L’éditorial de Fabrice Grosfilley : la rentrée bloquée du gouvernement fédéral
C’est la rentrée, théoriquement la période des bonnes résolutions. Le moment où l’on se promet de travailler mieux que l’année dernière. D’avoir une attitude positive et constructive. De remédier aux problèmes qui sont devant nous, de s’y prendre bien à temps, plutôt que de les laisser pourrir sous le tapis avant qu’ils ne nous reviennent en plein figure. Le moment aussi où l’on se promet d’être un bon camarade, de faire bloc, de se respecter les uns les autres, d’être dans la cohésion de groupe et pas dans le chacun pour soi, parce que l’on sait qu’on ne peut réellement avancer que tous ensemble
La rentrée dont je parle n’est pas celle des écoliers, mais celle du gouvernement fédéral. Alexander De Croo réunit ce vendredi son équipe au 16 rue de la Loi pour la première fois depuis le début de l’été. Ce retour aux réunions hebdomadaires a des allures de dernière ligne droite. Le 9 juin 2024 les belges seront appelé à voter pour tous les niveaux de pouvoir. L’Europe, les régions, le fédéral. Une sorte de super examen pour le monde politique qui sent monter l’adrénaline. Et pour cause : l’équipe d’Alexander De Croo a déjà fait l’impasse sur quelques matières fondamentales. La réforme fiscale n’aura pas lieu, et c’est un fameux trou dans le bulletin que l’opposition ne manquera pas d’exploiter. Les partenaires n’ont pas réussi à se mettre d’accord pour mener cet exercice très attendu. Un début de consensus avait pourtant vu le jour qui aurait pu permettre d’améliorer un peu le pouvoir d’achat des salariés. Mais pour garder le budget en équilibre il aurait fallu, pour modérer les impôts sur le travail, pouvoir les les augmenter ailleurs, le Mouvement Réformateur a refusé. Pas de réforme fiscale donc, même si certains partis continuent d’en parler.
Le budget est l’un des gros dossier sur lequel l’équipe De Croo va devoir se rattraper. Avec des perspectives qui ne sont pas bonnes. Une dette publique qui s’approche des 110% du Produit Intérieur Brut et des difficultés qui s’enchainent… il n’est pas exclu que la Commission Européenne ne se mettent à envoyer des avertissement à l’élève Belgique. Le temps de la souplesse pour cause de Covid 19 ou d’envolée des prix du gaz est derrière nous.
Et puis… il y a les questions de sécurité et d’asile. Elles se sont invitées cet été par l’intermédiaire d’un appel de la patronne de la SNCB. L’instituteur De Croo a voulu mettre tout le monde au travail, a appelé à collaborer avec la classe d’à coté, celle de M. Rudi. On a donc vu deux premières opérations de police d’envergure en moins d’une semaine. Genre on n’est pas inactif, on va mettre du bleu dans la rue, ou en l’occurrence dans la gare. Tout le monde sait que cela ne suffira pas. Que pour ramener de la sécurité à Bruxelles il faut résoudre des problèmes structurels comme la lutte contre le trafic de drogue, le désengorgement des tribunaux, la saturation des prisons, la propreté des lieux publics , les problèmes de santé mentale, la pénurie de logement et l’accueil des demandeurs d’asile. Cela fait beaucoup de boulot pour une petite année scolaire.
Une partie de la tache incombe à la région et aux communes, une autre relève bien du fédéral. Et à ce niveau là, que soit sur le trafic de drogue ou la politique de l’asile on ne voit pas grand chose si ce n’est l’étalage des divergences. Des désaccords qui contrarient jusqu’ici toute avancée et donnent le sentiment d’une équipe à l’arrêt. La politique de l’asile en est le meilleur exemple. Quand l’élève De Moor (la secrétaire d’Etat à l’asile et à la migration) décide de se croiser les bras et de ne pas bouger, question de principe puisqu’il s’agit dans son esprit (et dans celui de son parti) de faire comme Theo Franken, le caïd de la promotion précédente, du temps de Charles Michel. Surtout ne pas créer de places d’accueil pour ne pas créer d’hypothétique appel d’air et risquer de se faire crosser par l’extrême-droite. Le genre de peur et de stratégie électorale qui enlise le dossier pour de bon et envoie des centaines de personnes dans les rues . L’élève De Moor ne sera pas sanctionnée, elle est au contraire encouragée par le banc flamand. On ne créera pas de place d’accueil, question de principe. De même qu’ Annelies Verlinden n’enverra pas de policier dans les gare ou dans le métro. Sur ces dossiers comme sur d’autre le fédéral ne bougera pas. Et c’est Bruxelles qui en fera les frais.