Procès des attentats de Bruxelles : la défense interroge les enquêteurs et les juges d’instruction

Procès des attentats de Bruxelles 22 mars 2016 - Box des accusés vide - Belga Jonathan De Cesare

Après le ministère public et les parties civiles, c’est au tour des avocats de la défense de poser des questions aux enquêteurs et juges d’instruction. Depuis le 21 décembre, les conseils des neuf accusés présents devant la cour d’assises “rongent leur frein” en attendant de pouvoir questionner les témoins.

Jeudi dernier et lundi matin, les procureurs fédéraux ont été les premiers à pouvoir interroger les responsables de l’enquête. Ils ont ainsi posé plusieurs questions sur l’enquête en général et puis accusé par accusé. Certaines de leurs demandes étaient très détaillées et ont demandé un certain travail de recherche aux enquêteurs.

La présidente de la cour, attentive à ce que le jury puisse suivre, a régulièrement dû reformuler ou répéter les questions ou y apporter un élément de contexte. Laurence Massart a d’ailleurs noté lundi que le jury “ne semblait pas aussi concentré que d’habitude“.

Lundi après-midi, les parties civiles ont pris le relais, posant surtout des questions sur les accusés ayant renoncé aux attaques. Les noms de Salah Abdeslam, Mohamed Abrini et Osama Krayem ont ainsi souvent été cités.

Désormais, c’est le tour des avocats de la défense d’interroger les enquêteurs et juges d’instruction et de revenir sur leur exposé débuté le 21 décembre et clôturé jeudi dernier, le 9 février.

Mi-janvier, plusieurs avocats de la défense avaient demandé à pouvoir interroger les témoins plus rapidement, à l’issue de chaque audience ou de chaque thématique. La présidente avait refusé cette requête, préférant maintenir tel quel le calendrier.

La défense de Mohamed Abrini sera la première à dégainer ses questions, suivie de celles d’Osama Krayem et de Salah Abdeslam.


11h59 – Abrini : un accusé en retrait des attentats, selon sa défense

Pendant les deux premières heures de l’audience, mardi matin, Me Laura Pinilla a attiré l’attention des enquêteurs, juges d’instruction et autres témoins du Service de déminage de l’armée (Sedee) sur nombre de détails de leurs témoignages respectifs livrés entre le 21 décembre et le 9 février.

Elle a ainsi relevé certaines contradictions. Rappelant les problèmes de sommeil de son client, elle a pointé le fait que du Nustasium, un médicament aidant à l’endormissement, a bien été retrouvé dans l’appartement de la rue Max Roos, alors que les enquêteurs avaient indiqué le contraire à la barre. En atteste une photo de divers objets retrouvés sur place par la police.

Tandis que lundi, le procureur fédéral a semblé mettre en doute que le but du voyage de Mohamed Abrini en Syrie à l’été 2015 était de se rendre sur la tombe de son frère cadet, décédé en Syrie quand l’accusé était incarné, l’avocate a renvoyé à une analyse de SMS échangés entre son client et sa compagne de l’époque. Cette dernière y indique avoir “toujours entendu que Mohamed voulait aller sur la tombe de son frère car il n’a pas vraiment pu faire son deuil, étant donné qu’il était en prison” au moment du décès.

Me Pinilla a ensuite demandé de revoir l’audition filmée du taximan qui conduisit les kamikazes Ibrahim El Bakraoui et Najim Laachraoui ainsi que son client à l’aéroport de Zaventem, le matin des attentats. Elle a ainsi souligné que, selon le témoignage du chauffeur, c’est Mohamed Abrini qui est resté silencieux durant le trajet. L’exposé de l’enquête avait plutôt pointé le silence de Najim Laachraoui, affirmant que Mohamed Abrini avait, lui, acquiescé aux propos anti-américains tenus par Ibrahim El Bakraoui.

Concernant la conception du TATP, l’explosif utilisé tant à l’aéroport que dans la rame du métro bruxellois le 22 mars 2016, le conseil de “l’homme au chapeau” a souligné que les connaissances en la matière de son client se bornaient à une simple répétition de ce que celui-ci avait pu apprendre auprès de Najim Laachraoui, l’artificier de la cellule terroriste.

L’avocate est également revenue sur la position du sac abandonné par Mohamed Abrini à l’aéroport: à l’horizontal, tandis que les deux kamikazes ont posé le leur à la verticale pour, a priori, infliger des dégâts plus importants.

