L’édito de Fabrice Grosfilley : en voiture

Fabrice Grosfilley - Photo Couverture

Décider d’abord, concerter ensuite. Cela semble être la méthode flamande pour gérer les travaux du carrefour Léonard. Ce carrefour est en Flandre évidement, c’est donc bien la Région flamande qui a la responsabilité de la gestion de cette partie du ring. Mais ce carrefour est aussi emprunté par de nombreux automobilistes qui peuvent être flamands, bruxellois, wallons, étrangers, qui passent tous soit par le ring pour contourner Bruxelles, soit par l’autoroute E411 (les anciens diront autoroute de Namur) pour quitter Bruxelles, rejoindre Bruxelles, le matin, le soir, en journée, en pleine nuit…

Cela fait plusieurs mois qu’un chantier de rénovation est en cours sur les tunnels du carrefour Léonard. Ce chantier engendrait déjà de fortes perturbations en raison de la fermeture d’une bande de circulation depuis les Quatre-Bras de Tervuren, avec des files qui remontaient jusqu’à la sortie Kraainem. Et déjà beaucoup d’automobilistes qui tentaient de contourner le problème en traversant Woluwe-Saint-Pierre, Auderghem et Watermael-Boitsfort. Pour ceux qui connaissent ce secteur, on ajoutera un rétrécissement au bout de l’avenue de Tervueren où ce chantier en surface complique le franchissement du carrefour des 4 bras (on peut rester 15 minutes entre les deux pompes à essence, là où l’avenue de Tervueren, l’avenue Baron d’Huart et la chaussée de Bruxelles se rejoignent). On doit théoriquement installer une passerelle vélo dans ce secteur, mais la passerelle reste pour l’instant sur le bas-côté et cela fait des mois que ça dure. Bref, dans la périphérie est de Bruxelles, c’est chantier à tous les étages, en surface, dans les tunnels, aux Quatre-Bras, au carrefour Léonard… de quoi mettre les automobilistes sur les nerfs.

A cette accumulation de chantiers pas très heureuse, se sont ajoutés des imprévus. Les ingénieurs de la Région flamande ont constaté que les dommages causés aux murs latéraux des entrées et aux dalles des tunnels du carrefour Léonard étaient plus importants que prévu. C’est ce qui expliquerait ces travaux supplémentaires et leur irruption soudaine dans le calendrier : c’est urgent. Pour rappel, l’autoroute E411 au niveau du viaduc Herrmann-Debroux, c’est chaque jour 35 000 véhicules qui entrent dans Bruxelles et 35 000 autres (souvent les mêmes) qui sortent :  70 000 mouvements de véhicules qui vont donc être en partie contrariés à partir de ce matin. Même si évidement, on doit rappeler aussi qu’à terme, ce viaduc est appelé à disparaitre et qu’il doit être remplacé par un boulevard urbain, et qu’en 2003 déjà, il y a donc 21 ans, on avait déjà dû se passer de ce viaduc à la suite d’un incendie. Oui, il est donc possible de vivre avec une autoroute E411 en partie fermée.

Ce rappel historique ne va évidemment pas consoler les automobilistes qui vont voir leurs temps de parcours exploser dans les prochains jours, ni les riverains qui vont voir les véhicules s’entasser devant leur domicile soir et matin. Hier soir, la ministre flamande des Travaux publics, la libérale Lydia Peeters, a consenti un léger aménagement :  la réouverture de cette bretelle vers Waterloo entre 16h et 6h du matin pour ce soir et pour demain. Une petite échappatoire qui devrait donc aider un peu pour les retours à l’heure de pointe. Mais ce n’est que pour deux jours. Pour la suite, les ministres doivent se revoir. Ils doivent discuter, ils doivent réfléchir ensemble à la manière de concilier des intérêts qui semblent contradictoires. Rénover des tunnels. Permettre aux Flamands et Wallons d’entrer dans Bruxelles et d’en sortir. Donner aux Bruxellois le sentiment qu’ils ne sont pas envahis de voitures. Bref, faire de la politique, réfléchir aux conséquences, prévenir, communiquer, concerter, offrir des alternatives. Tout ce qui n’a pas été fait ces dernières semaines.

On notera au passage que Lydia Peeters ne communique pas dans les médias francophones (j’imagine ne pas être le seul à l’avoir sollicité). Ce n’est pas son électorat. Tant pis pour l’automobiliste francophone. Et on ajoutera (mais on est taquin) que la problématique des tunnels qu’on laisse se détériorer faute d’investissements, qui a déjà fait couler tant d’encre il y a quelques années, qui a suscité tant de critiques et de moqueries, dont on disait que ça ne serait pas possible dans une région bien gérée, finalement… ça ne concerne pas que Bruxelles.

Fabrice Grosfilley