Evras: “Des conservateurs qu’on imaginerait opposés se retrouvent autour des mêmes inquiétudes”

Le décret Evras est au coeur de polémiques depuis son adoption au parlement. Cette animation d’éveil à la vie relationnelle, affective et sexuelle est fortement contestée dans certains milieux.

Dimanche entre 1500 et 2000 personnes se sont réunies à Bruxelles pour protester contre le guide de formation Evras. Parmi les manifestants, des parents mais aussi des représentants de l’extrême droite catholique et des personnes qui ont répondu à l’appel de plusieurs mosquées bruxelloises.

Mais voilà : les revendications ne s’arrêtent pas qu’au guide de formation Evras. Anti-LGBT, anti-genre ou encore anti-dépénalisation de l’avortement, ce sont les thèmes abordés par l’organisatrice lors de son discours en début de manifestation. Des sujets que l’on retrouve aussi dans les slogans d’oppositions qui eux pointent du doigt les associations féministes ou le Centre d’action laïque. Les organisateurs veulent défendre la « famille traditionnelle ancestrale » face à « l’idéologie pernicieuse » d’Evras.

Plusieurs pancartes visaient des drag-queens ou les personnes transgenres, considérées par les manifestants comme « anormales ». « Ne touchez pas à nos enfants » , « Pas de sexualité avant la puberté » pouvait-on lire.

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Complotistes, conservateurs, religieux, au-delà des groupuscules, des parents inquiets victimes d’une large campagne de désinformation autour du contenu du guide Evras via des tracts ou sur les réseaux sociaux.

Un screening de l’ensemble des sites internet relayant des informations sur le guide Evras a eu lieu ce week-end, a annoncé le premier ministre Alexander De Croo.

La semaine dernière, 8 écoles à Charleroi et Liège ont été incendiées. Des actes que la ministre de l’Éducation de la Fédération Wallonie-Bruxelles Caroline Désir qualifie de terroristes et criminels.

Invitée dans Bonjour Bruxelles, la ministre confie avoir été surprise de l’ampleur des réactions et s’inquiète de la tournure des évènements. “Quand il y a des manifestations où l’on tient des propos homophobes, transphobes, anti-politiques, complotistes, ce sont des discours répréhensibles.  L’Evras est un pur prétexte. Voir l’extrême droite et des représentants conservateurs des différentes religions, c’est inquiétant. Ce sont des campagnes de désinformation qui sont structurées et financées en partie de l’étranger. C’est une attaque de notre Etat de droit et une tentative de déstabilisation de notre Etat de droit. On a un travail de terrain de réinformation à faire en continu mais il faut que notre Etat se mobilise pour préserver ses valeurs fondamentales“.

Comment  expliquer que notre société soit si divisée sur ces questions de sexualité, de genre, comment comprendre ce clivage actuel ? Qui sont ces “anti-Evras”? Aurore Van de Winkel est collaboratrice scientifique à l’institut de langage et communication Docteur en Information et Communication à l’Université Catholique de Louvain. Elle a suivi le dossier depuis le départ et tente d’éclaircir les motivations de ces citoyens.

“L‘Evras permet de rassembler des adhérents qui ont une vision conservatrice de la société. Que ce soit des mouvements religieux ou laïques. C’est exploité par des minorités actives dans leurs discours ou des groupes de pressions dont l’idéologie est confortée par ces évènements. Ce sont des communautés qui ne se parlent pas toujours mais se retrouvent autour des inquiétudes face à une société qui change. Les personnes LGBT ont eu des droits et ont brisé des tabous et cela inquiète certaines personnes qui ne savent plus comment se positionner.”

Anaïs Corbin

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18 septembre 2023 - 13h50
Modifié le 18 septembre 2023 - 14h08