Face au risque de rejet de greffe, deux chercheuses de l’UCLouvain réalisent une découverte révolutionnaire
Laure Elens et Laure Bindels, professeures à l’UCLouvain, sont parvenues à une découverte importante en matière de rejet des greffes d’organe.
Aujourd’hui, environ 40% des personnes en attente de greffe ne trouvent pas d’organe compatible : il est donc primordial, pour ceux qui ont la chance d’être greffé, de garantir la réussite de la procédure, et d’éviter tout rejet. Reste qu’un dosage inapproprié du médicament anti-rejet, le tracolimus, est l’un des facteurs majeurs d’échec, puisque “il est aujourd’hui extrêmement difficile de doser correctement ce médicament, qui peut entraîner des risques importants d’échec de la greffe en cas de sous-dosage ou des effets secondaires en cas de surdosage“, précise l’université.
Pour trouver une solution à cela, deux professeures de l’UCLouvain (Laure Elens et Laure Bindels du Louvain Drug Research Institute, basé à Woluwe-Saint-Lambert, ainsi qu’Alexandra Degraeve, aspirante FNRS) se sont donc intéressées à l’influence du microbiote intestinal dans la variabilité du dosage du médicament. Et cette démarche est une première, qui vient d’être publiée dans la revue scientifique “Microbiome“. Ainsi, “elles ont cherché à déterminer les facteurs qui influencent la manière dont le corps humain absorbe et élimine ce médicament, dans le cadre de greffe“, indique l’UCLouvain, qui précise que cette recherche est en cours depuis cinq années.
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Une découverte révolutionnaire
Révolutionnaire, cette découverte devrait “permettre de mieux cibler le traitement post-greffe et d’alléger les effets secondaires qui en découlent. Et aussi permettre d’agir sur les interactions entre les bactéries intestinales et l’absorption de certains médicaments, comme les anti-VIH ou les hypotenseurs“, explique l’UCLouvain.
Concrètement, l’étude a débuté sur des souris, que Laure Bindels a étudié pour déterminer si la présence du microbiote joue un rôle ou non dans l’absorption du médicament : “résultat, les chercheuses ont observé, pour la première fois dans le monde scientifique, que sans microbiote, les taux de tacrolimus dans le sang de la souris étaient plus bas : la présence d’un microbiote augmente donc la concentration du médicament dans le sang, et diminuerait donc le risque de rejet de greffes et a contrario pourrait augmenter le risque de survenue d’effets secondaires“, indique l’université. De même, cette partie de la recherche a mis au jour un nouveau mécanisme d’action du microbiote encore inconnu, en diminuant l’action de la protéine P-glycoprotéine.
En parallèle, Laure Elens a mené la recherche clinique, avec des tests menés sur des matières fécales prélevées auprès d’une centaines de patients ayant subi une greffe rénale, en collaboration avec les Cliniques Universitaires Saint-Luc, afin de comprendre les raisons de grande variabilité des doses actuelles de tacrolimus d’un patient à un autre. Les chercheuses en ont conclu que “plus le dosage est élevé, moins le microbiote est riche“.
Et maintenant ?
Désormais, ces scientifiques ont obtenu un financement du FNRS, et continuent à étudier le microbiote sur une longue période, afin de mener des comparaisons avant, juste après et bien après une greffe, et ainsi mieux comprendre les interactions entre les bactéries intestinales et l’absorption des médicaments comme le tacrolimus.
Outre cette découverte, l’UCLouvain souligne que ceci prouve l’importance d’une bonne communication entre spécialités de la médecine : “à l’avenir, si un patient ayant subi une greffe rénale est amené à prendre des antibiotiques, qui ont un impact significatif sur le microbiote, il serait utile qu’un contact soit pris au préalable avec son néphrologue pour limiter au maximum les effets secondaires ou les problèmes de rejet de greffe”, conclut l’université.
■ Reportage d’Arnaud Bruckner, Daniel Magnette et Laurence Paciarelli
ArBr – Photo : LinkedIn