Plus de 30.000 enseignants défilent dans les rues de la capitale (photos et vidéos)

“Valérie arrête la casse ou on se casse”: quelque 30.000 enseignants selon la police -35.000 selon les syndicats- ont bruyamment défilé lundi dans le centre de Bruxelles au premier jour de 48 heures de grève dans les écoles.

Réunis en front commun, les syndicats s’opposent aux économies annoncées par le gouvernement MR-Engagés dans l’enseignement qualifiant (technique et professionnel) ainsi que la suppression annoncée de la nomination des enseignants au profit d’un contrat à durée indéterminée.
 
Parti sur le coup de 11h00 de la gare du Midi, le long cortège diapré a fait une première halte fort chahutée devant le siège du MR avant de se rendre devant celui des Engagés -où une délégation s’est entretenue avec la cheffe de groupe au Parlement, Mathilde Vandorpe-, puis au siège du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. “Gla-gla-gla-tigny: tes mesures font froid dans le dos”, “Valou, fais tes valoches, on en a marre d’en saigner” ou encore “Glatigny, ça suffit!”: la ministre de l’Éducation Valérie Glatigny (MR) était la cible privilégiée des calicots brandis lundi par les nombreux manifestants.

 

“On est à la base de l’avenir de la société et ça, madame Glatigny a tendance à l’oublier”: portraits croisés de deux enseignants qui ont manifesté

 
 
Dans la foule, beaucoup d’enseignants forcément, mais aussi une délégation du “gang des vieux en colère”, plusieurs élèves du qualifiant, et cette ado aussi avec sa pancarte: “Je veux grandir, pas servir”. Les syndicats s’opposent aux économies décidées dans l’enseignement qualifiant où le nombre d’heures sera réduit de 3% dès la rentrée prochaine, ce qui devrait engendrer au moins cinq cents pertes d’emploi, selon les syndicats.
 
“L’enseignement qualifiant est traité comme une plante séchée qu’on arrache!”, se désole cette ancienne prof de philo en septième à la retraite depuis cinq ans déjà mais présente dans le froid lundi avec ses anciennes collègues.  “Ce secteur (du qualifiant) est complètement laissé à l’abandon. Les élèves du qualifiant sont en fait disqualifiés par ces mesures”, selon elle.
 
 
 
Le siège du MR ciblé par les manifestants:

Des actions dans les écoles

■ Reportage de Jamila Saidi M’Rabet

Des actions sont organisées dans certaines écoles, au cas par cas. Tout dépend du nombre de grevistes. Certaines écoles sont fermées. Les établissements ont envoyé des courriers pour encourager les parents à garder leurs enfants. Mais des garderies sont oblgatoirement organisées. Dans certains établissements, les horaires sont adaptés mais les enfants doivent se présenter.

Dans d’autres écoles, les professeurs restent présents mais mènent des actions symboliques comme un arrêt de travail de 30 minutes.

Des parents inquiets

Les parents, notamment dans l’enseignement catholique tiennent à exprimer aussi certaines de leurs inquiétudes quant aux dernières réformes annoncées. Ce sont en particulier les changements pour la septième secondaire qui semblent créer des remous.

Le décret-programme voté en décembre dernier, qui vise entre autres à mieux organiser l’enseignement et la formation professionnelle, prévoit de renvoyer vers d’autres formes d’enseignement les jeunes qui ont en poche leur CESS (pour la 7e professionnelle) ou un certificat de qualification (pour la 7e technique de qualification). Plutôt que de poursuivre avec une septième année, ils devraient se diriger par exemple vers le supérieur ou vers l'”enseignement pour adultes”, ce qu’on appelait jusqu’à il y a peu l’enseignement de promotion sociale. Des exceptions sont prévues dans des branches spécifiques. 

L’Ufapec, qui regroupe les associations de parents de l’enseignement catholique, relaie des “inquiétudes croissantes” en ses rangs. Certains des jeunes qui visaient une septième année “ne sont pas assurés de trouver dans l’enseignement pour adultes et les organes de formation professionnelles la formation dispensée dans ces septièmes. Aucun cadastre ne vient aujourd’hui leur indiquer où ils pourraient se rendre“, a affirmé l’Ufapec lundi, dans un communiqué. 

La semaine dernière, la ministre de l’Éducation et de l’Enseignement de Promotion Sociale, Valérie Glatigny, a indiqué au Parlement qu’un tel cadastre des formations est “en cours de finalisation”. 

L’Ufapec regrette aussi le manque d’information “quant aux impacts financiers pour le portefeuille des familles“.  “Il faut rappeler que les élèves qui fréquentent une septième année sont dans une démarche de réussite scolaire et de professionnalisation qui les mettent dans la situation d’être engagés directement et d’être très vite performants. Des parents voient leurs enfants découragés et déçus dans leurs objectifs“, a conclu l’Ufapec.

Les raisons de la colère 

Réunis en front commun, les syndicats entendent dénoncer les mesures d’économies décidées par le gouvernement MR-Engagés dans l’enseignement qualifiant, et plus largement les réformes annoncées l’été dernier dans l’accord de majorité pour l’enseignement.

Ces mesures vont durablement altérer la qualité et l’accessibilité pour toutes et tous, mais aussi dégrader les conditions de travail des personnels”, estiment les syndicats.

Au cœur des réformes et des coupes budgétaires, il y a l’enseignement qualifiant (précédemment connu sous les noms d’enseignements techniques et professionnels). Le 26 septembre dernier, Valérie Glatigny (MR) avait annoncé l’approbation d’une note visant à réformer le qualifiant. Dans cette réforme, il est prévu d’amputer 3% du budget actuel de l’enseignement qualifiant. Là aussi, moins de professeurs, mais aussi de matériel. Ce qui peut compliquer le processus d’apprentissage.

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Autre motif du courroux des syndicats: la volonté affichée par le nouveau gouvernement de mettre fin à la nomination des profs contre l’octroi à l’avenir d’un contrat à durée indéterminée.

Mardi, la seconde journée de grève sera, elle, caractérisée par des actions décentralisées. Des piquets sont ainsi prévus devant les écoles.

Pour mémoire, les syndicats ont annoncé à la mi-janvier le dépôt d’un préavis d’actions “illimité” contre les projets du gouvernement MR-Engagés.