Me Pinilla a souligné que son client y était “à la traîne“, ses comparses devant le “ramener” à eux à deux reprises. Elle s’est donc demandée, à l’adresse du jury, si son client n’était pas “un fardeau pour les deux autres ce jour-là“, insinuant que Mohamed Abrini s’était rendu à reculons à Zaventem, avant de finalement renoncer à se faire exploser et de prendre la fuite une fois que les deux kamikazes eurent déclenché leur charge explosive à 07h58, tuant 16 personnes et en blessant de nombreuses autres.


14h31 – La défense d’Abrini affirme que les fouilles à nu expliquent son absence

Les conditions de transfert des accusés détenus – et les fouilles à nu qui vont de pair – au procès des attentats à Bruxelles du 22 mars 2016 expliquent l’absence de Mohamed Abrini à l’audience depuis plusieurs semaines. C’est ce qu’a affirmé mardi Me Stanislas Eskenazi, qui représente “l’homme au chapeau” avec Me Laura Pinilla, à la présidente de la cour Laurence Massart.

“Comment expliquez-vous que M. Abrini n’assiste pas à l’audience ?”, a adressé cette dernière au conseil de l’accusé. Mohamed Abrini demande en effet depuis plusieurs semaines, en début d’audience, à retourner au cellulaire. Il n’a pas dévié de sa position même lorsque les enquêteurs ont brossé son portrait devant la cour, le 1er février, ni ce mardi pour assister aux questions que ses avocats attendent pourtant de poser depuis de longues semaines pour le défendre. C’est en cela que le dossier des conditions de transfert est directement lié au procès d’assises, lui a répondu Me Eskenazi.

Mohamed Abrini, lors du procès des attentats du 22 mars 2016 – Dessin : Belga/Jonathan De Cesare

Depuis le début du procès, les accusés détenus dénoncent leurs conditions de transfert depuis la prison de Haren, où ils sont incarcérés sous haute sécurité, vers le Justitia, situé non loin, où se tient le procès. Une procédure en référé a été engagée par leurs avocats et, le 29 décembre, le tribunal civil de Bruxelles siégeant en référé (une autre juridiction, donc) a interdit les fouilles à nu systématiques et non motivées, au motif qu’elles constituent des traitements dégradants. L’État belge, contraint de faire cesser la pratique, a fait appel. Toutefois, la décision du juge des référés est effective. Or, selon la défense des accusés, elle n’est pas respectée par le service de la DAP (Direction Protection), au sein de la police fédérale, qui est chargée des transferts des détenus.

Ce “ressenti” d’injustice, “c’est en cela que la question relève aussi de votre juridiction”, a insisté Me Eskenazi, alors que la présidente rappelle pour sa part régulièrement que la cour d’assises n’est pas compétente pour se prononcer sur les conditions de transfert. “Le fait de leur imposer ce régime-là (les fouilles à nu, NDLR) leur ôte l’envie de se défendre”, a poursuivi l’avocat. Le pénaliste a ensuite souligné le contraste entre le mutisme de Mohamed Abrini au Justitia et sa présence régulière au procès des attentats du 13 novembre 2015 à Paris.

L’accusé a opposé le silence à ses interlocuteurs “chaque fois qu’il a eu l’impression qu’on lui faisait un coup tordu. C’est sa manière de réagir et de faire valoir ses droits”, a résumé sa défense. “Je l’ai vu pendant un an à Paris répondre aux questions qui lui étaient posées, se lever quand on le lui demandait, s’asseoir quand on le lui demandait. J’ai même vu des victimes saluer ces hommes”, a lancé l’avocat en se tournant vers le box de verre, où n’étaient plus présents mardi que quatre accusés détenus, à savoir Hervé Bayingana Muhirwa, Bilal El Makhoukhi, Ali El Haddad Asufi et Sofien Ayari.


14h53 – La défense d’Abrini doute des testaments qui lui sont attribués

Les avocats de Mohamed Abrini ont émis, par de très nombreuses questions, des doutes sur les testaments attribués à leur client et qui ont été retrouvés dans un ordinateur utilisé par les terroristes responsables des attentats à Bruxelles le 22 mars 2016. D’après eux, “l’homme au chapeau” n’en est pas l’auteur – ce qu’il a pourtant reconnu -, mais ils sont de la main du kamikaze du métro Khalid El Bakraoui, ont voulu démontrer ses conseils par leurs questions aux enquêteurs et juges d’instruction.

