KVS, Still Standing : la culture en ébullition
Le KVS a annoncé qu’il ouvrirait au public le 26 avril. Et il a le soutien de la Ville de Bruxelles. Le mouvement Still Standing for culture appelle à la réouverture de lieux culturels entre le 30 avril et le 8 mai. Le monde culturel est en ébullition et a les yeux rivés sur le comité de concertation de vendredi, qui doit se pencher sur les secteurs de la culture, de l’événementiel et du sport. Les ministres entendront-ils ce cri d’alarme ?
Rouvrir envers et contre tout, mais pas n’importe comment. L’initiative du KVS, si elle se présente initialement comme un acte de désobéissance civile, s’avère à l’arrivée relativement contrôlée.
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Le théâtre flamand de la rue de Laeken avait annoncé sa reprise, avec la pièce “Jonathan”, au programme pendant une semaine, devant un public restreint de 50 personnes par représentation. Sur son site, l’institution précise que toutes les conditions de sécurité sont remplies : au-delà de la jauge réduite, la salle est ventilée, les flux organisés, les distances de sécurité assurées, ainsi que la mesure du C02, le port du masque obligatoire et l’hygiène des mains. Les places doivent être réservées à l’avance. Le spectacle affiche d’ailleurs complet.
Entre-temps, le bourgmestre de la Ville de Bruxelles, Philippe Close (PS), a fait savoir qu’il soutenait l’initiative, pour peu que le comité de concertation de vendredi le permette. Les installations et équipements de sécurité du théâtre ont été dûment vérifiés par les équipes de la Ville. L’événement acquiert en somme malgré lui valeur de test.
>>Philippe Close soutient la réouverture du KVS et souhaite un événement test le 26 avril
Ouvrir pour le 1er mai?
Mais la tendance en cours ne s’arrêtera sans doute pas là. Le mouvement Still Standing for culture prépare lui aussi un déconfinement partiel, momentané et contrôlé de la culture. Une série d’activités culturelles seront organisées entre le 30 avril et le 8 mai, annonce-t-il dans un communiqué, « dans le sillage des actions menées ces derniers mois ». Sauf que cette fois, il s’agit d’ouvrir les salles et d’y accueillir le public : « de nombreux centres culturels, cinémas, théâtres et lieux associatifs s’apprêtent à rouvrir leurs portes au public. ». A jauge réduite, bien entendu, avec respect des distances de sécurité, régulation des flux etc. Bref, dans le respect des protocoles sanitaires mis au point par les autorités pour garantir la sécurité de toutes et tous, assurent les organisateurs.
L’association insiste sur la « précarité grandissante » des travailleurs et travailleuses de la culture et appelle à sortir de la concurrence entre secteur : « Les lieux culturels ne peuvent être tenus responsables de la situation dans les soins intensifs. Conditionner leur réouverture à de nouvelles mesures ou expériences, à des critères épidémiologiques ou aux avancées de la vaccination, c’est s’acharner à perpétuer une inégalité de traitement inacceptable. »
Le programme complet ne sera dévoilé que jeudi après-midi ou vendredi matin, juste avant le Codeco. Mais cela ne va pas de soi et les discussions vont bon train avec les opérateurs culturels. Certains sont frileux, s’inquiètent des conséquences juridiques ou font face à des équipes divisées. Mais de nombreux théâtres, salles de concert, cinémas, centre culturels, ont déjà confirmé leur participation, à tout le moins leur solidarité.
Recours en justice
La Feas, la Fédération des employeurs des arts de la scène, a les yeux rivés sur le Codeco de vendredi. Sa porte-parole, Françoise Havelange, nous explique soutenir le mouvement « mais nous n’avons pas appelé à des actions qui sortiraient des règles en vigueur. Et beaucoup font preuve d’une incroyable créativité, en transformant les uns une salle de spectacle en lieu d’exposition, en musée ou en librairie. » Et si le Codeco douchait les attentes ? « Nous mettons tout en œuvre pour obtenir des conditions qui permettent de relancer le secteur mais si nous n’obtenons rien, il y aura un mouvement généralisé de colère. », craint Françoise Havelange. L’UPACT va plus loin encore. L’Union de Professionnel·les des Arts et de la Création – pôle Travailleur·euse demande une stratégie de gestion de crise et des perspectives pour le secteur, dans la foulée de la carte blanche publiée dans Le Soir par Marius Gilbert, Leila Belkhir et Nathan Clumeck. « Il faut donner un signal à la culture. Si ça ne se passe pas vendredi, nous déposerons un recours en justice. Une action en responsabilité contre l’Etat belge car il impose des restrictions disproportionnées au droit du travail et à la liberté d’expression. », affirme la porte-parole de l’Union, Virginie Devaster. En attendant, l’UPACT fait en ce moment-même le tour des partis pour présenter un plan de déconfinement, élaboré avec le secteur de l’événementiel.
Déconfiner, oui mais comment ?
Des protocoles sanitaires stricts en vue de la réouverture des lieux culturels (des arts vivants, musique, arts de la scène) ont été élaborés au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles, en concertation avec le secteur et avec les experts, assurent le cabinet de la ministre de la Culture, Bénédicte Linard (Ecolo). Ils ne demandent qu’à être validés par des événement test grandeur nature.
Des événements-tests avaient pourtant bien été annoncés pour fin avril, par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le comité de concertation de début mars avait donné le feu vert pour la mise en œuvre d’expériences pilote de ce type. La ministre de la Culture et ses équipes avaient commencé à travailler sur le sujet et proposé six projets-test, un par province. L’idée étant de proposer des expériences complémentaires à celles qui avaient été menées à l’étranger. Les marchés publics ont été lancés, notamment en vue de constituer l’accompagnement scientifique nécessaire à la validation de ces initiatives, explique Lauriane Douchamps, du Cabinet Linard. « Mais le fameux Codeco a instauré la “pause de pâques” et tout a été ralenti. », poursuit-elle. Tous les espoirs reposent sur celui de ce vendredi. « Les six événements retenus ont été établis. Ils doivent encore être validés, par le ministre de la Santé et la plateforme testing. » Après il faudra encore constituer les groupes participants à l’expérience. « Cela pourrait se faire début mai ».
En parallèle, la Ville poursuit le processus entamé début mars avec l’infectiologue Nathan Clumeck en vue de préparer les lieux destinés à recevoir du public, à vivre malgré le virus. Huit sites, tous différents pour assurer une diversité de situations, ont été sélectionnés pour évaluer les possibilités offertes par les nouvelles technologies et les techniques innovantes, en matière de renouvellement et de qualité de l’air, les budgets nécessaires, les capacités pratiques, etc. Appel a été lancé aux entreprise actives dans ces secteurs pour proposer des solutions. Actuellement, l’audit des lieux choisis se termine, selon Wafaa Hammich, porte-parole de Philippe Close. La semaine prochaine l’analyse des propositions reçues pourra commencer mais Wafaa Hammich prévient : qu’on ne s’attende pas à tout lancer demain, il s’agit d’un processus de long terme.
S.R. – Photo : Arch. BX1