Procès des attentats de Bruxelles : les accusés se livrent sur leur vision des faits et leur regard sur l’avenir

Place au ressenti des accusés dans cette nouvelle journée de témoignages. La cour tente de connaître les motivations personnelles qui ont poussé les terroristes à s’engager dans les rangs de l’EI puis commettre les attentats de Zaventem et de Maelbeek le 22 mars 2016.

Quel était le but des attentats en Europe ? Cette question centrale a été mercredi au cœur de l’interrogatoire des accusés. Cela passe notamment par des questions sur la Syrie, afin de mieux cerner la personnalité et le parcours de chacun. Cette partie est abordée afin de livrer des éléments de contexte, la cour n’étant pas saisie pour juger les départs de certains accusés en Syrie.

L’audience de ce mercredi s’est également attardée sur leurs arrestations respectives et l’hébergement offert par Hervé Bayingana Muhirwa à Osama Krayem, à son domicile de Laeken, après les attentats. La présidente de la cour d’assises de Bruxelles, Laurence Massart, s’est aussi ‘intéressée au passage des frères Farisi à l’appartement des Casernes, à Etterbeek, pour le vider de son contenu après les attaques.

La cour a terminé l’audition des accusés par deux questions finales : leur vision des faits à l’heure actuelle et leur regard sur l’avenir. C’est la première fois que les accusés se livrent autant depuis le début du procès, à l’exception d’Osama Krayem qui a fait le choix de rester en cellule depuis le début des interrogatoires.

La journée de jeudi sera consacrée aux questions des procureurs fédéraux, suivies de celles des parties civiles et de la défense.

Rappel des faits, profils des accusés, témoignages de victimes : notre dossier sur les attentats de Bruxelles

■ Duplex depuis le Justitia de Camille Tang Quynh et Nicolas Scheenaerts

 


Revisionnez le déroulé de cette journée d’audience ci-dessous :


11h02 – Son passage en Syrie a été “un point de bascule” pour Sofien Ayari

Le départ de Sofien Ayari pour la Syrie a été “un point de bascule”, a raconté mercredi l’accusé devant la cour d’assises de Bruxelles chargée du procès des attentats du 22 mars 2016. L’homme a expliqué qu’il ne voulait pas attaquer le mode de vie européen et que son arrivée en occident avait été provoquée par ce qu’il avait vu en Syrie.

“Quand je suis parti de chez moi (en Tunisie, NDLR), je suis parti en Syrie, je ne suis pas venu ici”, a expliqué Sofien Ayari. “Ce que j’ai vécu personnellement là-bas a changé quelque chose en moi. Des amis sont morts dans mes bras, j’ai vu des corps déchiquetés, mais voilà, c’est la guerre, c’est comme ça, c’est une logique que je peux comprendre.” “Mais quand j’ai été blessé, on m’a emmené à l’hôpital à Raqqa et ce que j’ai découvert là-bas a été un point de bascule. Ce n’était plus la guerre, c’était autre chose, c’était des bombes qui tombaient sur des hommes, des femmes, des enfants,…”, a-t-il poursuivi. “Je n’ai jamais ressenti une haine pareille. J’avais le cœur brisé comme vous dites ici. J’étais fou de rage.”

Et l’accusé d’évoquer le témoignage du président français de l’époque, François Hollande, au procès des attentats de Paris. “Il a dit qu’il n’y avait pas de victimes civiles (en Syrie, à la suite des frappes de la coalition internationale, NDLR) à sa connaissance ! C’est prendre les gens pour des débiles ! J’ai l’impression qu’on ne condamne que d’un seul côté. Il faut que chacun prenne ses responsabilités.” “Regardez tout ce qu’on a fait ici après les attentats, les procès… Combien y a-t-il eu de procès pour les morts en Syrie et en Irak ? Ça en dit long sur la valeur de la vie humaine”, a conclu Sofien Ayari.