L’un des fichiers est intitulé “Lettre à Nawal” et a été retrouvé dans le PC de la rue Max Roos à Schaerbeek. L’ex-compagne de Mohamed Abrini porte ce prénom, tout comme la veuve de Khalid El Bakraoui, qui s’est fait exploser à Maelbeek. Au lendemain des attaques, les enquêteurs et juges d’instruction avaient attribué la paternité de ce testament au kamikaze du métro. Ils n’avaient pas encore connaissance de l’implication de Mohamed Abrini et la seule Nawal apparaissant dans le dossier était l’épouse de Khalid El Bakraoui. Durant la préparation de leur témoignage devant la cour d’assises, les enquêteurs et juges d’instruction ont cependant conclu que le document devait être attribué à Mohamed Abrini.

Dans ses auditions, ce dernier a reconnu qu’il avait commencé à rédiger ses testaments en janvier 2016, alors qu’il se trouvait dans la plaque de la rue du Dries à Forest. Son but, selon lui, était alors de ne pas éveiller les soupçons de ses compagnons quant à un désistement. En février, il s’installe ensuite rue Max Roos à Schaerbeek. Les testaments de tous les kamikazes devaient être transmis à l’organisation terroriste État islamique (EI) par la suite.

Immeuble Rue du Dries Arrestation Salah Abdeslam - Belga Bruno Fahy
L’immeuble de la rue du Dries, à Forest – Photo : Belga/Bruno Fahy

Interrogés par Me Laura Pinilla, l’avocate de l’accusé, les enquêteurs ont répondu que les fichiers informatiques correspondant aux testaments de l’intéressé n’avaient plus été ouverts entre le 8 et le 15 mars, période pendant laquelle Mohamed Abrini a séjourné à Schaerbeek. Ils ont ensuite été ouverts le 20 mars, mais il n’est pas sûr que “l’homme au chapeau” se trouvait bien dans l’appartement ce jour-là. Les fichiers l’ont encore été une dernière fois à 05h07 le jour des attentats, alors que Mohamed Abrini lui-même a déclaré qu’il avait alors eu deux heures de retard pour la prière du matin car il dormait, est-il ressorti des réponses aux questions de l’avocate.

Pour Me Pinilla, plusieurs éléments contenus dans la lettre peuvent également faire écho à la situation de Khalid El Bakraoui. Mais certains correspondent aussi à Mohamed Abrini, lui ont répondu les enquêteurs. Il n’y a en outre pas vraiment de raison que le futur kamikaze écrive cette lettre puisqu’il avait déjà fait parvenir un courrier à son épouse, comme en atteste une audition de l’accusé Osama Krayem.

S’adressant à l’islamologue Mohamed Fahmi, qui travaille aux côtés de la DR3, l’unité anti-terroriste de la police judiciaire fédérale, l’avocat Stanislas Eskenazi a ensuite posé plusieurs questions sur la manière dont l’EI pourrait considérer la situation de son client, Mohamed Abrini. “Les relations hors mariage sont-elles bannies dans le cadre de l’EI ?”, a demandé l’avocat, sachant que l’accusé et son ex-compagne n’étaient pas mariés. “Oui, elles sont sévèrement réprimées”, lui a répondu l’expert. “Si je fais partie d’une cellule de l’EI et que je dois faire un testament, vais-je le faire pour une compagne qui n’est pas mon épouse ?”, a questionné Me Eskenazi. S’il n’y a pas de lien de mariage ou de fiançailles, “cela paraît effectivement étrange si l’auteur du testament a adhéré à l’EI“, a pointé l’islamologue. Le conseil de Mohamed Abrini a également évoqué la question de la défection de son client le jour des attentats. “Comment est sanctionné le crime d’apostasie, soit le fait de renier sa religion ?”, a-t-il demandé. Il y a un consensus pour dire qu’il est puni de la peine de mort au sein de l’État islamique, selon Mohamed Fahmi.


17h24 : Osama Krayem a collaboré à l’enquête, quitte à s’incriminer lui-même, relève sa défense

L’accusé Osama Krayem a pleinement collaboré à l’enquête, au point de s’incriminer lui-même, a relevé mardi son avocate Me Gisèle Stuyck devant la cour d’assises de Bruxelles chargée de juger les attentats du 22 mars 2016.

