la dette et d’éviter l’effet boule de neige d’un endettement incontrôlable, où l’on finit par emprunter pour rembourser les emprunts précédents.

À cette orthodoxie budgétaire, on oppose la nécessaire action de l’État. Et le refus d’une doctrine qui voudrait le réduire au strict minimum, en confiant l’essentiel de ses missions au privé. Non, tout n’est pas privatisable. Les grands équipements, la mobilité, la sécurité, la justice, l’enseignement, voilà ce que nous attendons de nos pouvoirs publics. Mais aussi la santé, l’organisation d’une pension décente, la lutte contre la pauvreté, le soutien à la culture et la correction des injustices.

L’équilibre entre ces deux exigences — ne pas dépenser trop, mais assurer des missions utiles au bénéfice de tous —, c’est cela la politique. Essayer de faire croire qu’il n’y a pas à arbitrer entre ces deux impératifs, qu’on peut aller complètement du côté des économies et privatiser les missions de l’État, ou complètement dans l’autre sens en dépensant sans compter et en laissant la dette aux générations futures, sont les deux faces d’une même pièce : celle des discours simplistes, qu’on appellera le populisme.

Fabrice Grosfilley

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