Sofien Ayari / Dessin : Jonathan De Cesare 


11h32 – Laachraoui était en Europe pour arrêter les bombardements en Syrie, selon El Makhoukhi

Quel était le but des attentats en Europe ? Cette question centrale a été mercredi au cœur de l’interrogatoire des accusés du procès des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles. Selon Bilal El Makhoukhi, l’objectif de Najim Laachraoui, l’un des kamikazes de Zaventem, était d’appliquer la loi du talion (principe de réciprocité du crime et de la peine, NDLR) et de faire quelque chose pour arrêter les bombardements de la coalition internationale en Syrie.

“La première fois que j’ai revu Najim Laachraoui en Belgique, j’ai dit que je voulais bien lui apporter mon aide, mais que je comptais repartir en Syrie”, a raconté l’accusé. “Il m’a dit ‘les bombardements sont sans pitié’. Il m’a dit avoir vu des corps de femmes et d’enfants déchiquetés, qu’ils n’en avaient rien à foutre de tuer des innocents. Najim Laachraoui a fait ce qu’il a fait, mais ce n’était pas un menteur.” “Il pensait qu’il n’y avait pas de raison que les pays qui font ces choses en Syrie ne subissent pas la même chose”, a décrit Bilal El Makhoukhi. “Il était en Europe pour appliquer le talion et pour faire quelque chose afin d’arrêter les bombardements.” “Les bombardements c’est aussi de la terreur”, a ajouté l’accusé. “Ces bombes ont tué plus de civils en Orient que les attentats en occident.”

L’homme a en revanche affirmé que, jusqu’au 22 mars 2016, il n’avait aucune idée du moment où Najim Laachroui allait passer à l’attaque, ni quelles allaient être ses cibles.

Bilal El Makhoukhi / Dessin : Jonathan De Cesare

De son côté, Mohamed Abrini a avancé que, selon lui, les attentats étaient effectivement une réponse aux bombardements. “Mais je pense que les attentats n’arrêteront pas les bombardements et que les bombardements n’arrêteront pas les attentats”, a-t-il déclaré, avant d’ajouter que Najim Laachraoui était dans l’optique de perpétrer autant d’attaques que possible en Europe.


12h38 – En Syrie, Bilal El Makhoukhi faisait “abstraction de toute émotion”

Lors de son séjour en Syrie, Bilal El Makhoukhi, qui se retrouve rapidement au front, a fait “abstraction de toute émotion”, a-t-il déclaré mercredi devant la cour d’assises. “Je faisais tout pour pouvoir me déconnecter de ce que je voyais. Sinon, je n’aurais pas pu dormir. C’est la guerre, c’est comme ça.”

Bilal El Makhoukhi a rejoint la Syrie en octobre 2012 sous l’influence de l’organisation Sharia4Belgium et y est resté un peu plus d’un an. Son intention était “d’aider des musulmans face au régime (de Bachar el-Assad)“, a-t-il déclaré mercredi. Sur place, il part au combat pratiquement sans formation. “J’ai tiré deux fois et j’ai été au front.

L’accusé a raconté avoir perdu un ami proche dans des affrontements et avoir retrouvé son corps mutilé par l’armée du régime.

Par la suite, Bilal El Makhoukhi est grièvement blessé à la jambe droite par un tir, c’est d’ailleurs ce qui le pousse à regagner la Belgique en décembre 2013.

Malgré les scènes difficiles et les violences auxquelles il a été confronté, l’accusé s’est souvenu avoir “pleuré comme un bébé” au moment de quitter la Syrie. “J’ai passé les meilleurs moments de ma vie en Syrie, bien que c’était dur. Je me sentais plus vivant là-bas. Je sentais que je servais à quelque chose.”

Je n’aurais pas échangé une vie de château contre ma vie là-bas.”

Sofien Ayari, de son côté, a admis ne pas “être en paix avec tout”, en référence à son vécu en Syrie. Il s’est souvenu de son séjour à la prison de Lantin, située à une dizaine de kilomètres de l’aéroport de Liège. “Chaque fois qu’un avion passait, je serrais les dents. Ça fait remonter des choses. Ça prend beaucoup de temps pour pouvoir les contrôler, pas les oublier.”


