Attentats de Bruxelles : Salah Abdeslam transféré en France, son avocate dénonce une “violation de l’Etat de droit”

Salah Abdeslam a été extrait mercredi matin de sa cellule à Haren pour être transféré en France.

“Ils sont venus le chercher ce matin dans sa cellule à 09h00 et il est parti en France“, a déclaré son avocate Delphine Paci auprès de l’AFP. “C’est une violation flagrante de l’Etat de droit. Il y a eu clairement une entente entre l’Etat belge et l’Etat français pour violer une décision de justice“, a-t-elle ajouté. Bien que de nationalité française, Salah Abdeslam a exprimé sa volonté de purger sa peine en Belgique où il a grandi et a toutes ses attaches familiales. En octobre 2023, la cour d’appel de Bruxelles, saisie par ses avocats, avait “suspendu temporairement” le transfèrement de Salah Abdeslam en France, où le djihadiste est censé purger sa peine pour les attentats du 13 novembre 2015.

L’homme a quitté en matinée la prison de Haren pour être conduit à la frontière, où il a été pris en charge par les autorités françaises. Il “vient d’être incarcéré dans une prison de la région parisienne“, a indiqué dans l’après-midi le ministre français de la Justice Eric Dupond-Moretti. “Conformément à la décision de la justice française et au souhait des associations de victimes, il y purgera sa peine de perpétuité incompressible“.

Salah Adbeslam vient d’être incarcéré dans une prison de la région parisienne.

Conformément à la décision de la justice française et au souhait des associations de victimes, il y purgera sa peine de perpétuité incompressible.

— Eric Dupond-Moretti (@E_DupondM) February 7, 2024

Cette décision repose sur une convention passée entre la France et la Belgique stipulant que Salah Abdeslam était transféré en Belgique “pour la durée du procès belge” uniquement, avance le parquet. D’autre part, il existait un risque que, n’ayant possiblement plus de titre légal pour maintenir Salah Abdeslam en détention, la Belgique doive le libérer. Une option qui n’était “pas envisageable”, poursuit-il. L’analyse effectuée indique que le délai ultime actuellement accordé par la France pour détenir Salah Abdeslam en Belgique ne pouvait plus être prolongé.

Un retour “légalement irrévocable”

Afin d’assurer la présence du Français au procès des attentats du 22 mars 2016 en Belgique, les autorités judiciaires belges avaient émis un mandat d’arrêt européen vers la France. En réponse à cette demande, la cour d’appel de Paris avait décidé, avec l’accord de l’intéressé, de le remettre temporairement à la Belgique pour la durée du procès belge, retrace le parquet fédéral.

“Le procureur général de la cour d’appel de Paris et le procureur fédéral ont alors pris l’engagement de limiter cette remise temporaire à la durée du procès belge devant la cour d’assises et d’un éventuel pourvoi en cassation. Cet accord ne prévoit pas un maintien de Salah Abdeslam en Belgique dans le cadre de toute autre procédure civile“, pointe le paquet.

“La Cour de Justice de l’Union européenne a précédemment décidé qu’une procédure civile ne peut être considérée comme un obstacle juridique à l’exécution d’une procédure de mandat d’arrêt européen devenue définitive“, brandit par ailleurs le parquet. “En conséquence, l’arrêt rendu au civil par la cour d’appel de Bruxelles, interdisant à l’État belge de transférer le condamné en France ne peut pas être invoqué comme une circonstance exceptionnelle, qui autoriserait à ne pas renvoyer Salah Abdeslam en France où il doit purger sa condamnation par la cour d’assises spéciale de Paris“.

“Le retour de Salah Abdeslam vers la France à l’issue de la procédure pénale était donc légalement irrévocable“, ponctue-t-il.

Une condamnation en France et une en Belgique

Le Français a été condamné à la perpétuité incompressible pour sa participation aux attentats de Paris le 13 novembre 2015 (130 morts). En Belgique, Salah Abdeslam a écopé de 20 ans pour la fusillade rue du Dries à Forest, en mars 2016, et aucune peine n’avait été prononcée à son encontre dans le cadre du procès des attentats de Bruxelles du 22 mars 2016. Il avait toutefois été reconnu coupable d'”assassinats dans un contexte terroriste” pour ces attaques à l’aéroport de Zaventem et dans la station de métro Maelbeek. Ces attentats ont été commis par la même cellule djihadiste que ceux de Paris. Trois hommes s’étaient fait exploser, deux à l’aéroport et un autre dans le métro, faisant des centaines de blessés en plus des 35 morts.

Depuis son arrestation en mars 2016, Salah Abdeslam a effectué la plus grande partie de sa détention en France.

► Tous nos articles sur le procès des attentats de Bruxelles

BX1 avec Belga

■ Reportage de Jean-Christophe Pesesse, Thibaut Rommens et Manu Carpiaux