Covid : vers une reconnaissance élargie comme maladie professionnelle

Le projet de loi a été approuvé hier à la Chambre.

Reconnaître le Covid-19 comme maladie professionnelle, lorsque l’infection peut être corrélée à des contaminations sur le lieu de travail : voilà, en substance, l’objectif d’un projet de loi, déposé par le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit), et débattu hier en plénière de la Chambre, puis approuvé.

Pour l’heure, seuls les travailleurs des soins de santé pouvaient bénéficier de ce régime, depuis le début de la pandémie, lorsqu’une infection était survenue à cause du fait qu’ils aient soigné un patient, les soignant courant “un risque nettement accru d’être infecté“, rappelle le projet de loi. De même, les travailleurs des secteurs essentiels/cruciaux (qui n’avaient donc pu pratiquer le télétravail ou respecter des mesures de distanciation) avaient aussi pu y prétendre, durant la période des pouvoirs spéciaux.

Dans le cadre du projet du ministre, c’est désormais toute la population qui pourrait demander de qualifier son infection comme maladie professionnelle, dans le cadre de certains critères stricts. “Aujourd’hui, une flambée de contaminations dans un certain espace de travail, pendant une période bien définie, peut-être un indice qu’il y a eu une exposition au Covid, qui est inhérente à l’exercice de l’activité professionnelle, et dont le degré d’exposition est significativement plus élevé que celui de la population générale“, lit-on dans le projet de loi : comprenez que s’il y a eu beaucoup d’infections sur votre lieu de travail à un moment-donné, et que cela a donc augmenté votre risque d’être infecté (et que vous l’avez été), il peut donc s’agir d’une maladie professionnelle. Le tout avec un effet rétroactif jusqu’au 18 mars 2020, soit le début de la pandémie dans notre pays.

Des critères de cinq contaminations

Si l’on se penche plus précisément sur les critères retenus pour qualifier une infection précise comme maladie professionnelle, c’est le critère de cinq contaminations survenues sur quatorze jours qui a été retenu pour démontrer scientifiquement que la contamination est liée à des conditions sanitaires particulières sur son lieu de travail.

Cinq contaminations : un nombre qui était au cœur du débat, lors de la séance plénière de la Chambre mercredi. Plusieurs députées se sont interrogées sur cette durée, comme Sofie Merckx (PVDA-PTB) qui a regretté que ce cap ne soit pas descendu à deux contaminations (le chiffre retenu par Sciensano pour désigner un cluster). Un avis partagé par la députée DéFI Sophie Rohonyi, qui craint que cette limitation viennent exclure les personnes qui travaillent seules ou dans de petites structures, comme les titres-services par exemple.

À quoi le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, a répondu que “cinq contaminations dans une période de quatorze jours, c’est une pondération correcte. En tant qu’approche d’une situation où l’on pourra dire ‘ici, il y a une forte suspicion d’un lien causal entre l’activité professionnelle et la maladie’. Mais effectivement, il faut, à un certain moment, définir un point. C’est toujours un peu arbitraire, mais ça ne l’est pas tout à fait. On pourrait dire quatre, on pourrait dire six, on a opté pour cinq“.

Réponse de Frank Vandenbroucke aux députés

Séance plénière de la Chambre du 10 novembre 2021 – Source : Chambre

Le ministre a également expliqué que, dans le débat entre les deux contaminations retenues par Sciensano et les cinq prévues dans le projet, il y a une différence entre un enregistrement scientifique (tel que mené par Sciensano) et les suspicions pour lien causal dans la réalité.

De même, le député libéral Christophe Bonbled a également souligné qu’une personne ne rentrant pas dans les critères retenus peut toujours lancer une procédure ouverte de reconnaissance.

La CGSLB globalement satisfaite

Du côté syndical, la CGSLB s’est dite globalement satisfaite. Olivier Valentin, secrétaire national, estime que cette nouvelle disposition pourra recouvrir des profils bien plus larges qu’aujourd’hui, qui bien qu’ils ne travaillent pas dans les soins de santé on tout de même souffert d’un Covid à cause de leur activité.

Le syndicaliste libéral souligne également l’importance de l’effet rétroactif, mais comme les deux députées d’opposition, réagit au cap des cinq contaminations sur quatorze jours.

Il y a eu un choix politique de mettre le curseur à cinq contaminations sur une période de quatorze jours : dans de très grandes entreprises, on peut y parvenir relativement rapidement, [mais] dans de plus petites structures, ça risque d’être plus problématique“, nous explique-t-il, “Si Sciensano, avec son approche scientifique, détermine qu’il peut y avoir un cluster à partir de deux [contaminations] peut-être que ce niveau est un peu élevé. Mais c’est déjà un pas dans la bonne direction, et on peut espérer que les éléments adaptables dans l’arrêté royal puissent être abaissés dans le futur “.

Interview d’Olivier Valentin, secrétaire national CGSLB

 

ArBr – Photos : Belga