Victimes d’abus sexuels par l’Église : entre espoir et frustration avant une rencontre avec le pape à Bruxelles

Le pape sera à Bruxelles à la fin du mois. Une visite attendue par de nombreux catholiques, mais pour certaines et certains, c’est aussi l’occasion de se faire entendre.

Des victimes d’abus sexuels par des membres de l’Église vont rencontrer le pape François. Toutefois, tout le monde n’aura pas cette occasion. Pour décider qui sera choisi, l’Église organisait une rencontre, forte en émotions, ce samedi après-midi au centre-ville.

Enfants, ils ont subi des violences sexuelles de la part des membres de l’Église. Parmi les 80 survivants demandeurs d’un échange, une trentaine était présente.

La réunion, avec évêques et psychologues, a laissé les concernés mitigés. “J’étais très stressée, j’étais anxieuse… Cette réunion était censée m’apporter des réponses aussi par rapport à la venue du pape. C’est difficile en ce moment de pouvoir avoir les réponses que j’attends”, regrette Anne-Sophie Cardinal.

Pierre Englebert, survivant lui aussi, ne voit pas ce moment d’un très bon œil. “Je ressors avec un sentiment d’avoir participé à une espèce de casting déguisé qui ne dit pas son nom. Je vais encore passer une semaine en attendant la réponse”.

Quelques minutes à peine

Les participants pointent aussi un timing serré imposé par l’Église. “Il y avait la mise en place d’un canevas, qui n’était pas facile à tenir. La météo personnelle en une minute, forcément, ça déborde”, explique Pierre Englebert. “Lorsque la parole se libère, on est parfois un peu pris de court”, fait aussi remarquer Anne-Sophie Cardinal.

Il y a la communication qui pose problème à certaines victimes : “Je donne un exemple : dans l’email d’invitation, on parle seulement de l’abus, mais pas de l’abus sexuel”, déplore Aline Colaert.

Mais la rencontre papale reste importante pour ces survivants : “Je suis déjà soulagée d’avoir pu dire à quel point c’était important pour moi que cette rencontre ait lieu. Aussi bien pour la rencontre avec les autres victimes que d’envisager une rencontre avec le pape ultérieurement, je pense que ça va permettre, véritablement, de clore un chapitre avant d’en ouvrir un autre. Il s’ouvrira, je l’espère de tout cœur, vers quelque chose de positif pour tout le monde”, réagit Anne-Sophie Cardinal.

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Alain Cheval, lui, est simplement venu en soutien. Il a préféré ne pas prendre part au projet. “Il y a un choix qui va se faire. Un choix concernant l’individu et un choix concernant la question qui pourra être posée. Là, je ne suis pas d’accord du tout. Je pense qu’on cherche un petit peu à relativiser, à adoucir le propos et qu’on nous empêche vraiment de dénoncer ce qu’il s’est passé et ce qui se passe encore aujourd’hui”, répond-il.

L’Église, de son côté, ne fait pas de déclarations. Les survivants sauront la semaine prochaine qui seront les 6 francophones et 9 néerlandophones choisis pour rencontrer le pape à la fin du mois.

■ Reportage de Charlotte Verbruggen, Charles Carpreau et Djop Medou Mvondo