Celui qui n’était âgé que de 23 ans au moment des attentats a notamment rapidement conduit les enquêteurs à la planque de l’avenue des Casernes, à Etterbeek. “Est-ce courant, en matière de terrorisme, de dévoiler une planque et d’autres éléments de cette importance ?”, a demandé son avocate aux juges d’instruction. Rappelant qu’une enquête pour des attaques de cette ampleur n’était pas “courante“, les témoins se sont néanmoins tous accordés sur la coopération d’Osama Krayem.

Il a beaucoup parlé“, que ce soit lors de ses auditions pour le dossier des attentats de Bruxelles, celui des attaques du 13 novembre 2015 ou dans le volet “Paris bis”. “Il s’est montré très collaboratif et n’a jamais montré d’agressivité envers les enquêteurs“, a acquiescé le juge d’instruction Olivier Leroux. Toutefois, “certains vont voir un intérêt à communiquer des éléments“, pour faire tomber des adversaires, se faire bien voir de la police, a nuancé M. Leroux.

Sur quoi Me Sluys a rebondi, soulignant que l’intérêt de son client était nul, vu qu’il a tenu des propos incriminants pour lui-même également.

La juge d’instruction Berta Bernardo Mendez, qui a également auditionné Osama Krayem, voit dans l’attitude de l’accusé “un sentiment de fatalisme: j’ai joué, j’ai perdu“.


17h31 : Salah Abdeslam devait se faire exploser dans un café le soir du 13 novembre 2015

La défense de Salah Abdeslam a, à son tour, pris la parole mardi après-midi afin d’interroger les enquêteurs et juges d’instruction. Dans ses premières questions devant la cour d’assises, Me Delphine Paci est surtout revenue sur les attaques à Paris du 13 novembre 2015, où son client devait se faire exploser dans un café – et non au stade de France -, puis sur l’évolution de l’accusé à son retour en Belgique.

L’avocate a d’abord fait confirmer aux témoins que son client, qui était initialement un fêtard et ne s’est intéressé que sur le tard à la religion, ne s’était pas rendu en Syrie, au contraire de son grand frère Brahim, l’un des kamikazes du commando des terrasses parisiennes. Salah Abdeslam a toutefois été auditionné par la police belge pour des suspicions de volonté d’un tel voyage.

Le soir du 13 novembre 2015, l’accusé était censé déclencher sa ceinture dans un café après avoir déposé les kamikazes au stade de France, a révélé Delphine Paci mardi. Un élément encore inconnu par la cour d’assises bruxelloise jusqu’à présent, mais qui figure dans l’arrêt de la cour d’assises de Paris. Durant le procès en France, Salah Abdeslam a en effet apporté cette information, contredisant une de ses rares déclarations, où il affirmait qu’il devait actionner sa ceinture explosive devant le stade de France.

L’expertise a, par la suite, révélé que cette ceinture était défectueuse et l’enquête n’a pu déterminer si l’accusé avait ou non tenté de l’actionner.

Cette nuit-là, pour la cellule (terroriste), il devait mourir“, a résumé l’avocate, faisant ensuite confirmer par les enquêteurs que son client n’avait pas été accueilli très chaleureusement à son arrivée dans la planque de l’avenue Henri Bergé à Schaerbeek.

Salah Abdeslam est, de plus, revenu en Belgique avec des personnes n’ayant rien à voir avec l’organisation des attentats de Paris, a pointé Delphine Paci.

Tant dans la planque schaerbeekoise que dans la suivante, celle de l’avenue de l’Exposition à Jette, aucun élément pour la confection d’explosifs en vue des attaques à Bruxelles n’a été retrouvé, ont reconnu les enquêteurs et juges d’instruction. L’arrêt de la cour d’assises de Paris affirme pour sa part que des explosifs ont été confectionnés aux deux adresses, mais en vue des attentats du 13 novembre.

Après ses séjours à Schaerbeek et Jette, Salah Abdeslam a été emmené à l’appartement de la rue du Dries à Forest, où est survenue une fusillade le 15 mars 2016. Mohamed Belkaïd y perdra la vie dans l’affrontement avec les policiers, pendant que Sofien Ayari et Salah Abdeslam prennent la fuite.

Pourquoi les enquêteurs n’ont-ils pas dressé le portrait de Mohamed Belkaïd dans le cadre de ce procès devant la cour d’assises ?“, leur a demandé Me Michel Bouchat, l’autre avocat de Salah Abdeslam. Si une présentation devait avoir lieu, c’est dans le cadre du procès pour les faits du 15 mars, ont répondu les juges d’instruction. “Je note cette réponse“, a conclu l’avocat.