14h21 – “Pris dans un engrenage”, Bayingana Muhirwa a accepté d’héberger encore Krayem et Abrini

Le jour des attentats, alors que Mohamed Abrini puis Osama Krayem sonnent à sa porte, Hervé Bayingana Muhirwa va accepter d’héberger une nouvelle fois les deux hommes tout en sachant que ce sont des fugitifs. “Vous êtes pris dans un engrenage, vous êtes dépassé, vous êtes perdus Ils vont me demander de les héberger et j’ai accepté”, a reconnu l’homme.

“Vers midi Mohamed Abrini sonne à la porte, mon parlophone ne fonctionne pas donc je vais ouvrir sans savoir qui c’est. Quand je le vois, je fais directement le lien avec Najim Laachraoui. Là, je suis toujours sous le choc de la nouvelle des attaques et je le laisse rentrer de peur que des gens dans la rue le reconnaissent”, a poursuivi l’accusé. “Quand Krayem arrive, plus tard, ils sont surpris de se voir l’un l’autre.” “Ils vont me demander de les héberger, pas dans l’optique de préparer quelque chose d’autre, mais dans l’optique de trouver une autre solution pour se loger. Ils me demandent deux ou trois jours”, a ajouté celui à qui on reproche justement d’avoir hébergé des membres de la cellule terroriste.

“Quoi qu’ils m’aient demandé, je l’aurais fait. Je regrette de ne pas avoir averti les autorités, mais c’est un engrenage, j’avais peur de la police, d’être pris en leur compagnie, car ce sont des fugitifs.” “À ce moment-là, vous n’êtes pas bien, vous êtes stressés, sous le trauma des attentats. C’est trop, vous êtes dépassé, vous êtes perdu. J’essaie de couper les contacts avec mon entourage pour éviter que quelqu’un se rende compte de quelque chose”, a conclu Hervé Bayingana Muhirwa.

Ce dernier sera arrêté le 8 avril en alors qu’il conduit Osama Krayem dans le quartier du midi à Bruxelles, pour que le Suédois rejoigne son frère. Mohamed Abrini a, lui, abondé dans le sens de son logeur. “Il n’y avait aucun plan de repli, la seule adresse que je connaissais c’était Hervé, c’est le seul endroit où je pouvais aller. Je ne suis pas resté trop longtemps, car je voyais bien que ça le gênait, qu’il n’était pas à l’aise. Je suis parti après même pas deux jours et je l’ai laissé avec Krayem.”

Les avocats Juliette et Vincent Lurquin et leur client Herve Bayingana Muhirwa. Dessin : Belga/Jonathan De Cesare

14h44 – Salah Abdeslam estime que le gouvernement doit “reconnaître sa part de responsabilité”

Salah Abdeslam a déclaré mercredi devant la cour d’assises de Bruxelles que le gouvernement belge devait “reconnaître sa part de responsabilité” voire “s’excuser”. Les autorités auraient à l’époque “mal évalué la situation” et “pris des risques”, selon lui.

Salah Abdeslam a demandé la parole à la fin d’une matinée d’interrogatoire croisé des accusés au procès des attentats du 22 mars à Zaventem et dans la station de métro Maelbeek.

“J’ai conscience que certaines choses peuvent choquer et blesser, mais je pense qu’on est là pour la manifestation de la vérité et je préfère une vérité qui blesse plutôt qu’un mensonge qui fait du bien”, a-t-il déclaré.

Au cours des heures précédentes, plusieurs accusés avaient expliqué que les attentats terroristes en Europe devaient être lus comme des réponses aux bombardements de la Coalition internationale visant l’État islamique en Syrie. “J’ai entendu les victimes et j’ai été très touché par leur incompréhension. C’est pour cela qu’il faut exprimer les choses clairement afin que ces personnes puissent comprendre ce qui leur est arrivé”, a poursuivi Salah Abdeslam. “Je pense aussi que le gouvernement devrait en faire autant”, a-t-il estimé. Pour lui, les autorités doivent reconnaître qu’elles ont “mal évalué la situation” en participant à la Coalition internationale et qu’elles ont, ce faisant, “pris des risques” pour leur population.


