Une école bilingue à Bruxelles, est-ce réalisable ? On en débat dans #M
Tous bilingues en l’an 2025? Peut-être, si l’appel des recteurs de l’ULB et de la VUB est entendu. Les deux académiques appellent de leurs vœux l’ouverture d’une école bilingue d’ici 2020. Mais comment l’organiser sur le plan juridique, institutionnel, pédagogique ? On en parle dans #M.
Effet d’annonce ou réel projet ? “Nous avons des groupes d’académiques qui ont des expériences dans ces domaines-là, nous avons une expérience d’avoir accompagné des écoles plurielles à Bruxelles et le rapprochement ULB/VUB qui est en route depuis plusieurs années nous a montré combien le clivage des langues est aujourd’hui dépassé”, explique Yvon Englert, recteur de l’ULB. “Bruxelles a besoin d’une formation en langue beaucoup plus forte que celle disponible aujourd’hui et les réponses à notre appel (…) montrent que nous arrivons dans un moment particulièrement favorable“, poursuit-il.
A la différence de l’école en immersion (langue maternelle et langue immersive), il n’y a pas dans le projet de l’ULB et de la VUB de langue dominante, toutes sont mises au même niveau, ce qui rend ce projet tout à fait innovant en Belgique.
D’après une étude réalisée par des chercheurs de l’UCLouvain et l’UNamur, l’impact de l’enseignement en immersion dans le processus d’apprentissage est positif. “Nous avons constaté que les résultats des élèves en immersion étaient égaux voire meilleurs pour les tests du CEB et du CESS“, explique Philippe Hiligsmann, chercheur à l’UCLouvain, qui se dit confiant dans le projet pédagogique d’une école bilingue.
Des obstacles juridiques à la création d’une école bilingue à Bruxelles
Afin de dessiner les contours juridiques de la création d’une école bilingue à Bruxelles, une étude a été commandée par la Région. On pourrait penser que ce type d’école relèverait de l’enseignement des communautés, mais il faut dire que Bruxelles est un lieu particulier sur le plan institutionnel avec une répartition des compétences délicates . “Une école bilingue, dans le sens constitutionnel du terme, c’est une école dans laquelle l’enseignement est délivré de manière paritaire dans les deux langues, avec des cours de néerlandais et de français à concurrence d’heures égales. Cela s’adresse de manière indéterminée à des élèves francophones, néerlandophones, bilingues ou allochtones“, détaille Joëlle Sautois, chercheuse au centre du droit public – ULB.
Mais le constat est là : le législateur compétent pour des écoles bilingues, ce ne sont pas les communautés mais le fédéral et cette information-là est plutôt surprenante. “La constitution est rédigée de manière telle qu’à Bruxelles, ce qui ne peut pas être rattaché exclusivement à la compétence d’une communauté revient au législateur fédéral“. Or, une école bilingue ne peut être rattachée exclusivement à la communauté flamande ou française, balle au centre donc.
La Ville de Bruxelles pourrait-elle ouvrir une école bilingue ?
Pour éviter de tomber dans les méandres constitutionnels, une solution pourrait être que la Ville de Bruxelles, qui s’est déjà dite enthousiaste à l’idée d’accueillir une école bilingue, prenne le relais. “Elle le peut“, affirme la chercheuse Joëlle Sautois, “elle peut aussi faire usage d’une disposition constitutionnelle qui organise tout ce qui est liberté d’enseignement (art.24) et qui implique un droit aux subventionnements d’un enseignement bilingue”. Le fédéral serait ainsi tenu d’accorder un subventionnement pour une école bilingue si la Ville de Bruxelles en faisait la demande.
Quid désormais de la possibilité d’ouvrir une telle école bilingue à la Ville de Bruxelles ? Un bachelier existe déjà pour former des instituteurs primaires bilingues entre la haute école Francisco Ferrer et l’Erasmushogeschool Brussel. “On est très soucieux d’avoir un corps enseignant qui a les compétences linguistiques mais aussi pédagogiques“, explique Emilie Dupont, directrice administrative de l’enseignement supérieur. Mais pour l’heure, tout est encore dans les cartons.
M.G.