18h03 : l’avocate d’Osama Krayem suggère un début de désengagement chez son client

La défense d’Osama Krayem a esquissé, au fil de ses questions mardi aux juges d’instruction et enquêteurs devant la cour d’assises de Bruxelles, la possibilité que l’accusé ait commencé à abandonner l’idéologie de l’organisation terroriste État islamique. L’homme avait finalement renoncé à se faire exploser lors des attaques terroristes.

Le Suédois est le seul des cinq kamikazes désignés à ne pas avoir rédigé de testament. “Pourquoi ?“, s’est d’abord interrogée Me Stuyck. D’un point de vue religieux, “rien ne vous oblige à rédiger un testament“, a répondu l’islamologue Mohamed Fahmi, qui apporte son expertise à la DR3, l’unité anti-terroriste de la police judiciaire fédérale. “Mais concrètement, la logique derrière (la rédaction d’un testament) est de médiatiser l’acte. (L’État islamique) essaie d’avoir une trace, la motivation du martyr.”

Alors que l‘accusé Mohamed Abrini a déclaré en audition avoir rédigé son testament pour ne pas éveiller les soupçons des autres membres de la cellule quant à la possibilité qu’il abandonne sa mission-suicide, “n’était-ce pas suspect qu’Osama Krayem ne se plie pas à cet exercice ?“, a poursuivi la pénaliste. “Généralement, le fait d’être un vétéran du djihad rassure dans ces milieux-là“, a répondu précautionneusement l’islamologue. Parti en Syrie à l’été 2014, Osama Krayem restera un peu plus d’un an en Syrie, où il combattra et sera blessé. Il participera notamment à l’exécution filmée et mise en scène d’un pilote de l’armée jordanienne par l’EI.

Dans des auditions remontant à 2017 et 2019, son client explique notamment qu’après la guerre, il n’a “plus de sentiments à exprimer“, même à sa famille, et que cela le “dérange beaucoup“, a lu son conseil à la cour.

Avant la guerre, j’étais très ouvert envers les gens. J’aidais, je n’étais pas agressif, j’avais besoin de réflexion avant d’agir. Je me sens perdu, je ne sais pas comment faire pour (¿) redevenir l’homme que j’étais avant.De là à entrevoir un début de désengagement chez celui qui estime à 80% son engagement “inconditionnel” pour l’EI et à 20% ce qui lui appartient encore (son espace de liberté pour exprimer ses propres convictions)? Un pas que l’islamologue Mohamed Fahmi ne s’est pas risqué à franchir.


18h41 : la défense d’Abdeslam souligne qu’il n’est pas impliqué dans les attentats du 22 mars 2016

Dans plusieurs de ses questions aux enquêteurs et juges d’instruction, la défense de Salah Abdeslam s’est attachée à démontrer que l’accusé n’avait pas été impliqué dans les préparatifs des attentats qui ont touché la capitale belge le 22 mars 2016.

Elle a souligné que Salah Abdeslam et Sofien Ayari avaient rapidement pris la fuite après l’arrivée de la police le jour de la fusillade rue du Dries à Forest, le 15 mars 2016. Tous deux avaient alors refusé de combattre les forces de l’ordre, perdant un GSM et se défaisant de leur arme sur leur chemin de fuite, a rappelé l’avocate, faisant confirmer ses dires par les enquêteurs et juges d’instruction.

Salah Abdeslam a ensuite pris contact avec un de ses cousins pour l’héberger, ainsi que son comparse Sofien Ayari, dans une cave à Molenbeek-Saint-Jean, rue des Quatre Vents, où sa cavale prendra fin le 18 mars 2016.

Il ressort de plusieurs auditions, notamment de celle de ce cousin qui a accueilli les deux hommes, que Salah Abdeslam ne savait pas où se trouvait Mohamed Abrini à ce moment-là et qu’il n’avait pas de contacts avec les autres membres de la cellule terroriste.

D’après les éléments du dossier et les déclarations des autres accusés relayés par les juges d’instruction à la demande de Me Paci, Salah Abdeslam ne connaissait pas la planque de la rue Max Roos à Schaerbeek, ni celle de l’avenue des Casernes à Etterbeek, ni celle de la rue du Tivoli à Laeken.

Aucun élément de l’enquête n’a permis d’attester un passage de Salah Abdeslam par l’appartement conspiratif de la rue Max Roos, ont encore reconnu les juges d’instruction devant la cour d’assises mardi.

Avec Belga – Dessin: Belga / Jonathan De Cesare