16h42 – À quel moment Smail Farisi a-t-il demandé à son frère de l’aider et que savait Ibrahim ?

Les accusés Smail et Ibrahim Farisi ont été interrogés mercredi sur l’évacuation de l’appartement de l’avenue des Casernes, d’où sont partis le kamikaze Khalid El Bakraoui et l’accusé Osama Krayem le matin du 22 mars 2016. La présidente de la cour d’assises de Bruxelles, Laurence Massart, a cherché à déterminer le moment précis où Smail Farisi a demandé de l’aide à son frère.

Les questions de la cour se sont d’abord adressées à Smail Farisi, qui a répété avoir compris le 22 mars seulement, jour des attentats de Bruxelles, que les personnes hébergées dans son appartement étaient impliquées dans les explosions. “J’étais effondré. J’ai compris le sens de certaines phrases, certains mots“, a-t-il déclaré.

Le soir du 22 mars, Smail se rend au domicile de ses parents où se serait tenue une “réunion familiale”. Smail Farisi a confirmé que la décision de ne pas aller à la police était une décision collective discutée en famille. “Je savais que la police allait remonter à moi. J’étais véhiculé par la peur et la panique. Ce n’est pas la raison qui a agi à ce moment-là“, a-t-il dit. Smail Farisi a également affirmé ne pas se souvenir de la présence de son frère au domicile familial le soir du 22 mars.

Ibrahim Farisi a pour sa part déclaré être resté chez lui toute la journée du 22 mars. Ce n’est que le lendemain que son frère l’aurait sollicité lors d’un petit-déjeuner chez leurs parents. Selon Ibrahim Farisi, son frère lui avait indiqué plusieurs mois plus tôt qu’il voulait rendre les clés de l’endroit et qu’il aurait besoin d’aide. Ibrahim aurait par la suite été occupé par la rénovation de son propre appartement.

La cour s’est alors intéressée au déménagement de l’appartement proprement dit, dès le 23 mars. “Pourquoi avoir voulu changer la serrure ?“, a demandé la présidente de la cour d’assises. “Il y en avait encore dans la nature. Je ne voulais pas qu’ils viennent chez moi. Je ne voulais pas être associé à ça“, a répondu Smail Farisi, qui a ajouté avoir été aidé par un voisin pour la manipulation “compliquée” de la serrure.

L’accusé constate également que les toilettes sont “vachement bouchées”. Or l’endroit ne connaissait pas de problèmes particuliers de tuyauterie. Smail Farisi achète plusieurs produits de débouchage. “Heureusement que ça n’a pas fait exploser” l’appartement, s’est-il exclamé. Osama Krayem, qui a renoncé à se faire exploser dans le métro bruxellois, a dit aux enquêteurs avoir vidé son sac d’explosifs dans ces toilettes.

Ce dessin de Jonathan De Cesare montre une scène des images des caméras de sécurité montrant Ibrahim Farisi vidant la planque à Etterbeek, et un sac à dos d’Osama Krayem contenant des explosifs.

Le 25 mars, “on emporte tout chez moi, y compris le sac à dos“, a déclaré Ibrahim Farisi, qui prétend ne pas avoir senti d’odeur particulière et n’avoir trouvé que “trois CD” dans ce sac. “Il se peut que le sac à dos soit resté une semaine dans ma cave, comme il se peut que je l’aie déposé au container.”

L’ancien chauffeur de taxi a ensuite assuré n’avoir appris que le 9 avril, jour de l’arrestation des deux frères, le rôle joué par l’appartement dans les attentats.
Ce jour-là, ils se rendent à nouveau à l’avenue des Casernes. “Sans raisons“, dit Ibrahim. Il prend connaissance des éléments par la presse, présente sur les lieux.

Les souvenirs de Smail concernant le 9 avril diffèrent : “On allait à la police. J’ai voulu amener mon frère à la police. Je savais qu’on allait remonter jusqu’à moi et ce que je craignais s’est avéré.

