La note de Standard & Poor’s attendue ce vendredi : que risque la Région bruxelloise ?

Elle s’est hissée comme une épée de Damoclès au-dessus de la Région bruxelloise depuis plusieurs mois, justifiant parfois les réticences de certains mandataires politiques en affaires courantes à effectuer des investissements. La cotation de l’agence de notation américaine Standard & Poors est attendue ce vendredi. Mais que représente-t-elle concrètement et quel est son impact ?

Il existe trois grandes agences de notation au niveau mondial, toutes américaines, dont l’agence Standard & Poor’s. Leur rôle est de mesurer le risque de non remboursement des dettes que présente un emprunteur privé ou public, qu’il s’agisse d’une entreprise, d’un État ou d’une Région, comme ici. À partir de cette analyse, elles attribuent une note qui reflète la fiabilité de l’emprunteur sur les marchés financiers. Plus la note est basse, plus les risques sont grands pour les investisseurs et donc plus les taux d’intérêt sont élevés.

En théorie, une dégradation de la note de la Région devrait donc entraîner une hausse des taux d’intérêt, et un nouveau coup dur pour les finances bruxelloises… du moins selon les discours politiques de ces dernières semaines. Mais selon l’économiste Bruno Colmant, le changement de note – s’il a lieu – n’aura qu’un impact très marginal sur les taux d’emprunt. “Même dans le scénario où la note passerait de A+ à A, le taux d’intérêt passerait de 0,1 à 0,3% sur le long terme, autrement dit pas grand chose“, analyse l’économiste.

Par ailleurs, la note de l’agence n’est qu’une indication. Or, les investisseurs n’ont pas besoin de l’avis d’une agence de notation pour connaître la situation budgétaire de Bruxelles.

Enfin, Bruno Colmant rappelle que certains prêteurs cherchent des emprunteurs de mauvaise qualité pour obtenir ce surcroît d’intérêt. “Je ne crois pas que la Région bruxelloise ait, à quelconque moment, un risque de ne pas être financée, moyennant un intérêt légèrement plus élevé.”

Une stratégie politique

Selon Bruno Colmant, lier à ce point la possible dégradation de la note à l’absence de gouvernement bruxellois est une posture purement politique. Il rappelle que lors de la mise en place du gouvernement fédéral, le taux d’intérêt n’a pas été modifié. “À Bruxelles, le véritable problème est un problème de coûts trop importants. Quelque soit le gouvernement, il y a une action à long terme qui va devoir être mise en œuvre. Même si, instantanément, un gouvernement est formé, la note ne va pas être rétablie si elle dégradée aujourd’hui.”

En mars 2024, Standard & Poor’s a déjà abaissé d’un cran la note attribuée à la Région bruxelloise, la faisant passer de AA- à A+. Cette note équivaut à une cote de 16/20, soit un investissement de qualité moyenne. À titre de comparaison, la note de la Belgique se situe à AA (avec des perspectives négatives), tout comme la Région flamande. La Région wallonne obtient la cotation A3 de l’agence Moody’s, soit une notation A+ sur l’échelle de S&P, comme Bruxelles actuellement. “La notation de la Région bruxelloise ne peut de toute façon pas être dissociée du rating des autres entités, cela représente un tout“, ajoute Bruno Colmant. “Globalement, je pense que la note de la Région bruxelloise va se diluer dans un agrégat qui n’est pas bon sans être médiocre pour toutes les entités belges.

Échelle des notations de l’agence Standard & Poor’s :

Les notations sont au nombre de 12. Elles vont de AAA à D. Les cinq premières se trouvent dans la catégorie “Investissement”, les sept autres se situent dans la catégorie dite “spéculative”. La Région bruxelloise se trouve donc encore dans la première tranche.

Catégorie Investissement : 

AAA
Note la plus haute. Aptitude extrêmement forte à remplir les obligations financières.
AA
Aptitude très forte à remplir les obligations financières.
A
Forte aptitude à remplir les obligations financières. Une certaine sensibilité aux effets défavorables des changements des conditions économiques.
BBB
Aptitude suffisante à remplir les obligations financières. Une sensibilité plus grande aux effets défavorables des changements des conditions économiques.
BBB- Considérée comme la note la plus basse de la catégorie investissement par les acteurs du marché.

Catégorie Spéculative : 

BB+
Considérée comme la note la plus haute de la catégorie spéculative par les acteurs du marché.
BB Peu vulnérable à court terme mais confronté à des incertitudes majeures et persistantes du fait des conditions économiques et financières défavorables.
B
Vulnérabilité accrue aux conditions économiques et financières défavorables mais aptitude à faire face à ses engagements dans l’immédiat.
CCC
Vulnérabilité dans l’immédiat. Aptitude à faire face à ses engagements dépendant des conditions économiques et financières favorables.
CC
Très grande vulnérabilité dans l’immédiat.
C Procédure de mise en faillite, mais sans interruption des engagements financiers.
D Défaut de paiement des engagements financiers.

Explications dans notre journal de 18h avec Bruno Wattenbergh

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13 juin 2025 - 11h30
Modifié le 13 juin 2025 - 18h48