Caricature de Mahomet nu montrée à des élèves de Molenbeek : le Conseil d’État annule les décisions de la commune

aux sources du gai savoir molenbeek école 11

Le professeur d’éducation à la citoyenneté avait été écarté en octobre 2020, avant d’être réintégré deux mois plus tard.

Dans un arrêt rendu le 17 mars dernier et révélé ce jeudi par la RTBF, le Conseil d’État a annulé la sanction contre un professeur d’éducation à la citoyenneté de l’école 11 à Molenbeek. L’homme avait été écarté durant deux mois par le pouvoir organisateur de l’école, à savoir la commune de Molenbeek, pour avoir montré à des élèves âgés de 10 ans une caricature de Mahomet nu. L’incident s’était déroulé en octobre 2020.

La caricature en question était signée Coco, ancienne caricaturiste de Charlie Hebdo. Elle montrait le prophète de l’Islam, agenouillé, les fesses à l’air. C’est le caractère obscène de la scène qui avait poussé à l’époque la commune à prendre cette sanction : Personne n’a à montrer à des enfants de 10 ans les organes génitaux de qui que ce soit. C’est la seule raison pour laquelle une procédure est ouverte”, avait alors justifié la bourgmestre de Molenbeek Catherine Moureaux (PS).

La commune avait entendu le professeur en décembre 2020 avant de décider de le réintégrer au sein de ses écoles, moyennant un accompagnement avec la cellule pédagogique de la commune et les équipes mobiles de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

“Un contexte très particulier”

Le professeur avait entretemps introduit un recours au Conseil d’État contre cette sanction. Et celui-ci a donné raison au professeur dans son arrêt du 17 mars 2022. “Même si la partie adverse a finalement estimé que le requérant ne devait faire l’objet ni d’une mesure de suspension préventive, ni d’aucune procédure disciplinaire, ni même d’aucune mesure d’ordre dans l’intérêt du service, un enseignant qui, comme le requérant, a fait l’objet d’une telle mesure qui n’a pas été retirée par la partie adverse conserve un intérêt moral légitime, même minime, à ce que celle-ci disparaisse de l’ordonnancement juridique si elle a été adoptée irrégulièrement”, indique notamment le Conseil d’État.

“Le dossier administratif démontre que les faits reprochés au requérant ont pris place dans le contexte très particulier de l’élaboration et de l’enseignement d’un sujet très polémique. La partie adverse ne prétend pas que l’enseignement de tels sujets serait le lot quotidien du requérant. Au contraire, le dossier administratif laisse plutôt penser qu’il s’agit de situations survenant rarement. Dès lors, on aperçoit mal en quoi le fait que les griefs « à les supposer établis, sont susceptibles de révéler son incapacité à préparer avec une rigueur suffisante une leçon sur un sujet polémique, sans mettre à mal la sensibilité et la pudeur de jeunes élèves, et sans compromettre l’honneur et la dignité qui s’attache à sa fonction » nécessitait la mise à l’écart immédiate du requérant. La partie adverse ne prétend en effet pas que le requérant aurait été incapable de préparer adéquatement des leçons sur des sujets non polémiques”, ajoute l’institution.

Le Conseil d’État annule donc les décisions de la commune et réclame un payement de 920 euros à la commune, notamment pour les indemnités de procédure. La commune de Molenbeek, pour sa part, ne souhaite pas faire de commentaire.

Gr.I. – Photo : capture Google Street View