Couacs dans la vaccination : le système informatique Doclr sur le grill

C’est un feuilleton qui n’arrête pas de connaître de nouveaux développements : la plateforme de convocation pour la vaccination au Covid-19 a connu de nouveaux ratés ce mardi. Et on commence à pointer du doigt les prestataires de service choisi par l’Etat fédéral.

L’un de ces prestataires est Paronella, une petite startup flamande, évoquent ce mercredi L’Echo et Le Soir. Cette petite société est basée près de Louvain, et compte peu d’employés. Son outil, Doclr, est une sorte d’agenda utilisé pour gérer la stratégie de vaccination, auquel se greffent les outils permettant de sélectionner les personnes à vacciner, ainsi que ceux permettant d’envoyer les invitations.

Une plateforme qui connaît depuis son lancement de nombreux bugs. Comment l’expliquer ? “On est dans un système de vaccination qui dépend de beaucoup de flux : Doclr doit recevoir un certain nombre de fichiers, et on dépend aussi d’une stratégie qui est changeante. Evidemment, il y a de l’informatique, ces fameux flux, et il y a aussi de l’humain, puisque la stratégie de vaccination change beaucoup. Il y a parfois des bugs qu’on perçoit comme des bugs informatique, mais qui ne le sont pas“, indique Axel Legay, informaticien, professeur de cybersécurité à l’UCLouvain spécialisé dans le testing et le tracing, et ayant collaboré avec le comité interfédéral sur ces deux points, “En lui-même, l’outil Doclr n’est pas compliqué, maintenant si l’on prend la gestion de l’outil, la gestion du centre, les stratégies de vaccination, et qu’on fait tout dans l’urgence, ce que demande la crise sanitaire, plusieurs petites choses qui ne sont pas compliquées peuvent devenir quelque chose de compliqué. C’est peut-être pour cela qu’il va falloir un temps de lissage. Je ne suis pas surpris qu’il y ait des bugs, il y en aura encore, mais cela ne doit pas reprendre en question la campagne de vaccination

Pourquoi Doclr ?

Un tel nombre de couacs techniques que l’on peut s’interroger sur la raison pour laquelle Doclr, le logiciel de Paronella, a été sélectionné par les autorités. Notre rédaction s’est procuré la décision quant à l’attribution de ce marché à Paronella par Smals, le prestataire informatique de bon nombre d’organes de l’Etat. De même, Smals coordonne et fournit le lien entre les bases de données, et la plateforme qui envoie les invitations.

Plus tôt dans la crise sanitaire, Smals a donc choisi Doclr parmi trois offres de société, sur base de plusieurs critères : le respect du cahier des charges administratif (les trois sociétés étaient ex-aequo), l’adéquation aux besoins (ex-aequo entre Doclr et Doctena, une des deux autres sociétés), le délai de mise en production (idem) et le prix. C’est sur ce dernier point que les offres se démarquent réellement : celle de Doclr arrive en premier, avec l’offre la moins chère.

Interview d’Axel Legay, informaticien et professeur à l’UCLouvain

Doclr dans l’oeil des autorités

La plateforme retient aujourd’hui l’attention des autorités, et notamment celle d’Alain Maron (Ecolo), ministre bruxellois de la Santé. Celui-ci a adressé un courrier à la conférence interministérielle Santé publique, composée de ses différents homologues.

Alain Maron souhaite baser la campagne de vaccination sur l’âge uniquement

Dans son courrier, le ministre dénonce notamment les nombreux problèmes constatés sur la plateforme : retards d’invitation, absence de certains filtres, lenteur du système, couacs de sécurité, absence de visibilité sur qui a déjà été invité à être vacciné, les difficultés à modifier les rendez-vous, etc.

Alain Maron plaide également pour l’abandon de certains priorités, et d’être plus agile dans les développements. “C’est ma position personnelle : je le rejoins, je crois qu’il y a beaucoup trop de flux de données“, explique Axel Legay, “si on continue à se baser sur des comorbidités et autres, ou sur des professions prioritaires outre le personnel soignant, on aura toujours des changements. Même si l’informatique est agile, il faut des phases de test longues, ce qui n’est pas le cas ici. Je le rejoins sur le fait qu’il faille un cadre simplifié et définitif

Face à ces différents bugs, Smals nous signale que “le plus important problème a été réglé par l’INAMI et Doclr a augmenté la capacité de son système durant le redémarrage d’hier, et l’augmentera encore“.

 

■ Le point avec Arnaud Bruckner dans Toujours + d’Actu