Smail Farisi est accusé de participation aux activités d’un groupe terroriste, d’assassinats terroristes et de tentative d’assassinat terroriste, tandis que son frère doit uniquement répondre de participation aux activités d’un groupe terroriste. Tous deux comparaissent libres.


17h15 – “J’ai une grande part de responsabilité, je dois l’assumer”, reconnait Mohamed Abrini

Interrogé par la cour sur la vision qu’il avait des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles à l’heure actuelle et sur le regard qu’il portait sur l’avenir, l’accusé Mohamed Abrini s’est montré plutôt pessimiste, arguant que “l’histoire se répète” avant de reconnaitre sa responsabilité et de réitérer ses excuses aux victimes.

Pour moi c’est toujours la guerre entre l’Occident et l’Orient. L’histoire se répète. Des gens prennent des décisions et des innocents en subissent les conséquences“, a exprimé Mohamed Abrini. “Je vois des guerres qui s’enchainent et des morts. Depuis le 11 septembre 2001, ça ne fait que s’empirer. Depuis la nuit des temps, l’homme est un loup pour l’homme, mais même dans la guerre il y a des règles et je ne suis pas d’accord avec cette manière de faire (les attentats, NDLR)”.

J’ai une grande part de responsabilité, je dois l’assumer”, a ajouté l’accusé. “Je ne peux par revenir en arrière, même si j’aimerais. Comme je l’ai dit, il manque beaucoup de personnes dans ce box et je ne parle pas que de la rue mais aussi des gens en costume cravate. Maintenant, le passé est mort et il faut voir ce qu’il faut faire pour que ça ne se reproduise plus. Il y a beaucoup de choses à faire, à penser.

Sur son avenir, Mohamed Abrini a affirmé vivre au jour le jour. “Pour moi que je fasse 10, 20, 50 ans de prison, ça ne changera rien, ça ne ramènera pas les morts. Je dois patienter. J’ai une dernière parole, elle vaut ce qu’elle vaut, mais je présente mes excuses aux victimes et à leurs proches.”

Mohamed Abrini / Dessin : Jonathan De Cesare

17h26 – “Je suis monté dans un train qui s’est arrêté le 18 mars”, décrit Salah Abdeslam

Je suis monté dans un train qui s’est arrêté le 18 mars et je n’ai pas pu descendre avant“, a décrit mercredi Salah Abdeslam en réponse aux deux questions finales de la cour aux accusés du procès des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles. Ceux-ci ont été questionnés sur leur vision des faits à l’heure actuelle et leur regard sur l’avenir.

Je ne peux pas dire si je condamne ou pas les faits, car le sujet est complexe“, a répondu celui qui devait se faire exploser les 13 novembre 2015 à Paris. “Sortis de son contexte, c’est une scène de crime abominable, que je condamnerais sans aucune hésitation. Mais remis dans son contexte, c’est complexe, car ces actes découlent d’agissements horribles en Syrie.

Je vais désormais essayer d’utiliser mon temps pour faire quelque chose de constructif, qui me soit profitable. Peut-être des études“, s’est projeté Salah Abdeslam.

Salah Abdeslam / Dessin : Jonathan De Cesare

17h47 – “Quand on éprouve ce sentiment de colère, on ne voit plus rien d’autre”, raconte Ayari

Amené à s’exprimer sur sa vision des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles à l’heure actuelle et sur son regard sur l’avenir, l’accusé Sofien Ayari a livré des précisions sur l’évolution de son ressenti entre l’époque des attaques et son état d’esprit actuel. Il est notamment revenu sur le sentiment de “haine” qu’il avait éprouvé. “Quand on ressent ce sentiment de colère, on ne voit plus rien d’autre“, a-t-il raconté.

Il y a une frontière entre la Syrie et la Turquie. Et la perception des choses est très différente en fonction du côté où on se trouve“, a expliqué l’accusé. “À un moment donné, on voit un drapeau et une carte et plus rien d’autre. Tantôt, je n’ai pas parlé de ‘haine’ par hasard, c’était pour vous faire comprendre mon ressenti. Quand on éprouve ce sentiment de colère et d’humiliation, on ne voit plus rien d’autre.”

