Une catégorie spécifique pour les athlètes transgenres ? Valérie Glatigny saisit la ligue francophone d’athlétisme
Les athlètes transgenres vont-elles bientôt disposer d’une catégorie spécifique ? L’idée émane de la ministre des Sports Valérie Glatigny (MR) qui souhaite ainsi réagir à la décision de la fédération internationale d’athlétisme de bannir les athlètes transgenres de ses compétitions féminines.
World Athletics, la fédération internationale d’athlétisme, a annoncé que les personnes transgenres ne seront plus acceptées dans les compétitions féminines dès le 31 mars. La fédération estime qu’il faut « protéger la catégorie féminine » d’un éventuel avantage physique des femmes trans par rapport aux femmes cisgenres (soit les femmes qui ont le même genre que celui assigné à la naissance).
Cette décision suit la tendance de nombreuses vidéos virales affirmant que des personnes transgenres gagneraient plus facilement des compétitions face aux femmes. Or, les exemples pris concernent souvent des compétitions mineures ou parmi les masters, soit des amatrices âgées de plus de 30 ans. Le seul exemple concret concerne Lia Thomas, une nageuse transgenre qui a gagné un titre universitaire aux États-Unis, mais elle est aujourd’hui classée au-delà du Top 25 des meilleures nageuses américaines.
La Fédération internationale d’athlétisme a donc décidé de prendre une mesure radicale, comme elle l’avait déjà fait avec Cece Telfern, athlète américano-jamaïcaine bannie des compétitions féminines après avoir gagné un titre universitaire aux États-Unis. Ou avec Caster Semenya, athlète hyperandrogène et considérée comme intersexe. Elle a été interdite de disputer des compétitions si elle ne suit pas un traitement pour faire baisser son taux de testostérone. Un traitement médicamenteux particulièrement difficile à supporter pour une telle sportive de haut niveau.
Aucun consensus scientifique
Pourquoi cette décision de World Athletics ? Car sur le plan scientifique, le Comité International Olympique (CIO) le dit lui-même : il n’y a à ce jour aucun consensus scientifique sur le lien entre un taux de testostérone élevé et performances sportives.
En effet, un taux de testostérone élevé permettrait d’avoir une plus grande musculature et un meilleur taux de récupération. Et selon certains, le fait d’avoir été un homme pousserait ce taux de testostérone vers le haut et serait un avantage pour les transgenres face aux femmes cisgenres.
Et pourtant, des études menées en 2014 à l’échelle internationale, et en 2021 au Royaume-Uni, montrent qu’au niveau des sports professionnels « qui demandent des capacités musculaires importantes, les preuves d’avantages potentiels de forts taux de testostérone sont rares ». Ces avantages seraient même “absents” dans des activités en zone aérobie, une zone d’endurance à intensité modérée.
Une chercheuse de l’université de Montréal, en 2019, a également montré que les athlètes féminines disposent d’un taux de testostérone bien plus élevé que les femmes en moyenne, et que les variations sont trop importantes entre les individus pour confirmer une tendance générale autour de ces taux.
D’autres sports ont pris des mesures particulières
Le CIO, pour sa part, a décidé de laisser aux fédérations le droit de choisir quel règlement appliquer. World Athletics a choisi cette voie de l’interdiction. Tout comme la FINA, la fédération internationale de natation, qui limite l’accès aux catégories féminines à des nageuses seulement devenues femmes avant la puberté, ce qui exclut une grande majorité de transgenres.
L’Union Cycliste Internationale se veut plus ouverte. Les cyclistes transgenres doivent prouver durant deux ans un taux de testostérone bas pour s’aligner dans la catégorie correspondant à la nouvelle identité de genre. Un taux de près d’1,5 microgramme par litre de testostérone dans le sang ne doit pas être dépassé pour pouvoir participer aux courses féminines. Plusieurs transgenres confirment que c’est l’une des solutions les plus simples pour leur permettre de quand même participer à des compétitions. Sans qu’elles dominent pour autant ces courses.
Quant à la proposition de Valérie Glatigny, qui a saisi la ligue francophone d’athlétisme sur ce sujet, l’idée semble louable pour permettre aux transgenres de tout de même participer à des compétitions. Mais des compétitions entre transgenres ne permettront pas de rétablir l’inégalité de traitement de ces athlètes, basée sur peu de faits scientifiques concrets.
■ Les explications de Grégory Ienco dans Le 12h30.