Interdiction du droit de manifester : le ministre de la Justice précise, l’opposition réclame des auditions
Le droit à la manifestation est-il mis en danger par la future réforme de la justice ? Des syndicats et autres acteurs de la société civile s’inquiètent d’une mesure proposée par le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD) dans sa réforme du code pénal.
C’est un texte proposé dans le cadre du projet de loi « visant à rendre la justice plus humaine, plus rapide et plus ferme III » par le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD) qui est aujourd’hui au cœur des débats. Ce projet de loi prévoit qu’une personne peut être interdite de participation à un rassemblement revendicatif en cas d’infractions, violences ou vandalisme, pour une période limitée.
Le ministre affirme que seuls des faits graves seront concernés et pourraient mener à des interdictions. Il confirme en commission de la Justice, ce mardi matin, qu’il n’y aura pas d’interdiction si quelqu’un va écrire « morts aux patrons » sur un magasin Delhaize, par exemple.
Une interdiction de manifestation pourra seulement être demandée en cas d’association de malfaiteurs, de menace d’attentat contre les personnes ou contre les propriétés, d’homicide, de coups et blessures volontaires, d’incendie volontaire, de certaines formes de vandalisme, de destruction de biens ou d’infractions à la loi sur les armes. Le ministre précise encore qu’une interdiction se justifie uniquement si la personne, après avoir purgé sa peine, représente un risque pour l’ordre public.
Mais pour la FGTB, la Ligue des Droits Humains ou encore l’opposition menée par le PTB et Les Engagés, cette interdiction pourrait atteindre au droit de manifester. Ils estiment notamment qu’on ne peut pas interdire de manière préventive alors que ces personnes ont déjà été sanctionnées. Et font part de leurs inquiétudes que cette loi mène à des dérives comme en France et aux Pays-Bas.
► Lire aussi | Interdiction de manifester : la FGTB dénonce une “attaque contre l’action collective”
Vote reporté
Mais si la FGTB appelle les socialistes à demander une modification du texte, certains représentants du PS sont pourtant en faveur de ce texte, comme le bourgmestre de Bruxelles Philippe Close. Il explique dans Le Soir que ce type d’idée vient même de son camp. Et ajoute que certains individus viennent juste pour détruire dans des manifestations et qu’il souhaite mieux sanctionner les casseurs.
Philippe Close et le ministre de la Justice rappellent que la disposition proposée n’est pas la même chose que les interdictions de stade où les supporters doivent se présenter à la police. L’interdiction de manifester sera une décision de justice, avec possibilité d’appel.
Mais l’opposition et les syndicats estiment que le système est répressif et peut mener à des dérives, selon les interprétations. Par exemple, y a-t-il destruction de biens en cas de feu de palette ? Quid si un policier juge d’une entrave qui n’est finalement pas avérée ?
Le vote de ce projet de loi était prévu ce mardi en commission de la Justice, mais ce vote a finalement été reporté. LePTB a redemandé des auditions des syndicats et de la société civile, mais la majorité n’a pas accédé à cette demande. Les discussions se poursuivent donc.
■ Les explications de Grégory Ienco dans Le 12h30.
Photo : Belga/Eric Lalmand