Parfois, il suffit de rien, un sourire, un échange pour sortir de cette vision-là“, a-t-il continué sur une note plus positive. “Pour moi, ça a commencé au procès de Paris.”

Revenant sur la haine éprouvée, Sofien Ayari a ajouté : “Il ne faut jamais sous-estimer ce que provoque ce genre de sentiment, ça ne m’est jamais arrivé avant ni après et j’espère que ça ne se produira plus jamais, car on n’imagine pas les conséquences.”

Pour les gens qui ont vécu ça (les attentats, NDLR), je leur souhaite de se reconstruire, mais je ne me sens pas légitime de leur dire quoi que ce soit, car je ne sais pas ce qu’ils vivent“, a déclaré l’accusé, ajoutant qu’il ne savait pas ce qu’il ferait de son avenir. “Ça dépendra de beaucoup de choses. Il faudra voir comment les choses évolueront et je verrai bien.”

Sofien Ayari / Dessin : Jonathan De Cesare

El Makhoukhi : “Pour moi, les victimes étaient des chiffres avant que je ne les voie ici”

Pour moi, les victimes étaient des chiffres avant que je ne les voie ici“, a admis mercredi Bilal El Makhoukhi en réponse aux deux dernières questions de la cour. “Maintenant on se rend compte de la cruauté de ce qui leur est arrivé“, a ajouté Bilal El Makhoukhi. “Mais c’est la conséquence de faits encore plus cruels qui ont été commis ailleurs dans le monde.

De se dire que des enfants ont perdu leurs parents, que des enfants ont été blessés dans ces attaques,… Je ne peux pas être fier d’être là. J’espère que ça ne se reproduira plus.J’assume mes responsabilités dans ces faits“, a-t-il conclu avant d’affirmer n’avoir aucune idée en ce qui concernait son avenir.

De son côté, Ali El Haddad Asufi a espéré être entendu lors de ce procès. “Des gens ont pris des décisions et les victimes se sont retrouvées au milieu. Je n’ai pas participé aux faits, je me retrouve dans le box avec ces regards sur moi et j’ai peur que les gens pensent que j’ai pris part à ça. Je n’ai jamais voulu faire de mal à personne“, a raconté l’accusé. “J’espère sortir de prison le plus vite possible et fonder une famille, reprendre une vie normale et passer à autre chose.”

Avant tout, je condamne sincèrement ces attentats”, a, pour sa part, exprimé Hervé Bayingana Muhirwa. “Pour moi, le procès a commencé au témoignage des victimes. C’est là que j’ai pris conscience de la gravité des faits. Vous écoutez ces victimes, vous ne savez même pas quoi leur répondre. C’est très triste, le mot est faible, c’est mal.” “Je me suis demandé comment j’ai été embarqué dans cette histoire. C’est difficile de dire“, a regretté celui à qui l’on reproche d’avoir hébergé Mohamed Abrini et Osama Krayem. “Si j’ai rendu ce service qui m’a amené dans ce box, ce n’est en aucun cas en connaissance de cause.” “J’ai une famille qui m’aime, je sais que j’ai leur soutien. J’espère avoir une vie après, j’ai toujours cet espoir, je sais que ce n’est pas mort“, a terminé Hervé Bayingana Muhirwa.

Enfin, Smail Farisi a qualifié les attaques terroristes d'”absurdes”. “Il n’y a pas de mots, c’est une misère du langage pour décrire ça“, a-t-il affirmé avant de demander à pouvoir sortir prendre l’air.

Son frère, Ibrahim Farisi, s’est fermement opposé aux agissements terroristes. “Je ne cautionne pas. Je ne suis vraiment pas dans cette idéologie-là. Que justice soit faite.” Une dernière phrase qu’il a répétée pour évoquer sa vision de l’avenir. “Que justice soit faite. Je ne peux rien dire de plus, car je n’ai pas d’avenir pour le moment. Peut-être que je partirai, je ne me sens plus chez moi en Belgique. Mais pas en Syrie hein !“, a conclu l’homme, non sans une pointe d’humour.

La Rédaction (avec Belga)