Sécurité : la brigade Uneus a été dissoute mais son évaluation est toujours attendue

Police - Illustration Belga Siska Gremmelprez

Uneus, projet pilote de police proximité développé à Saint-Gilles, sera à nouveau au cœur d’interpellations au conseil communal ce soir. La brigade, qui a suscité plusieurs plaintes d’habitants, dénonçant ses actions musclées, attend toujours d’être évaluée. Mais entre-temps, elle a été dissoute. Par quoi sera-t-elle remplacée ?

Le collectif des Madres, des mamans de Saint-Gilles, rejointes au fur et à mesure par des travailleurs sociaux et des habitants, pour dénoncer des violences policières commises dans certains quartiers de la commune, interpelleront ce soir le bourgmestre Charles Picqué (PS). C’est la sixième fois qu’elles interviennent au sujet d’Uneus (Union pour un environnement urbain sécurisé). Projet-pilote de police de proximité, rassemblant plusieurs partenaires (police, prévention, jeunesse, …), il a été lancé en 2012 dans le but “d’améliorer le cadre et la qualité de vie” dans le bas de la commune.

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La brigade suscite rapidement l’indignation de certains habitants en raison de ses méthodes. Des jeunes dénoncent des violences, des humiliations, des contrôles abusifs. « C’est un projet-pilote, qui a amené de bons résultats sur le plan de la lutte contre la criminalité mais qui a suscité, il est vrai, des plaintes, qui ont été transmises au parquet. », nous dit aujourd’hui Charles Picqué. Y a-t-il eu des abus ? « Il se pourrait qu’il y ait eu parfois des maladresses verbales. Mais nous n’avons aucune preuve qu’il y ait eu des faits délictueux. Nous attendons les résultats de l’enquête judiciaire. »

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Uneus n’existe plus

Le projet devait être évalué en 2017. Outre les Madres, le Délégué général aux droits de l’enfant, Bernard De Vos, alerté par les témoignages de violences, et auteur d’un rapport sur le sujet en février 2018, demandait lui aussi la clarté, comme la Ligue des droits humains, qui réclamait une enquête indépendante.

Plus de trois ans plus tard, Uneus n’a toujours pas été évalué. Le travail d’évaluation est pourtant cette fois bien à l’agenda… pour peu que l’appel d’offre lancé par la commune pour un bureau d’étude trouve preneur. Mais entre-temps, le projet a été dissous. « Pour apaiser les esprits », reconnaît Charles Picqué. La brigade interne à Saint-Gilles n’existe plus en tant que telle, depuis plusieurs mois – sans que le bourgmestre ne nous dise depuis quand exactement – mais « a été pour l’instant fondue au sein de la division territoriale de la zone de police », qui regroupe aussi Forest et Anderlecht. Par quoi sera-t-elle remplacée ? Difficile de le savoir à ce stade. Que deviendront les équipes ? Des questions qui inquiètent certains, qui s’interrogent sur les missions qui seront confiées entre autres aux policiers qui étaient particulièrement visés par les plaintes.

Une évaluation, comment et pour quoi ?

L’information de la dissolution de la brigade laisse pantoise Julia Galaski, membre du collectif des Madres. « Cela n’a jamais été annoncé officiellement, alors que l’on continue depuis quatre ans de réclamer son évaluation ! », s’étrangle-t-elle. « Comment expliquer qu’aucune communication n’ait été faite ? Et qu’est-ce qui va être évalué si la brigade n’existe plus ? », poursuit-elle.

D’aucuns jugent cette évaluation toujours pertinente, dans l’objectif de tirer les leçons de l’opération. Le bourgmestre lui-même estime que l’expérience a déjà livré des enseignements : « Elle a très bien fonctionné à certains égards, mais l’une des erreurs que nous avons relevée par exemple, c’est une tendance à parfois mêler police de proximité et service judiciaire, ce qui a pu générer des tensions ».

Ce soir, les Madre seront d’autant plus attentives aux modalités et au cadre de l’évaluation à venir. Elles demanderont en particulier des gages de transparence : « Le contenu du cahier des charges suscite des inquiétudes, notamment sur la composition du comité de sélection et du comité d’accompagnement. Nous tenons à être rassurées sur le fait que les citoyens seront bien impliqués. ».

S.R. – Photo : Belga/Siska Gremmelprez