Débordements policiers contre Extinction Rebellion ? Philippe Close temporise et Benoit Hellings réclame un rapport

Suite à l’action de la police à l’encontre des militants d’Extinction Rebellion ce samedi sur la Place Royale, des voix s’élèvent : la répression policière face à cette manifestation pacifique était-elle disproportionnée ? Philippe Close temporise ce lundi les faits et justifie les moyens utilisés par les forces de l’ordre pour disperser les manifestants. Il rencontrait à ce propos cet après-midi son échevin du Climat, Benoit Hellings (Ecolo). Ce dernier réclame un rapport de police.

Les Verts n’ont pas tardé à exprimer leur indignation. Benoit Hellings réclame un rapport sur les violences à l’encontre des activistes. “Ce rapport est très important quand on voit les images qui sont extrêmement choquantes et interpellantes.” Sur la question de savoir si les manifestations étaient au courant des injonctions de la police, Severine de Laveleye, députée fédérale répond, “ça doit être quelque chose qui doit être analysé dans le rapport car la communication est manifestement mal passée.”

Dans le chef du bourgmestre de la Ville de Bruxelles, une seule consigne: rétablir l’ordre ! “Mon objectif, c’est que la liberté d’expression puisse avoir lieu dans les meilleures conditions, mais aussi de garantir ce qu’on appelle la vie courante. On voulait que le tram puisse à nouveau circuler sur la place.”

Le rapport détaillé du film de l’histoire sera remis cette semaine et fera l’objet d’une réunion entre bourgmestre, échevins et chefs de la police.

Olivier Slosse, porte-parole de la police de Bruxelles-Capitale-Ixelles, explique que la police a toléré la présence des militants d’Extinction Rebellion pendant quatre heures, ce samedi sur la Place Royale. Les militants présents en nombre et venus pour beaucoup en famille dénoncent eux aussi la violence de l’intervention policière.

Récit du déroulé des faits

Philippe, père de famille d’une quarantaine d’années était venu pour accompagner un ami. “La philosophie de l’action était bon enfant, contestataire certes mais pacifique !”. Après avoir participé aux tables de discussion en début d’après-midi, il descend vers la Grand-Place pour se restaurer. Vers 17h40, il remonte vers la Place Royale et commence à filmer la police qui charge. “Je suis malheureusement tombé sur un groupe de policiers très agressifs. J’ai reçu du gaz lacrymogène dans les yeux avant de sentir un violent coup de matraque sur mon plexus.”

Les militants sont alors rassemblés, assis à terre, pendant de longues minutes durant lesquelles le commissaire divisionnaire Vandersmissen leur demande de se calmer. Le Monsieur Manifs de Polbru est connu pour ses méthodes. Le policier a déjà fait l’objet de nombreuses plaintes (notamment pour abus d’autorité, traitements dégradants, racisme ou même interventions injustifiées et parfois violentes), mais aucune condamnation au regard de la justice.

Ils sont ensuite assis les uns derrière les autres, les mains attachées dans le dos par des colsons. Au total, 435 personnes sont arrêtées et emmenées dans différents commissariats de Bruxelles. Parmi ces arrestations, 317 sont administratives et 118 personnes sont embarquées au commissariat pour identification avant d’être libérées.

https://www.youtube.com/watch?time_continue=30&v=lnZO5iyM-m8

L’artiste numérique français, Joanie Lemercier présent pour installer une projection lumineuse d’Extinction Rebellion sur le Palais royal s’exprime sur son compte Facebook. “Mon matériel a été saisi à la suite de cette action et j’ai eu la chance de n’éprouver que des violences mineures lorsque la police m’a arrêté. Hier, nous avons été … confrontés à une violence policière extrême.”

Le porte-parole de la police de Bruxelles-Capitale-Ixelles, Olivier Slosse, reconnait qu’il y a effectivement des indications que tout ne s’est pas passé conformément aux règles. “Il y a eu l’usage de spray lacrymogène qui n’était clairement pas conforme aux directives.” Cela fera l’objet d’une enquête à rendre à Philippe Close. Il ajoute encore, “une enquête interne est ouverte pour la photo sur laquelle un spray est appliqué sur une personne qui se trouve au sol.”

Fabian Maingain, échevin DéFI à la Ville de Bruxelles, a également souhaité réagir. “Suite à la réunion de cet après-midi, nous examinerons le rapport de police demandé par le Bourgmestre. Mais, comme toujours, pour DéFI, la Loi est la Loi et elle s’applique à tout le monde. Et toute opinion se vaut d’être écoutée si elle s’exprime dans un cadre pacifique, organisé et respectant la liberté d’expression.”

L’étude des violences policières illégitimes s’avère complexe étant donné, notamment, que le recours à la contrainte et à l’usage de la force est inscrit dans la loi qui régit la fonction de police. Il s’agit dès lors d’identifier les cas dans lesquels ce recours n’aurait pas respecté les principes de légalité, de subsidiarité et de proportionnalité.

En 2017, le Comité P a ouvert 2733 nouveaux dossiers de plaintes en Belgique. Parmi elles, plus de 7% ont été déposées pour coups et blessures ou excès de zèle. Impossible toutefois de connaître les chiffres au niveau bruxellois et/ou lors de l’intervention de la police sur les manifestations ou mobilisations.

Notre source lui raconte, ” je me suis retrouvé pour ma part au commissariat du centre-ville. On a été installés près du local poubelles dans le garage. Un policier s’est amusé à mettre les gaz de sa moto Harley-Davidson alors que le pot d’échappement était vers nous. Ils rigolaient, parlaient fort et fumaient à côté de nous.” Une attitude qui a profondément surpris et choqué l’homme. “Je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas moyen de discuter avec les plus jeunes policiers, à l’inverse des pères de famille qui comprenaient beaucoup plus notre action. On a essayé de leur faire comprendre qu’on était pacifiques, qu’on faisait ça aussi pour nos enfants. Pour beaucoup, j’ai eu l’impression qu’ils n’avaient pas envie de comprendre mais qu’ils voulaient juste obéir aux ordres comme des robots.” L’homme a été relâché vers 22h00 et déposé aux pieds de l’Atomium. Il s’en sort avec une simple inflammation au cou à la suite des jets de poivre. Il ne souhaite pas porter plainte.

Les derniers activistes ont été libérés vers 3h00 dans la nuit de samedi à dimanche.

A.V. – Photo: BX1