Vaccination : à peine 60% du personnel des maisons de repos a choisi de se faire vacciner

La semaine prochaine, les mesures d’assouplissement pourront prendre forme dans les maisons de repos bruxelloises à condition que 90% des résidents soient vaccinés. Quant au personnel, il reste encore très réticent à l’idée de se faire vacciner.

“Fin de mission de bénévolat dans la maison de repos bruxelloise dans laquelle j’allais donner un coup de main au personnel le weekend. Avec seuls 37% d’entre eux qui ont accepté la vaccination, je ne peux plus continuer à m’associer à la démarche, ni à prendre des risques.” Depuis septembre, Régis était bénévole dans une maison de repos à Woluwe-St-Lambert. Les week-ends, il venait aider à la désinfection des lieux mais dans cet établissement, un peu plus d’un tiers du personnel a accepté la vaccination. “Je me suis dit que je ne servais pas à grand-chose. Les travailleurs ne respectaient pas toujours les gestes barrières entre eux. Alors j’ai eu un sentiment de découragement.”

Malgré les campagnes de communication, le personnel des maisons de repos bruxelloises est toujours réfractaire à l’idée de se faire vacciner contre la covid-19. Aujourd’hui, Iriscare, l’organe bruxellois qui gère la vaccination dans les maisons de repos, n’est pas en mesure de nous donner des chiffres clairs sur le pourcentage de personnel vacciné.  “Dans les deux premières semaines de vaccination, quand on nous a dit qu’on pouvait faire 6 voire 7 doses avec un flacon, on a permis au personnel d’être vacciné mais comme cela n’était pas prévu dans le logiciel, ces personnes volontaires n’ont pas été répertoriées, explique Sven Heyndrickx, porte-parole d’Iriscare. Il y a aussi des gens qui viennent souvent dans les maisons de repos comme des kinés ou des coiffeuses qui ont pu être vaccinées mais eux non plus n’apparaissent pas dans les registres.”

Des registres incomplets

Du côté de Femarbel, la fédération des maisons de repos francophones, on nous explique aussi que le personnel n’habitant pas à Bruxelles, n’est pas non plus comptabilisé dans les chiffres bruxellois. En clair, personne ne sait avec précision qui a été vacciné ou non. “D’après les retours que nous avons de la part des directions ou des médecins coordinateurs, nous pensons que le taux est inférieur à celui de la Wallonie et de la Flandre”, ajoute Vincent Frédéricq, secrétaire général de Femarbel.

C’est pour cela que Bruxelles, contrairement à la Wallonie et à la Flandre, a décidé de ne pas conditionner le déconfinement des maisons de repos au pourcentage de vaccination au sein du personnel. Selon les estimations, on serait à une moyenne d’environ 60%. Dans les prochains jours, Iriscare va demander aux directions des maisons de repos de donner le registre de son personnel vacciné afin de savoir où nous en sommes.

Confinement : des assouplissements en vue dans les maisons de repos

Différence avec les résidents

Le groupe d’experts du GEM a recommandé que 80% des résidents et 70% du personnel soient vaccinés pour déconfiner. En Flandre, le taux pour le personnel est atteint contrairement à la Wallonie et à Bruxelles  Comme à Bruxelles, on sait qu’aucun établissement n’atteint les 70% pour son personnel, on a choisi d’augmenter le pourcentage chez les résidents.

En tant que médecin coordinateur, Michel Hanset dit ne pas avoir rencontré de réticence de la part des seniors. “Il y a eu peu d’effets secondaires mais effectivement, j’ai du mal à comprendre les réactions du personnel, surtout ceux qui ont reçu des formations en santé que j’espère de bonne qualité. Je n’ai fait qu’expliquer et encore expliquer qu’on n’injectait pas de puce 5G ou que ce n’était pas Bill Gates qui voulait nous contrôler, mais rien y fait. Dans les maisons de repos dans lesquelles je travaille, on est entre 40 et 50% de personnel vacciné.”

“Les résidents ont accepté très facilement la vaccination, raconte David Leisterh (MR), président du CPAS de Watermael-Boitsfort. Nous avons expliqué aux familles et nous avons aussi mené des campagnes de communication avec des webinaires auprès du personnel. Cependant, le vaccin n’est pas obligatoire.”

Même son de cloche du côté de la maison de repos du CPAS d’Evere. “Quand j’ai donné mon taux de vaccination du personnel, à savoir 58%, j’avais un peu honte, commente Sébastien Lepoivre (PS), président du CPAS everois. Mes collègues m’ont tout de suite demandé comment j’avais fait car certains n’arrivent pas à atteindre les 30%. Chez nous, 96% des résidents sont vaccinés. Le personnel a vécu la première vague et je vois qu’avec le temps qui passe, certains voudraient se faire vacciner. J’ai demandé si on pouvait organiser des séances de rattrapage. On me dit qu’on y réfléchit. Et quand je vois les ennuis que nous avons eus pour les 4 tours de vaccination, je m’inquiète.”

Des erreurs de logistique

Si Sébastien Lepoivre souhaite dire que dans l’ensemble la campagne s’est bien déroulé, il ne peut tout de même que constater certains manquements. “Nous avions dit à Iriscare que nous vaccinerions le 12 janvier. Nous devions recevoir 70 doses pour ce jour-là. Nous étions prêts mais nous avons reçu les doses le 12 au soir avec 5 seringues. La semaine dernière, pour la deuxième dose pour le personnel, nous avions besoin de 6 flacons. On nous en a livrés 4. Nous en avons récupéré 2 autres dans une maison à Boitsfort qui en avait reçus trop.”

Ces ennuis logistiques, les maisons de repos craignent les revivre assez prochainement. “Comment allons-nous faire pour vacciner les nouveaux résidents ou le personnel qui arrive ou qui a changé d’avis, s’interroge Vincent Frédéricq de Femarbel. Nous voudrions que le personnel soit prioritaire pour les centres de vaccination quel que soit le phasage en cours. Et pour maintenir le taux global de vaccination pour les résidents, il faudra aussi repasser.”

Chez Iriscare, on nous dit que des équipes mobiles seront envoyées prochainement dans les maisons de repos mais aucune nouvelle campagne d’information à destination du personnel n’est prévue. Et il est illégal qu’un employeur exige que son personnel se fasse vacciner.

Un argument pourrait être les chiffres de Sciensano. Depuis la deuxième injection, le nombre de décès en maison de repos ne cesse de diminuer. Cette semaine, il a encore baissé de 59% par rapport à la précédente.

Vanessa Lhuillier – Photo: BX1