L’édito de Fabrice Grosfilley : de crash en crash
Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ? Ou plutôt deux pilotes, qui veulent aller dans des directions opposées ? Voire une multitude de pilotes, qui n’ont pas tous vocation à prendre les commandes mais qui ont chacun leur idée du plan de vol qu’il conviendrait de suivre, avec certains qui veulent monter dans le cockpit, d’autres qui préfèrent rester à terre et suivre de loin, et certains qui ne seront du voyage que si le reste de l’équipage leur convient ?
Voici donc à quoi ressemblent les négociations bruxelloises depuis que l’initiative Verougstraete s’est écrasée sur l’intransigeance de l’Open VLD. Comme la nature a horreur du vide et qu’il faut bien que quelque chose se passe, on ne va pas rester les bras ballants à regarder la carcasse d’un avion qui a dû subir un atterrissage forcé. Frédéric De Gucht se propose donc désormais comme nouveau commandant de bord. Il a pris au mot le défi lancé par Les Engagés : « si vous bloquez la piste que l’on propose, ce sera à vous de trouver une solution ». Hier, Frédéric De Gucht a donc commencé à envoyer des invitations à des rencontres bilatérales. Objectif : passer de « monsieur non » à « monsieur solution ».
Cette initiative, on peut la trouver louable. Peut-être qu’effectivement Frédéric De Gucht pourrait avoir des idées pour résoudre le problème qu’il a en grande partie contribué à créer. On rappellera que l’Open VLD, à Bruxelles, lors du dernier scrutin, n’a recueilli que 8 537 voix : 11 fois moins que le MR, 10 fois moins que le PS, deux fois moins que Groen… Bref, son parti n’est plus le poids lourd qu’il a été dans l’histoire de Bruxelles. Ce n’est pas parce qu’on a un brevet pour piloter un ULM qu’on peut prétendre monter dans un Boeing. Deuxième difficulté : l’obsession de l’Open VLD d’avoir la N-VA à bord. Comme ni le PS, ni Écolo, ni DéFI ne veulent travailler avec la N-VA, cela veut dire qu’il n’est pas possible de trouver une majorité francophone. Cette piste-là, déjà empruntée maintes fois, se terminera à nouveau par un atterrissage sur le ventre.
Pour contrer l’initiative De Gucht, le Parti socialiste a donc sorti sa DCA hier soir. Communiqué expédié aux rédactions vers 21 heures : « Il ne saurait être question de recommencer à zéro (…) Le temps n’est pas à des manœuvres qui, de surcroît, s’inscrivent dans des considérations extra-bruxelloises. » Il faut reprendre la piste Verougstraete, dit le Parti socialiste, qui invite donc les sept partis cités dans la proposition du facilitateur à reprendre « sans délai » le travail sur le fond, notamment sur le budget.
Ce vendredi, nous avons donc deux initiatives contradictoires : l’Open VLD qui veut lancer une mission de déminage, et le PS qui propose de réactiver la piste Verougstraete. Les autres formations vont devoir se positionner. Et il est hélas fort probable qu’on doive, dans quelques heures ou à la fin du week-end, constater que tout le monde n’est pas décidé à voler dans la même direction.





