Rue de la Loi : si la politique était peinture, Paul Magnette serait impressionniste

La politique belge ressemble parfois  à une œuvre d’art. Avec des périodes, des courants, des styles liés aux époques ou aux personnalités.  Si on s’autorisait cette analogie qui fera hurler autant les politologues (pardon Pascal Delwit) que les conservateurs des Musées Royaux des Beaux Arts (pardon Michel Draguet), on classerait bien Jean-Luc Dehaene dans les constructivistes soviétiques, de grands aplats de couleurs vives, des angles aigus, j’impose l’image avec force. Elio Di Rupo serait de l’école réaliste, avec la misère sociale dépeinte dans ses moindres détails, sans fard, et Bart De Wever serait un peintre de la Renaissance qui multiplierait les références aux personnages de l’Antiquité. Dans cette galerie de portrait, Paul Magnette serait un adepte du pointillisme, comme Georges Seurat ou Camille Pisaro, puisqu’il mélange des couleurs éloignées les unes des autres et les appose par petites touches. Il faut prendre du recul pour comprendre la toile qu’on nous soumet, car quand on le nez dessus, on ne comprend pas grand chose.Certes l’informateur a lancé un appel à ses partenaires potentiels ce lundi en conférence de presse : “il est maintenant plus que temps de réussir, si nous devions subir un choc majeur, nous ne serions pas en état de réagir en l’absence de gouvernement de plein exercice”, bref, sortez de votre zone de confort, a lancé l’informateur. Pourtant dix partis restent à bord et l’informateur ne veut surtout pas prendre le risque de dire à quelle coalition il travaille : d’abord le contenu, ensuite les partis, martèle-t-il à chaque fois qu’on lui pose la question

Si l’on fait un pas en arrière, on commence à les voir, ces petites touches du peintre Magnette. Il y a d’abord cette indication donnée en conférence de presse : un seul parti voulait parler du confédéralisme, aucun autre ne l’a demandé , et comme je cherche des convergences, exit le confédéralisme. Et puis il y a ces notes, une par chapitre, qui ont été distribuées aux partis politiques. Jusqu’à présent leur contenu n’avait pas fuité. Aujourd’hui deux indiscrétions dans la presse.La première dans L’Echo : selon ce journal, l’informateur ne prévoit pas la suppression des voitures de société, mais souhaiterait que l’avantage soit à l’avenir réservé aux voitures zéro émission. Une mesure qui pourrait rassurer les libéraux (on ne supprime pas cet avantage en nature qui est très  prisé de leur électorat), et qui peut satisfaire les écologistes, puisque les objectifs climatiques sont pris en compte.

Deuxième indiscrétion dans le Morgen avec des extraits de la note sur la politique d’asile et de migration. “Les autorités publiques doivent mener un débat ouvert sur la migration, de manière objective et dans le respect des droits de l’homme ” est-il écrit en préambule. Et le journal d’épingler un durcissement des règles de regroupement familial. Mais à coté de cette mesure symbolique, il y a aussi la fin des centres fermés pour les familles, on n’enfermerait plus des enfants, pas de visite domiciliaires chez les citoyens qui hébergent des migrants et l’affirmation qu’un migrant en transit est d’abord la victime d’un trafic d’êtres humains. Trois considérations qui vont donc à l’encontre de la NVA.

Ce sont de petites touches. Pas de confédéralisme, une ambition climatique, et un respect des personnes migrantes. Prenez un peu de recul. Paul Magnette ne nous dit pas “je vais me passer de la NVA”. C’est trop tôt, il ne peut pas. Mais petite touche par petite touche, il est bel et bien de en train de nous brosser un arc en ciel

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26 novembre 2019 - 15h59
Modifié le 26 novembre 2019 - 16h11