Câbles sur les façades: vers un recours au Conseil d’Etat

Le déploiement de la fibre optique à Bruxelles, qui permet une connexion internet plus rapide, signifie la prolifération des câbles et boîtiers de raccordement sur les façades. Une première circulaire limitait leur installation (réglementée par une loi de 1991) mais suite à une nouvelle modification qui n’oblige plus à des câbles de couleur identique à la façade, le groupe citoyen “Trop de câbles sur nos façades” annonce un recours au Conseil d’Etat. 

Une première circulaire interprétative avait été adoptée le 6 juin 2024, prévoyant que le placement ne soit dispensé de permis d’urbanisme que “pour autant que la couleur soit similaire à la façade et pour autant que le tracé du câble suive les lignes architecturales de l’immeuble telles que le seuil de la fenêtre, la corniche, les jointages entre façade, la rive de toiture”. Leur installation est règlementée depuis 1991, mais pas assez clairement. C’est pour cela qu’une nouvelle circulaire a été publiée : “Il y avait une nécessité de rappeler la législation et clarifier cette législation qui dit qu’à chaque fois que des câbles sont accrochés à une façade classée, il faut demander un permis. Dans les autres cas, on ne peut pas faire ce que l’on veut. Il faut suivre les lignes architecturales, que les câbles aient la couleur des façades. C’est important de clarifier cela pour que quand les règles ne sont pas respectées, les communes puissent dresser des PV et agir”, justifiait Ans Persoons (Vooruit), secrétaire d’État bruxelloise à l’Urbanisme, le 12 juin dernier.

Mais une deuxième circulaire adoptée le 19 juin 2024 “apporte encore un plus de confusion dans cette problématique”, souliganit la commune de Womuwe-Saint-Lambert le 26 juin. Voici ce qu’elle prévoit : “Le placement sur façade et, pour autant que le vide à combler ne soit pas une voirie à traverser, en aérien de câbles et conduites de communications électroniques ou numériques et des boîtes de raccordement connexes d’une saillie inférieure ou égale à 25 cm par rapport au nu du mur et d’un volume de 8 dm3 maximum, pour autant que la couleur soit similaire à la façade et pour autant que le tracé du câble suive les lignes architecturales de l’immeuble telles que le seuil de la fenêtre, la corniche, les jointages entre façade, la rive de toiture”.

Autrement dit, selon Michaël Bormans, initiateur de la mobilisation citoyenne “Trop de câbles sur nos façades”, on met “en place une loi pour limiter la nuisance des dispositifs télécom sur les façades mais – pour une soi-disant erreur d’interprétation d’un texte qu’on a soi-même écrit – on retire ensuite de la mesure de la nuisance ce qui en constitue le volume principal: les câbles”.

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“Ca arrange les opérateurs”

“Le Cabinet fait dire à la loi ce qu’il a envie, au moment où il en a envie et ça arrange parfaitement les opérateurs, qui ne trouvent plus en face d’eux de loi solide permettant d’arrêter des installations pourtant illégales. On se demande ce que le Cabinet a appris ces trois derniers mois. Les habitants étaient à peine prévenus des effets négatifs du changement de 2022 qu’on leur enlève maintenant la seule protection qu’ils pouvaient y trouver ? Notre prochaine étape, c’est le Conseil d’Etat. Il y a dans notre Droit quelque chose qui s’appelle le principe de proportionnalité. Nous allons aller le tester.”

Par ailleurs, les bourgmestres se réuniront en compagnie de la secrétaire d’État chargée de l’Urbanisme, Ans Persoons le 10 juillet prochain pour convenir d’un accord de suspension ou de clarification des règles comme nous l’expliquait Vincent de Wolf, président de la conférence des bourgmestres : “Tout le monde est d’accord pour dire que travailler comme ça, ça ne va pas. Il n’y a pas de cadre normatif clair. Les circulaires se contredisent. On ne peut pas laisser un système anarchique ou certains opérateurs se bousculent pour, avec ou sans autorisation, avec ou sans respect des principes, coloniser les façades”.

Vincent de Wolf assure que certains opérateurs ont exercé des pressions : “Ils ont écrit en disant que si on passait par la fibre, on allait couper l’ensemble des transmissions. On est dans un pays démocratique. Il faut savoir raison garder. Il faut savoir faire des choses qui technologiquement le justifient, et c’est le cas, mais avec ordre et méthode. C’est pour cela que la conférence des bourgmestres veut voir la secrétaire d’État et ensemble prendre la meilleure décision”, nous disait-il.

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02 juillet 2024 - 10h09
Modifié le 03 juillet 2024 - 07h22