Transition numérique dans l’administration à Bruxelles : la Cour valide la législation, sous conditions
Ce jeudi, la Cour constitutionnelle a rejeté le recours introduit par plusieurs associations, la CSC et la FGTB contre la législation bruxelloise relative à la transition numérique des services publics.
Les demandeurs estimaient que certaines dispositions portaient atteinte aux droits des personnes vulnérables, et en particulier, celles peu familières avec les outils numériques. Concrètement, cette législation, adoptée à la fois par la Région bruxelloise, la COCOF et la COCOM, permet aux services publics de proposer leurs prestations de manière numérique. Elle impose cependant le maintien d’une triple garantie non numérique : un accueil physique, un service téléphonique et des échanges par voie postale.
Les critiques portaient donc principalement sur la possibilité, prévue par la loi, de déroger à cette triple garantie, notamment en cas de charge jugée disproportionnée.
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Dans son arrêt, la Cour précise que ces dérogations ne sont légales que si deux conditions sont réunies : elles doivent rester non numériques, et assurer un niveau de service au moins équivalent à celui de la triple garantie initiale. Et même en cas de contraintes importantes, une autorité ne peut totalement renoncer à garantir un accès équivalent non numérique.
Ainsi, avec ces conditions d’interprétation, la Cour constitutionnelle conclut à l’absence de discrimination et estime que la protection des droits sociaux, culturels et des personnes en situation de handicap reste garantie.
Réactions
Le ministre bruxellois en charge de la Transition numérique, Bernard Clerfayt, a indiqué se réjouir de l’arrêt. Il “confirme la position défendue par le gouvernement”, assure-t-il: un citoyen doit avoir le droit “d’effectuer ses démarches via le canal de son choix”, le numérique “s’ajoutant” aux autres canaux. “C’est ce que nous avons toujours défendu: la digitalisation des services publics doit élargir le choix des citoyens, pas le restreindre. Le numérique s’ajoute, il ne remplace pas”, indique-t-il.
Du côté des requérants, on est également satisfait. “Même si la Cour indique que les arguments invoqués (…) ne sont pas suffisamment fondés, son interprétation valide les attentes de la société civile bruxelloise“, indique “Lire & Ecrire Bruxelles”. Elle confirme en effet “le refus du tout-numérique dans les administrations” et consacre le principe des “trois garanties cumulatives minimales”: guichet, téléphone, voie postale. L’association rappelle qu’elle ne s’opposait pas à l’intégralité du texte, mais bien aux possibilités d’exemption qui laissaient craindre que certaines administrations, sous prétexte par exemple d’une “charge disproportionnée”, puissent abandonner complètement l’accessibilité non-numérique. Elle a été rassurée sur ce point. L’arrêt “mentionne que les administrations bruxelloises ne peuvent pas se prévaloir d’une charge disproportionnée pour ne pas maintenir les guichets physiques, les services téléphoniques et la voie postale“, souligne l’organisation. L’enjeu est de taille: “36% des Bruxellois (et 70% des Bruxellois peu qualifiés) sont en situation de vulnérabilité numérique.”
Du côté d’Unia, on voit aussi là une victoire: “Cette décision, qui ne remet pas en cause la digitalisation des services publics dans son principe, constitue une victoire importante : elle réaffirme le droit des citoyens, quelles que soient leurs difficultés, à un accès égal aux administrations”, indique le directeur Patrick Charlier. “Il est temps que la région, et la Belgique dans son ensemble, aient une approche concertée sur la question et adopte une stratégie d’inclusion numérique ambitieuse.”
Rédaction avec Belga





