“Campus en grève”: des dizaines d’étudiantes féministes devant l’ULB

“Campus bloqué: Journée de lutte pour les droits des femmes et des minorités de genre!” L’affiche aux lettres rouges sur fond blanc se dégageait parmi d’autres banderoles mauves et colorées vendredi à l’entrée du campus du Solbosch. Ce samedi, une manifestation une manifestation nationale s’élancera depuis la gare de Bruxelles-Central à 15h00 avant un concert place de l’Albertine.

Reportage de Jean-Christophe Pesesse, Béatrice Broutout et Hugo Moriamé

En musique et sous un soleil radieux, plusieurs dizaines d’étudiantes et d’étudiants de l’Université libre de Bruxelles (ULB) distribuaient des tracts et scandaient des slogans pour dénoncer le sexisme qui empoisonne encore les études et la vie des femmes. Au gré des vagues d’étudiants sortant du tram ou du bus, les activistes féministes expliquaient à leurs camarades de cours pourquoi l’entrée de l’avenue Paul Héger était barrée de grilles ce vendredi. “Partout dans le monde, les femmes gagnent moins de revenus, se chargent davantage des soins, ont des pensions plus faibles et sont quotidiennement confrontées à des violences sexistes, sexuelles, psychologiques, physiques, économiques et juridiques”, soulignent les tracts distribués par les membres de l’Union syndicale étudiante, le Cercle féministe de l’ULB, les Jeunes anticapitalistes et d’autres étudiantes manifestant à titre personnel.

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Nos universités et hautes écoles sont aussi responsables du sexisme” en perpétuant le plafond de verre, la culture du viol et l’assignation genrée dans certaines filières, poursuivent les militantes. Certains jeunes, interloqués, font le tour du campus pour emprunter une autre entrée. Mais de manière générale, “les gens sont plutôt réceptifs” aux sept revendications du collectif 8 mars ULB, sourit Chloé, étudiante en psychologie. Pêle-mêle – car “aucune n’est moins importante que les autres“, ajoute Lucie, étudiante en Langues et Lettres -, les étudiantes demandent d’interdire que les élèves portant le voile soient “fouillées” avant un examen (pour vérifier qu’elles ne cachent pas des écouteurs sous leur foulard), que les boursières bénéficient d’un fonds maladie lorsqu’elles doivent être arrêtées durant leur grossesse, ou encore que les personnes souffrant de douleurs menstruelles puissent bénéficier de certaines adaptations pour les cours et les examens.

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“Le rectorat n’est pas avec nous”

Chloé et d’autres étudiantes sont arrivées dès 04h00 pour installer le piquet et bloquer l’accès aux principaux bâtiments. Elles se sont rapidement heurtés aux membres de la sécurité qui, à l’aide de disqueuses, ont libéré les portes de leurs chaînes, relatent-elles. “Cela nous a étonnées parce que cela ne s’était pas produit les années précédentes“, pointe Chloé. “Ils nous ont dit qu’ils avaient reçu des ordres. Ça s’inscrit dans le mouvement de répression du campus auquel on assiste depuis environ un an” et les manifestations pro-palestiniennes, soutient-elle. Fin juin, la police avait procédé à l’expulsion des militants qui occupaient un bâtiment du Solbosch depuis le début du mois de mai. La rectrice Annemie Schaus leur avait demandé de libérer les lieux, car elle estimait que l’évolution du mouvement ne répondait “plus aux idéaux qui l’ont motivé” et regrettait des dégradations.

Depuis lors, certains étudiants ont reçu des convocations (de la justice, NDLR), ce qui veut dire que l’ULB a volontairement donné leurs noms“, déduit l’étudiante de 22 ans. Lucie et Chloé craignent d’ailleurs d’être sanctionnées pour leur participation à la grève “car on se rend compte que le rectorat n’est pas avec nous“. Dans la petite foule, elles sont plusieurs à préférer rester anonymes ou à détourner leur visage des quelques caméras et appareils photos.

La fin de cette “surveillance” – qu’elles vont jusqu’à appeler “fichage” – sur le campus figurent parmi les revendications du collectif. Des négociations ont ainsi été lancées lundi avec le vice-recteur aux affaires étudiantes et sociale, Arnaud Destrebecqz. La rencontre “s’est relativement bien déroulée, dans un climat d’écoute“, relève une représentante du groupe de travail dédié aux pourparlers. “Nous avons présenté nos revendications mais, globalement, on les sent réticents parce qu’ils disent que l’ULB a déjà mis beaucoup de choses en place.” Le prochain rendez-vous est fixé dans un mois. Entre-temps, chaque partie est invitée à avancer de son côté, conclut-elle.

Vers 13h00, les barrières se sont écartées pour laisser déferler les étudiantes sur l’avenue Paul Héger, aux cris de “Nous sommes fortes, nous sommes fières et féministes et radicales et en colère“. Après un “atelier pancartes” et un repas de midi à prix variable selon les moyens de chacune, des prises de parole sont prévues l’après-midi.

Avec Belga

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07 mars 2025 - 13h57
Modifié le 08 mars 2025 - 11h35