Balance Ton Bar : une victoire judiciaire, mais le temps joue encore contre les victimes

C’est la fin d’un long volet judiciaire. Un sorteur du El Café a été condamné en appel à 50 mois de prison ferme ce mercredi. Il avait violé une cliente du bar ixellois en 2019.

Dans la nuit du 1er au 2 mars 2019, le sorteur a forcé une cliente de 20 ans à lui faire deux fellations dans les toilettes du bar ixellois. La victime est parvenue à sortir et fuir à pied jusqu’à la gare d’Etterbeek. C’est un sans-abri qui a contacté la police après l’avoir vue sur le quai, en pleurs. La jeune femme a été accompagnée par des policiers spécialisés dans la prise en charge de victimes de violence sexuelle. Elle a déposé plainte contre le videur, et un Set d’Agression Sexuelle (SAS) a été utilisé pour récolter de l’ADN de l’agresseur. Cela a permis d’identifier formellement le sorteur.

Le sorteur du El Café vient de voir son jugement rendu en juin 2022 confirmé par la cour d’appel. Il écope donc bien de 50 mois de prison ferme et doit verser 8 500 euros à sa victime. Il n’a cependant pas été directement écroué et devrait prochainement recevoir une convocation pour se présenter à la prison.

Un mouvement qui fait bouger les lignes

Balance Ton Bar, c’est la vague d’indignation qui a secoué l’ensemble de la Région bruxelloise suite à des accusations de viol et d’agression sexuelles dans de nombreux bars de la capitale. Ce mouvement a été un accélérateur, un coup de pression politique, pour mettre en place certaines mesures en matière de violences sexuelles.

Au niveau des CPVS par exemple, les Centres de Prise en charge des Violences Sexuelles. Le projet initial se concrétise : on compte aujourd’hui 10 CPVS en Belgique. Depuis Balance Ton Bar, le gouvernement fédéral a approuvé l’augmentation du budget qui leur est destiné. De quoi mettre en place à terme un CPVS par arrondissement judiciaire en Belgique. Et, au vu des chiffres, cela fonctionne : 6 victimes sur 10 déposent plainte dans un CPVS, contre 1 sur 10 dans un commissariat.

Pour renforcer l’accueil des victimes, la Région bruxelloise a de son côté lancé un projet pilote : les cellules EVA, pour “Emergency victim assistance”, dans les commissariats. Il s’agit d’une cellule dédiée spécifiquement à l’accueil des victimes de violences sexuelles ou intrafamiliales. On compte désormais cinq cellules de ce type : au commissariat de Bruxelles Central, Ixelles, Etterbeek, Evere et Anderlecht.

Le commissariat de Molenbeek ouvrira le mois prochain sa cellule EVA avec inspectrices et inspecteurs formés à recueillir la parole des victimes.

Reste que le temps joue contre les victimes : que ce soit le temps de former l’ensemble des acteurs de première ligne ou le temps de la justice; cinq années se sont écoulées entre les faits et la condamnation prononcée hier.

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Les explications de Marine Guiet dans le 18h