Colonisation : des excuses et des réparations ?

Ce lundi dans +d’Actu, Aliou Balde du collectif Mémoire Coloniale et Guillaume Defossé, député fédéral Écolo, se disent favorable à des excuses de la Belgique sur son passé colonial. Mais il y a débat sur les réparations financières.

L’idée d’excuses présentées par la Chambre pour la politique coloniale de la Belgique ne recueille pas un consensus suffisant pour le moment. C’est ce qu’il est ressorti d’un échange lundi au sein de la commission parlementaire qui se penche sur le passé colonial.

Le président de la commission, Wouter De Vriendt (Ecolo-Groen), a présenté la semaine passée des propositions de recommandation après deux ans et demi d’un travail qui a donné lieu à plusieurs centaines d’auditions et un déplacement dans les anciennes colonies.  Il est notamment question d’excuses que présenterait la Chambre aux peuples congolais, burundais et rwandais pour “la domination et l’exploitation coloniale” et “de démarches analogues sur le plan des réparations symboliques” qu’accomplirait le “pouvoir exécutif”, une dénomination qui recouvre à la fois le gouvernement et le Roi.

Cette reconnaissance n’emporterait pas de responsabilité juridique et ne pourrait donner lieu à une réparation financière, précise la recommandation suivante.

Invité dans +d’Actu, le député fédéral Écolo Guillaume Defossé dit ne pas être partisan de cette idée. “Ce serait finalement un gros chèque qu’on donnerait aux pays concernés en disant que c’est réparé. Ce ne serait pas très utile. Il faut se concentrer sur des réparations matérielles comme les restitutions. Des réparations symboliques comme une journée de commémorations. Il y a la lutte contre le racisme, car il y a un lien très clair entre la propagande coloniale et le racisme aujourd’hui, on doit lutter contre ces stéréotypes. On doit faire un travail sur la relation que nous avons avec ces pays que l’on doit décoloniser parce qu’on oublie qu’ils sont indépendants depuis 62 ans et nous devons nous remettre sur un pied d’égalité.

Aliou Balde du collectif Mémoire Coloniale estime que c’est en dessous de ce que les militants souhaitent entendre. “La colonisation a été une grosse entreprise de dépossession économique des populations pendant près de 75 ans pour la Belgique. Il est grand temps pour nous de pouvoir financer des recherches pour savoir comment le pillage économique s’est fait et comment entamer des responsabilités concrètes de la part des entreprises, de l’État, de l’Église. Il est possible de chiffrer un certain nombre de choses. Quand Léopold II accorde une concession de terrer à une multinationale au Congo, il est possible de chiffrer la location de la terre. Il est possible de transformer le travail forcé. Il est possible de chiffrer les heures de travail forcé sur lequel est basé le système économique et colonial. Des experts l’ont rappelé niveau des auditions de la commission.” Il propose que l’argent des ventes de ticket de musées dans lesquels il y a des objets pillés doit être restitué aux anciennes colonies.

Guillaume Defossé estime que cela est compliqué.  “On a démontré pendant cette commission que c’est très difficile à chiffrer et même si on peut identifier certains montants, mais ce ne sera jamais suffisant, on n’aura jamais une vue exhaustive du montant qui aura été prélevé sur le Congo et il faut savoir à qui on donnerait, comment, etc.” Ce à quoi répond “très difficile ne veut pas dire impossible” Aliou Balde.  “Il faut mettre les moyens en place pour que ce soit creusé et qu’il y ait des recherches précises là-dessus et des enjeux concrets qui sont pointés du doigt. ”

Ces excuses iraient plus loin que les “regrets profonds” exprimés par le chef de l’État en juin dernier à propos du régime colonial lors de sa visite en République démocratique du Congo. Précédemment, des “excuses” avaient déjà été présentées au nom du gouvernement à propos du sort réservé aux métis ou au premier Premier ministre congolais, Patrice Lumumba mais jamais pour le régime colonial dans son ensemble.

Les travaux se poursuivront la semaine prochaine. La commission doit approuver d’ici à la fin de l’année sur des conclusions.

Retrouvez en intégralité le duel entre Aliou Balde et Guillaume Defossé

Anaïs Corbin avec Belga/ Un débat mené par Fabrice Grosfilley